S’il fallait douze bonnes raisons d’écouter Je
vais bien, le nouvel album de Michèle Torr, cinq y suffiraient et la
première serait…
La première chanson,
la deuxième Je n’ai plus le temps,
la troisième On aurait pu on aurait dû,
la quatrième Je vais bien
et la cinquième Les jours heureux…
Car ces cinq chansons inédites justifient à elles-seules
l’existence de ce disque qui aurait pu être un EP ou un mini-album. Cinq
chansons très séduisantes auxquelles s’ajoutent sept reprises qui ne font sans
doute pas oublier les très belles versions originales qu’on peut leur préférer tant
elles étaient belles et tant on les a aimées (Un enfant c’est comme ça, Chanson
inédite, Romantique féminine, Sentiments ou Les choses de la vie). Ces
trois dernières, avec des arrangements inspirés
de leurs versions originelles, auraient d’ailleurs trouvé leur place
dans un spectacle symphonique tel
qu’il avait été projeté en 2015.
L’ensemble constitue cependant un très joli disque, apaisé,
paisible, serein presque, avec une unité certaine dans le ton, dont on aurait
pu craindre de ne pas la trouver du fait du concept premier lui-même (proposer
des versions nouvelles d’anciennes chansons méconnues éparpillées dans la
discographie…) auquel se sont donc adjointes cinq chansons originales. Sur le
plan vocal, de la simplicité, de la sobriété, une voix brute presque, qui ne
cherche pas les effets, sur des musiques synthétiques auxquelles manque parfois
la profondeur sonore de vrais instruments. Le choix des titres s’est ensuite
porté sur Rentrer sur scène qui date de 1991, dont la version diffère peu
de la première et enfin, et c’est à la fois plus surprenant et plus réussi, sur
La
grande chanson, chanson sortie en 1965 et dont Michèle était si fière à
l’époque (paraît-il), car c’était l’une des premières qu’on lui ait confiées
qui lui semblait convenir à sa voix et à ses goûts, mieux que les adaptations
de chansons anglo-saxonnes qu’on lui avait imposées jusqu’alors. Et bien là, en
2019, le charme et la légèreté d’une jolie mélodie toute simple opèrent encore,
de même que sur l’ensemble du disque… Un disque très personnel, sans
prétention, dans la lignée de Vague à l’homme, Seule ou La
louve par la couleur intimiste dont il est entièrement empreint, où
l’on entend battre le cœur d’une enfant dont les rêves l’ont fait monter
jusqu’à nous au moment même où sa mère s’en allait pour toujours, le cœur d’une
demoiselle qui un jour par inadvertance a laissé s’envoler l’amour, le cœur
d’une femme que la vie n’a pas toujours épargnée, parfois maltraitée, secouée à
cent à l’heure bien qu’elle ait été protégée par tant d’amour, et le cœur d’une
mère qui se rappelle avec émotion les premières années de ses enfants et,
pudiquement, envers et contre le temps qui passe, chante encore son fils.
Pour finir dans ce disque c’est aussi à nous, son public,
qu’elle rend aussi hommage, dans Je vais bien, Les jours heureux, Rentrer sur
scène, Chanson inédite ou, citant Barbara (« Mon Dieu que j’avais
besoin de vous… »), dans La première chanson.
« A l’aube d’un nouveau jour
J’établis le bilan
Des bienfaits de l’amour
Des moments bouleversants
J’ai connu le succès
Les plus beaux compliments
Et vous m’avez montré
Le plus grand dévouement
Le seul qui dans ma vie jamais ne m’a laissée
Le seul qui dans ma vie jamais ne m’a lésée…
Je me vois dans vos yeux
Je vois le lendemain
Grâce à vous je vais bien »,
Je vais bien ;
« Les jours heureux sont comme des flashes instantanés
Qu’il ne faut pas laisser filer
Près de vous j’en aurai jamais assez
Yeh…
J’ai chanté sur des scènes immenses
Protégée par tant d’amour
Je pensais de toute évidence
Que ça durerait toujours…»,
Les jours heureux ;
« Tu me portes
Et mes doutes s’envolent
Je ne veux rien d’autre
Que ce que tu me donnes
Dans le halo du projecteur
Je vous entends je vous respire
Et peu à peu je vous rejoins
Rentrer sur scène
Crier « Je t’aime »
Se dévoiler et se donner
Sans pudeur
Cœur à cœur…»,
Rentrer sur scène ;
«La première chanson qui nous a réunis
C’était autour de mes quinze ans
J’avais trouvé les clés du paradis
Elle était si fière ma maman
Nous prenions toutes deux
Comme une joie intense
Vos bravos chaleureux
Dans toute votre indulgence
Dans ce maudit soir de décembre
Je suis restée seule avec mes rêves
Mon Dieu que j’avais besoin de vous
Je me disais sans bien comprendre
C’est mon enfance qui s’achève
Mon Dieu il ne me reste plus que vous
Il ne me reste plus que vous…
Er quand les lumières m’habillent
Et que j’oublie tous mes chagrins
Je suis si bien là devant vous
Je revois la petite fille
Chanter la vie dans son jardin
Si fort que c’est monté jusqu’à vous
Que c’est monté jusqu’à vous »,
La première chanson.
Espérons que ce disque, alors qu’il n’est disponible que
dans la boutique du site www.micheletorr.com
pourra malgré tout, dans le labyrinthe
du marché musical actuel, et trouver un peu de lumière, une fenêtre par où
s’envoler. Voilà où se rejoignent, dans un mouvement inverse la diva qui
craignait de n’être plus qu’un ange déchu et la petite fille grandie sous un
ciel lavande qui chantait la vie si fort dans son jardin que sa voix est montée
jusqu’à nous.
Elle sourit l’air de rien.
Elle va bien.
Merci.
Pour elle.
Et à elle.
La semaine prochaine, Nouvelles
suites pour chroniques passées…
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