samedi 26 juillet 2014

Michèle Torr chante le soleil


Fille de la Provence, Michèle Torr est aussi fille de l’été, fille du soleil, et, bien sûr, l’été, le soleil, elle les a chantés dans quelques-unes de ses chansons, souvent sans prétention, juste pour un clin d’œil, pour le plaisir,  pour un sourire. Mais le soleil n’est pas que l’astre qui éclaire
« une place…pas très loin de Marseille,
 un petit village perdu dans la Provence »,
 c’est aussi celui qui nous introduit dans l’imaginaire parfois plus sombre de l’artiste (ou de ses paroliers), et même dans son intimité .En 1993, le soleil a surtout été pour elle l’occasion de nous donner une belle leçon d’optimisme.


D’abord une balade en chansons…

« Je rêve d’une plage
D’un soleil qui m’aiderait à t’oublier… »
Moi je rêve d’une plage, 1965.

« …Je t’aime tant
Tant que tu seras
Comme un soleil
Brûlant ma couche …»
 Je t’aime tant, 1966

« Le soleil ne brille pas ici
Dom dom
Dom dom
Et la plage est vide aujourd’hui…
Tous les trains peuvent s’en aller
Puisque je suis dans tes bras
La plage est remplie de joie
Et le soleil brille… »
Dom dom, 1966.

 « Il avait du soleil
Au fond de ses yeux
Et répétait cent fois
Qu’il n’aimerait jamais
Une autre que moi
Une autre que moi
Une autre que moi… »
Doucement simplement tendrement, 1966

« Regarde
Tout autour de toi
Regarde alors tu te réchaufferas
Comme moi au soleil
De l’amour de l’amour »
Regarde, 1967.

« Mais la vie c’est la vie,
Des soleils défendus,
Des bonheurs encourus
Mais moi je t’aime… »
Mais la vie c’est la vie, 1968.

« Au bord d’une plage sans soleil
Rien ne brille plus pour moi… »
Au bord d’une plage, 1968

« Fleur de pavot fleur du mal qui s’ignore
Tout le soleil est dans ton parfum…
Fleur de pavot te voilà cigarette
C’est un ciel gris qui devient soleil
Soleil brûlant jour et nuit que l’on guette… »
Fleur de pavot, 1969.

« Il y aura un homme dans ma vie
Et la terre n’aura que des fleurs nouvelles
Le soleil brûlera mes nuits… »
Un homme dans ma vie, 1969.


Le premier titre ensoleillé, c’est Fleur de soleil, sorti en 1970 sur l’album Tous les oiseaux reviennent. Adaptation d’une chanson allemande par Paul Saka, nous voilà plongés dans les tourments de la jalousie d’une femme qui ne supporte pas que celui qu’elle aime dorme. Peut-être suite à la prise de certaines substances qui l’ont détaché de la réalité, celui-ci a « remplacé le jour par la nuit »  et elle le soupçonne d’aller « en plein sommeil cueillir des fleurs, étranges fleurs, des fleurs de soleil ». On peut  comprendre cela comme une chanson sur les méfaits de la drogue. Un univers résolument psychédélique avec ces images fleuries au milieu de chœurs sauvages sur un rythme à la fois feutré et très martelé. Une voix fiévreuse comme jamais dans une autre chanson.


Suite de la balade en chansons…

« Tu rêves tout éveillé
A des îles ensoleillées
Tu vois la mer qui scintille… »
Tous les oiseaux reviennent, 1970.

« Que de fois
Ta façon d’aimer
A ensoleillé mes jours… »
J’ai pleuré de joie, 1970.

« Je sais qu’un jour le soleil brillera
Que dans le ciel de l’amour il éclatera… »
Rire ou pleurer, 1971.

« Pense au printemps qui s’éveille
Au soleil qui ensoleille
Aux merveilles des merveilles
Qui sont là pour toi… »
Petit si petit, 1972.

« Une vague bleue…
C’est comme un soleil
Là-haut dans le ciel… »
Une vague bleue, 1974.

« Seule dans la nuit
Je pense à toi qui vois le soleil
Toi que j’aime… »
Never never live without you, 1975.

“Elle partait en vacances
Près de Saint-Paul de Vence
Elle partait avec lui
Au soleil du Midi »
Cette fille c’était moi, 1975.


Plus sagement qu’en 1970, il y a eu en 1976, sur l’album Michèle Torr qui s’ouvre sur Je m’appelle Michèle, Soleil. Une chanson plus conventionnelle et estivale, qui parle du départ d’une famille  pour trente jours de vacances: destination le bord de la mer. Objectif : construction de châteaux de sable à quelques mètres de l’eau.
« Au soleil…qui fait craquer la terre,…qui fait briller la mer ».
Un conseil : ne pas oublier son chapeau.


Suite de la balade en chansons…

 « Sous mon soleil
On sait prendre le temps
De regarder
De se parler simplement
Les gens d’ici
Disent que tu es fou
Toi Paris qui décides pour nous »
Paris laisse-moi vivre ma vie, 1976.

« Les déserts d’Arabie
La mer en folie
Toujours toi
Une tour de Babel
Au soleil
Oui c’est toi… »
Le jardin d’Angleterre, 1976.

« En ce temps-là la vie était plus belle
Et le soleil plus brûlant qu’aujourd’hui… »
Les feuilles mortes, 1976.

« Ils sont partis dans un soleil d’hiver… »
Exodus, 1976, 2003.

« Don’t know why
There’s no sun up in the sky… »
Stormy weather, 1976, 1982.

“Quelque part dans la ville
Sur les paves brulants
Le soleil tombait
Quelle chaude journée… »
Le mal de mai, 1977.

« Ce serait sur le Pacifique
Le soleil viendrait nous brûler… »
Comme un voilier, 1977.

En 1978, sur l’album Emmène-moi danser ce soir, la chanteuse espère D’autres soleils dans une chanson plus triste, où l’on entend la voix d’une femme esseulée, après l’été, qui espère d’autres soleils, après celui qui est passé, « pour brûler  le vent d’octobre » et pour bien d’autres choses encore…


En 1979, sur l’album Chanson inédite sorti en juin, juste avant l’été, Juste après l’été :
« Un soleil
Au milieu d’un ciel
Tout bleu
Du sable et des cheveux blonds
Peut-être une chanson… »
Une jolie chanson un peu triste elle aussi, avec une rupture, comme un éblouissement,  entre couplets rythmés et refrain moitié parlé moitié chanté, une chanson à l’atmosphère lourde comme un jour brûlant où on écoute « les cigales chanter au mois d’août ». Récit d’une autre rupture.

Suite de la balade en chansons…

 « L’été n’a duré qu’un soleil
Le temps de vivre un peu ensemble… »
Dans un coin de Sologne, 1979.

« Tous les trains sont arrivés
Les souvenirs sont restés
Et les rues ensoleillées
Attendront bien une année… »
Quand un homme a du charme, 1979.

« Quand le soleil se couchera
 on rentrera
heureux
on se regardera sans parler
il y a des jours comme ça
quelquefois
pendant l’été ».
C’est ainsi que se termine, en 1980, une longue balade estivale, bucolique à souhait, accompagnée du murmure des chœurs et de l’éclat des guitares électriques, sur un long solo de saxo langoureux. Enfin une chanson qui évoque le bonheur et non l’amour malheureux. Chanson composée par C. Jérôme à laquelle le public préfèrera la face B et Le pont de Courthézon.

Suite de la balade en chansons…


« Sous des lunettes de soleil
La vie n’est jamais pareille…
Juillet août à Tahiti
Sur une plage de Tahiti
Au soleil seulement… »
Juillet août à Tahiti, 1980.

« Tu attrapes un coup de soleil
Un coup de blues c’est pareil »
Le ghetto, 1983.

« Sur une plage de Normandie
Soleil de plomb l’après-midi
Il m’a parlé alors je l’ai suivi »
Mélancolie femme, 1981.

« Tu ne seras jamais malheureux …
Parce que tu as des yeux
A faire pleurer les femmes
Leur donner le soleil
Et les jeter au feu… »
A faire pleurer les femmes, 1982.



En 1982, la face B d’A faire pleurer les femmes s’intitule Le vagabond du soleil. On y parle à une femme qui ne se console pas du départ d’un beau musicien qui, malgré ses promesses et tous les indices d’un amour sincère, s’en est allé. Une chanson anodine au premier abord mais sur une jolie mélodie, avec de belles inflexions vocales, parfois très émouvantes. Pas une histoire d’amour, quelque chose de plus fou que ça, une histoire de promesses impossibles et de liberté d’oiseau… Et surtout, Michèle Torr le dit elle-même dans son autobiographie La Couleur des mots en 2005, un écho, une réponse au titre d’un tube de Christophe, datant de 1975, Petite fille du soleil. Paroles de consolation de celui qui s’en va et tente d’apaiser celle qu’il laisse… Les deux artistes étaient dans la même maison de disques, et leurs paroliers, parfois les mêmes, s’amusaient à faire en sorte que les chansons se répondent. Le vagabond du soleil est signé J. Albertini, G. Mattéoni, F. Thomas et Didier Barbelivien, Petite fille du soleil par Christophe pour la musique et…Didier Barbelivien pour les paroles.


Suite de la balade en chansons…

 « Entrée des artistes
On prend tous les risques
Là où le soleil devient tellement beau… »
Entrée des artistes, 1982.

« Change la vie
Mets des fleurs dans tes ennuis
Du soleil dans ton lundi
Offre-toi le bonheur »
Change la vie, 1983.

« Il se lève avant le soleil
Il croit en Dieu, il croit au Ciel… »
A mon père, 1983.

« Le soleil c’est gratuit c’est pratique
Toutes les filles sont des stars
Rue de la Jamaïque »
Rue de la Jamaïque, 1983.

« Il m’a promis juré
Qu’il ne m’f’rait plus pleurer
Qu’il serait le papa soleil »
Maman, 1983.

« En hiver l’amour est en sommeil
Au soleil c’est alors qu’il se réveille… »
T’es l’homme que j’aime, 1984.

« Chanson napolitaine…
Je rêve d’un amour éternel
Que je vivrais sous ton soleil »,
Chanson napolitaine, 1985.

« Jours de soleil et jours de pluie
Ne comptaient pas dans notre vie
Nous ne connaissions pas l’ennui
Je t’aime encore »,
Je t’aime encore, 1985.

« Elle leur a appris le soleil, la prière avant le sommeil »,
Une mère d’autrefois, 1985.


Suite de la balade en chansons…

« Quand le soleil de novembre
Brûlera mes dentelles
Je serai seule à entendre
Un amour qui m’appelle »
Un amour qui m’appelle, 1985.


 « C’est un joli coin de Provence
Tout inondé de soleil…
Des souvenirs pleins de soleil
Emportent mon cœur loin d’ici… »
Je reviendrai dans mon pays, 1985.

« Dans ma vie
J’ai vu des fleurs pousser en hiver
Et des soleils briller sans lumière… »
Dans ma vie, 1986.

« Moi je l’aime pour un cri un sourire
Une fleur sous le soleil ou la pluie… »
Un mot de toi, 1986.

« On s’aimera comme deux enfants au soleil »
Le ciel s’en va, 1986.

« Une fille de feu
Sur les bandes dessinées
D’avenir et de bleu
D’amour et de soleil… »
Cendrillon rock, 1986.

« Sur ton bateau tu es venu
Dans un soleil d’île lointaine… »
C’est joli la mer, 1987.


«  Drôle de printemps où le soleil m’attend avec la peur d’aimer, la peur de vivre… »
Fleur de mai, 1987,
pour évoquer le printemps 1965 qui a suivi la mort accidentelle de sa mère…

Suite de la balade en chansons…

« On a rêvé
Soleil du bout du monde… »
Carnaval à gogo, 1987.

« Je t’avais rapporté
Des couchers de soleil
Sur fond de Méditerranée »
Je t’avais rapporté, 1988.

« C’est un destin qui va à contre-sens
De soleil en nuages »
Je pense à vous, 1988.

« Où est ton étoile
Toi qui joues avec le soleil à minuit »
Où est ton étoile, 1988.

« Souvenirs d’enfance
D’ici ou d’ailleurs
Sous un autre soleil
Sous une autre chance photo dans mon cœur" 
Le chemin de bohème, 1988.


« Partir un jour…
Avoir la fièvre et la nostalgie
De ces photos
Au soleil »
Partir un jour, 1988.

« Le soleil que tu m’as donné
C’est le soleil de l’amour »,
Argentina, 1989.

« J’attendrai jusqu’au soleil »
Le temps qu’il faudra, 1989.



Après une longue période sans (sans soleil bien sûr, du moins dans les titres de ses chansons), Michèle Torr revient en 1993 Du côté du soleil sur l’album A mi-vie. Et là, on trouve, après une période personnelle tourmentée à plus d’un titre, la belle leçon d’optimisme d’une femme qui, après des « après-midi d’abeille » au cours desquels elle a dû beaucoup travailler –en particulier avec Pierre Grosz pour les paroles, Gérard Daguerre, Francis Lai, et d’autres encore pour les musiques-  d’une femme donc, qui renaît à la vie et nous offre cet album intensément joyeux, tout gorgé de lumière. C’était l’album Vague à l’homme qu’on nous avait annoncé comme celui de la renaissance, mais il était encore bien amer. A mi-vie, c’est « l’amour retrouvé, et l’amitié aussi »…
« Quand on sait ce qu’on sait…
Qu’on a été brûlé
Par différents soleils …
Tout reste à dire
Tout peut revenir
Tout peut se donner
Tout recommencer » chante-t-elle dans la chanson A mi-vie (premier single extrait dès le mois d’avril).
Dans cet album, la Belle Michèle Torr du temps présent évoque aussi tout ce qui, à ce moment de sa vie de femme, la rend heureuse : sa fille qui peu à peu devient adulte (Je serai ton amie), sa Provence (Fanny sur le port et Mon sud), la musique qui console après la peine :
« Je fermerai la porte
J’amadouerai mon chagrin
Jusqu’à ce que le soleil m’apporte
Un nouveau matin »
Dans la maison du blues,
les enfants et la leçon de vie qu’ils lui donnent (J’apprends de vous), l’amour avec L’homme en or (variation rock sur le thème de la recherche du prince charmant), Si je t’aime (une déclaration), Quand on n’a que l’amour (autre hymne, de Brel celui-là) :
« Quand on n’a que l’amour
Pour peupler de merveilles
Et couvrir de soleil
La laideur des faubourgs… »,
mais aussi La prière sévillane (qui parle d’amour maternel)… et le soleil.
Mai qu’apprend-on, du côté du soleil ? Qu’une fois essuyés les pleurs, balayés les doutes et les regrets, il ne faut pas rester caché dans un presque sommeil, il faut trouver l’énergie d’aller se retrouver, de rallumer sa vie
« au soleil de quelqu’un
De quelqu’un ou des autres
Et en allant vers eux
Leur lumière et la nôtre
nous fait briller les yeux ».
Il faut s’émerveiller de danser, et même de tomber avec la pluie… Car c’est cela aussi, la vie, et le bonheur, ça se cultive. C’est un état d’esprit. Celui d’une chanteuse à mi-vie, et le reste du temps… 


Suite de la balade en chansons…

« Dès que le soleil s’est couché
Chaque soir commence la journée… »
La vie la nuit, 1995.

« Comme un coup de soleil
Pour les longues soirées d’hiver… »
La vie tango, 1997.

En 1997, sur le premier album de chansons inédites autoproduit par la chanteuse, Seule, elle déclare être La fille du soleil. Elle y évoque le rôle de l’artiste dans la vie des gens,  qui les invite, la nuit,  à la suivre pour oublier ce(lle) qui les déçoit, pour  leur donner un peu d’espoir, illuminer leurs nuits avec des milliers d’étincelles, peindre des arcs-en-ciel sur leurs murs bien trop gris…Artiste marchande de rêves quelque peu vénéneuse qui nous fait passer à l’orange dans un monde étrange et …de la première à la deuxième partie d’un spectacle, à l’Olympia en 1998, au Casino de Paris en 1999, lors de la tournée Acoustique en 2001 et à nouveau à l’Olympia en 2002 & 2003.


Suite de la balade en chansons…

« Demain matin
Quand le soleil va se lever
Ils seront loin
Et nous croirons avoir rêvé »
Les comédiens, 1999.

« Et ils tournent et ils dansent
Comme des soleils crachés »
Amsterdam, 1999.

« Je vois le soleil
Les arbres qui défilent… »
Sur les routes, 1999.

« Tu es le soleil de ma vie, tu es une île, un paradis »dit en 1999 une jeune grand-mère à sa première petite-fille prénommée Charlotte

« Quand j’attends le soleil
Allongée sur mon lit
Que je quitte la scène
Pour rentrer dans ma vie »
Je ne suis qu’une femme, 2002.

« Un soleil m’appelle
Sous la Croix du Sud
Tout semble immortel
Comme un prélude »
S’en aller, 2002.

En 2003, quand Michèle Torr chante Piaf, elle choisit entre autres une chanson aussi triste que pleine de soleil : Les amants d’un jour :
« Portant le soleil ils ont demandé
D’une voix tranquille un toit pour s’aimer
Au cœur de la ville…
Et quand j’ai fermé la porte sur eux
Il y avait tant de soleil au fond de leurs yeux
Que ça m’a fait mal…
Remplis de soleil on les a couchés
Unis et tranquilles dans un lit creusé
Au creux de la ville…
Mais ils m’ont planté tout au fond du cœur
Un goût de leur soleil et tant de couleurs
Que ça m’a fait mal… »
Et dans La foule :
« Je revois la ville en fête et en délire
Suffoquant sous le soleil et sous la joie… »


En 2005, toujours sur la scène de l’Olympia, après C’est un message :
« Dès l’aube je veux voir le soleil au cœur de l’arc-en-ciel»,
Michèle Torr abandonne La fille du soleil et crée Côté soleil (la couleur des mots). Une chanson pour faire la fête, au terme de quarante ans de carrière. Pour une nuit argentée, pour oublier le temps, mais pas le nom de ceux qu’on aime, pour qu’il n’y ait jamais d’obscurité, pour ranimer les braises dans nos yeux.
Cette chanson donnera lieu à une deuxième version, studio celle-là, plus acoustique, avec une coloration hispanisante grâce aux guitares flamenco, sur l’album La louve, sorti en 2006, disponible en Maisons de la Presse, et aujourd’hui seulement sur le site officiel de la chanteuse. Elle y fait aussi dire à Monsieur Cézanne :
« Sur elle se repose l’air et le partage de l’ombre et du soleil », à propos de la montagne Sainte-Victoire.  


Sur l’album Ces années-là sorti le 3 mars 2008, ainsi que sur la scène de l’Olympia du 10 au 13 avril, Michèle Torr chante :
« C’était plus joli qu’un silence
Qu’un soleil dans la voix…
Tu vois
Cet homme à qui je pense,
C’était toi.
…du soleil dans ma voix
Tu vois
Cet homme à qui je pense
C’est lui. »
dans la chanson C’était toi. D’après vous, toi et lui, qui étaient-ce ? Et dans Son Paradis c’est les autres,  c’est Sœur Emmanuelle elle-même, à qui la chanson est un hommage, qui déclame :
« Fends le cœur de l’homme,
Tu y trouveras le soleil »
Car le soleil, c’est peut-être l’homme aimé, car le soleil, c’est peut-être surtout ce qu’il y a de meilleur en l’être humain.


Sans parler de soleil, Michèle Torr nous livre enfin, en 2012, sur l’album Chanter c’est prier, une chanson pleine de lumière dans laquelle elle rend grâce à la vie,
« la vie,
qui  lui a tant donné,
A mis dans son âme
Le désir et la flamme
Et dans le ciel si haut
Les étoiles et ses héros…
 D’un lever de jour
A la caresse d’un amour…
A mis dans son cœur
Tout le souffle et le feu… »
Toi qui m’as tant donné (Gracias a la vida), 2012.

Le feu qui n’a pas fini de brûler,
et le soleil, qui n’a pas fini de briller…
A la semaine prochaine pour une nouvelle chronique...

© G.D. & E.D.

mardi 8 juillet 2014

Michèle Torr et la fille du boulanger.

La Fille du boulanger :


tel est le titre que nous pourrions donner au touchant témoignage de cette admiratrice. Tout le monde connait La femme du Boulanger, le film français réalisé par Marcel Pagnol, sorti sur les écrans en 1938. Dans un village de Haute-Provence, un boulanger récemment installé découvre un matin que sa jeune femme est partie avec un berger. Il décide de faire la grève du pain tant que sa femme n'est pas revenue. Le village se mobilise pour pouvoir retrouver sa boulangerie… Ici vous lirez l’histoire d’une admiratrice qui a beaucoup donné pour une chanteuse afin d’être à ses côtés, et qui décida un jour de tout quitter pour être au service de la femme plutôt que de l'artiste
...Entre rires et pleurs, entre retrouvailles et séparations, entre naissances et deuils, entre jalousies et solitude…découvrons cette « fille du boulanger » qui nous livre l’histoire de sa rencontre avec Madame Michèle Torr…


La vie d’avant.


Au début, avant que je ne connaisse Michèle, mes chanteurs préférés c’était Sheila et Cloclo. Mes parents étaient boulangers et moi, je travaillais comme aide-cuisinière dans une clinique, en Provence. Un jour, après la mort de Claude François, je me suis inscrite à son fan-club. J’avais vingt ans. J’ai reçu un courrier proposant d’assister à une journée en son hommage, à Paris, pour aller se recueillir à l’église et sur sa tombe, avant un repas et, avec ma mère, je m’y suis rendue. C’est là que j’ai rencontré un jeune homme qui voulait créer un club pour Michèle Torr. C’était Roger Troncy.


 L’admiration.



Michèle, je l’ai découverte en 1979, j’avais dix-neuf ans. J’ai acheté son disque Une petite Française, j’ai beaucoup aimé cette chanson, on peut dire que ça a été un coup de foudre…
Puis, avec un ami, pendant mes vacances, en août, on a suivi Michèle de gala en gala. On dormait même dans la voiture, parfois. Et en 1980, je suis montée la voir à l’Olympia avec des amis. Ensuite, la même année, je suis partie travailler à Paris, et, sur mon temps libre, j’allais la voir dans les émissions de radio ou de télé, comme Stop ou encore, ou Midi Première, de Danièle Gilbert.
Un jour j’ai reçu une carte postale de Seine-Port : c’était Roger, qui m’a bientôt téléphoné et donné rendez-vous pour m’annoncer qu’il avait vu Jean Vidal (le mari de Michèle) et que celui-ci était d’accord pour le fan-club, où je me suis inscrite dès sa création. J’étais l’adhérente numéro deux.
En 1981, j’ai recommencé les galas, je vendais les programmes avec Roger.
Et j’ai aussi assisté aux anniversaires de Michèle organisés par le fan-club.


Les premières années (de gala en gala).


Un jour, avant que je travaille pour Michèle, alors que je suivais la tournée en auto-stop, nous étions à Gap et voulions nous rendre à Cadenet. C’est là que Daniel Mecca (alors guitariste et choriste de Michèle, aujourd’hui son régisseur) s’est arrêté et nous a pris dans sa voiture. En route, il nous a payé un coup à boire dans un bar (il ne se le rappelle même plus) et on est arrivés à Cadenet. Plus tard j'ai vu Julie Piétri qui chantait avec la Bande à Basile en première partie des galas. On est aussi passés par Marseille. Ensuite, j'ai aussi suivi la tournée Radio Monté Carlo. Michèle ne voulait pas qu’on assiste à ses répétitions mais moi, elle acceptait parfois que je sois là avec Roger.


La rencontre.


Lors d’un gala à La Seyne sur Mer, Roger me dit que l’employée de Michèle est partie et qu’elle cherche quelqu’un alors j’ai demandé à Roger si je pouvais voir Michèle et il m’a amenée dans sa loge. Nous avons parlé et je lui ai dit que je voulais travailler pour elle. Elle m’a demandé ce que je savais faire. Je lui ai dit que je savais faire le petit salé aux lentilles, qui est devenu l’un de ses plats préférés. C’était en septembre 1981. Ensuite, je lui envoie une lettre pour confirmer ma proposition et un jour Roger m’appelle : Michèle a reçu la lettre, elle est à côté de lui ; il me la passe, elle me demande si je veux toujours travailler pour elle… Je lui dis oui, mais Vidal est réticent, il dit que je suis juste une fan et de laisser
tomber… Michèle lui dit :
« J’espère que je ne vais pas lui faire un tour de chant ! »
C’est alors que Roger dit qu’il me connaît, et grâce à lui, Michèle décide de me prendre à l’essai pour une semaine, en décembre, avant les fêtes de Noël.
Alors j’ai pris une semaine de vacances à la clinique, et je suis montée dans un train. Vidal est venu me chercher à la gare. Il faisait nuit, il faisait froid. J’ai été impressionnée quand je suis arrivée à la Maison Blanche. Je n’étais pas rassurée à cause des bergers allemands, Vidal m’a dit qu’ils n’étaient pas méchants. On est entrés par la cuisine, il y avait Michèle et sa fille, elle a fait les présentations, après il y a eu le repas, elle m’a montré ma chambre… Le lendemain à 7 heures, au petit-déjeuner elle m’a indiqué ce qu’il fallait faire, le rangement de la maison ; dans cette région que je ne connaissais pas, elle m’a conduite à l’école de sa fille, m’a montré les magasins pour les courses.
A la fin de la semaine elle m’a demandé :
« Est-ce que ça t’a plu ?
- Et toi ?
- Oui, lui ai-je dit ; et toi ?
- Oui. Tu veux revenir ?
- Oui ».
Et c’est comme cela que je suis entrée au service de Michèle. Après, je suis rentrée chez moi, il fallait que je démissionne de la clinique. Après le mois de préavis, le 2 février 1982, je reviens à Seine-Port avec le permis de conduire en poche. Le lendemain je reprends le travail, comme la première semaine, et pour de nombreuses années…

Le travail.


Je suis devenue son employée de maison, la cuisinière et la nounou des enfants. Je m’occupais aussi des chiens et du jardin. Je faisais aussi les courses. J’ai fait cela de maison en maison. J’emmenais sa fille au catéchisme, chez les copines, j’allais la chercher à l’école, la faisais goûter… Il y a eu aussi sa première communion : il faisait beau, on a mis les tables dehors, à côté de la piscine… Romain était en pension à l’époque. Puis fin août je revenais de mes vacances, je préparais la maison, je ramassais les feuilles mortes, m’occupais des chiens pour que, quand elle revenait à son tour à la fin du mois, pour la rentrée, elle trouve sa maison propre… Michèle est maniaque, elle aime le travail bien fait.
Dans son livre La couleur des mots, Michèle a écrit :
« Je ne pense pas que les enfants aient trop souffert de cette époque vertigineuse, ils me suivaient le temps des vacances, la nounou toujours près d’eux… »
J’ai dit à Michèle que je ne savais pas de qui elle parlait. Alors elle m’a dit :
« Tu ne devines pas ? »
Et elle m’a dit que c’était moi alors ça m’a fait plaisir…
Quand j'étais à Paris en 1985 /86, je l’accompagnais aussi aux émissions de télé, à Champs-Elysées… J’étais parfois invitée au restaurant, à l’Olympia… En 1987 je suis partie chez moi parce qu’il pleuvait toujours à Paris. J’en avais marre de la région parisienne.
Et quand Michèle est venue habiter à Mérindol en 1988, je suis revenue à son service.
Et là, comme à Seine-Port, j’arrosais les fleurs, je faisais les courses avec elle, je l’amenais au supermarché, parfois je l'accompagnais à l’aéroport ou à la gare TGV. Je me suis occupée de la maison, des chiens, des repas, des courses, et toujours de sa fille. Je l’accompagnais quelquefois à l’école à Aix le lundi, quand ce n’était pas Vidal ou Michèle. Je l’amenais voir ses parents, ou dans des galas. Un jour il y a eu un gala à Nîmes dans les arènes, c’était pour une émission de télé, avec Michel Drucker.
Je me suis occupée d’elle jusqu’à ses 17 ans ; après elle a passé son permis. Parfois quand Michèle partait en gala je lui demandais si je pouvais dormir chez elle ; elle me disait oui.
Il y a eu le bel article que Jean-Raymond a fait sur moi, le « tableau d’honneur », pour un journal du Club…
Pour l’illustrer, il a choisi la photo de Michèle et moi à l’Olympia, en 1998, avec ma tenue noire… Je l’ai en couleurs, je l’ai fait faire par un photographe, un beau tableau que j’ai mis dans mon bureau, en souvenir de ces années passées à son service...

Les maisons de Michèle (de maison en maison).

J’ai donc connu toutes les maisons de Michèle. La Maison Blanche à Seine-Port…A un moment je ne voulais plus y dormir et comme il y avait la maison de gardien, elle me l’a prêtée mais il y avait des souris, alors ça me plaisait pas et je n’ai pas voulu y rester. J’ai préféré retourner dans la Maison Blanche. Michèle m’a aussi emmenée à Courthézon pendant les vacances en 1983 ou 84,  on mangeait des sardines au bord de la piscine… 



Dans le Luberon, à Mérindol, c’était un relais de facteur qu’ils avaient acheté parce que Vidal adorait chasser avec Jean Albertini, le parolier de Michèle avec qui il était très ami. Elle me plaisait beaucoup, cette maison en pierres entourée de plein d’oliviers, d’où on voyait la Durance. Ils ont tout refait et je les ai aidés à déménager de Seine-Port à Mérindol. Un jour j’ai transporté leurs deux labradors…Dans la voiture, ils n’ont pas bougé et c’est moi qui les ai amenés à Mérindol. En 1989 quand j’ai entendu dire qu’ils venaient habiter Mérindol, j'ai écrit une lettre à Michèle comme quoi je voulais  revenir à leur service et j’ai loué un petit studio, que je suis allée visiter avec Romain, pas très loin de chez eux. Le propriétaire était un ami de Vidal, ils jouaient aux boules ensemble.  

 

En 1990,   Michèle  et Vidal  ont pris une maison à Saint-Rémy-de- Provence. Je m’en suis occupée dans les années 90/92. C’était une grande maison, qui avait besoin de travaux. Michèle  rêvait d’y voir les enfants, les petits-enfants… Jamais je ne dormais chez moi, parfois à Mérindol, parfois à Saint-Rémy… Michèle un jour m'a demandé  de garder sa maison de Mérindol mais,  comme je  ne pouvais pas le faire seule, ma mère est venue la garder avec moi pendant un an;  ensuite elle est repartie chez elle. Après quand elle a épousé Jean-Pierre, Michèle est revenue vivre à Mérindol dans la maison en pierres, en haut, puis dans la nouvelle, en bas, à partir de 1999…
J’ai aussi travaillé pour Jean-Pierre, à Saint-Tropez.
Après que son père est décédé,  Michèle m’a demandé d’aller passer une semaine à Courthézon pour nettoyer sa maison ;  j’étais avec Roger qui était venu avec moi. Juste quatre  jours après il est parti et moi je suis restée pour travailler…Ensuite, Michèle l’a vendue.


Après, elle et Jean-Pierre se sont installés à Aix. Dans la grande maison puis dans la nouvelle…


 Les rencontres (artistes, journalistes, Sœur Emmanuelle, famille et amis).

Dans ces différentes maisons sont venus beaucoup de journalistes, des caméras...
 Un jour un journaliste est venu, et tandis que je faisais la vaisselle, il essayait de me troubler. Michèle m’a dit :
« Regarde, le journaliste te fait signe», et après il est entré dans la cuisine et il a dit :
 « Elle est bien concentrée dans son travail » 
Moi quand je travaillais, je travaillais, je me moquais des vedettes.  Je faisais ce que Michèle me disait de faire, je ne faisais pas la groupie, la fan, je ne voulais pas être une fan, quand il y avait du monde c’était « travail travail », et  je faisais ce que Michèle me disait de faire, c’est tout.
Une autre fois il y a des journalistes qui sont venus filmer, Charlotte et Michèle faisaient un gâteau au chocolat,  ou plutôt elles faisaient croire qu’elles faisaient un gâteau au chocolat,  pour des journaux…
J’ai souvent été là quand Michèle accueillait sa famille, ses amis, aussi bien à Seine-Port qu’à Mérindol ou même à Aix.
Une fois pour Noël à Seine-Port ils avaient reçu la famille de Vidal, fait un repas. Vidal avait préparé un couscous, j’avais mis les enfants d’un côté et de l’autre les adultes dans le salon salle à manger, et chaque fois qu’elle me faisait un signe avec les yeux, ça voulait dire « Tu peux débarrasser ».
Des artistes, j’en ai connu, mais finalement, elle n’en recevait pas beaucoup quand j’étais là.
Jean Albertini, son parolier,  qui était très ami avec Vidal, venait donc aussi, de temps en temps.
Un jour elle a reçu Sœur Emmanuelle, elle m’a présentée, elle a dit :
«Voilà,  je vous présente Chantal »
J’avais un petit tablier en dentelle, une coiffe à mettre sur la tête, il fallait toujours que je sois bien habillée pour recevoir du monde.

Après il y a eu Herbert Léonard, elle lui a dit simplement : « je te présente Chantal ». D’autres fois, à Seine-Port puis à Mérindol, j’ai vu C. Jérôme, lui, il était sympa, très souriant, gentil comme tout…
Ses petits-enfants Charlotte et Samuel, je les ai connus tout bébés quand Michèle les recevait pendant les vacances. Quand ils venaient, ils goûtaient, ils faisaient du vélo, ils jouaient… Raphaëlle, quand je l’ai connue, c’était un bébé,  maintenant c’est fini,  je ne la connais pas, je ne l’ai plus revue...
Ses petits-enfants sont proches de leur mamie, Samuel l’adore, Charlotte et les autres aussi.


Moments privilégiés.

Michèle n’aime pas beaucoup parler dans la vie de tous les jours mais parfois je l’entendais chanter, à Seine-Port, à Mérindol…Si elle aime recevoir du monde, en particulier sa famille, elle aime bien aussi s’isoler pour lire par exemple…

Michèle, ce qu’elle aimait c’est quand le soir je lui apportais sa tisane au miel au lit,  à Seine Port, puis à Mérindol.
Je garde en souvenir plein de bons moments où elle était gentille avec moi… Il lui arrivait de m’inviter au restaurant ou simplement, on passait des moments paisibles ensemble quand je gardais la maison avec elle. Par exemple, un jour, alors que Charlotte était petite, elle m’a invitée à manger avec Jean-Pierre à la pizzéria de Mérindol.
Et à Noël, au jour de l’an ou bien pour mon anniversaire, elle me faisait des cadeaux  et je lui en offrais à mon tour, pour le sien ou pour Noël, ce qui lui faisait plaisir.
A Paris, j’allais à ses anniversaires organisés par le fan-club, du temps de Roger; elle faisait le tour des tables et quand elle me voyait, elle avait toujours un sourire chaleureux pour moi.
Encore aujourd’hui, quand elle m’envoie des invitations, je monte à Paris, comme pour l’Olympia, en 2011 : il y avait beaucoup de monde mais elle a été gentille, m’a fait la bise et a pris le temps de me montrer qu’elle était contente que je sois là.


  L’anniversaire.

Un jour elle m’a fait une surprise ; alors que l’on mettait la table, et je lui ai demandé s’il y avait quelqu’un qui venait manger. D’abord elle ne m’a pas répondu  puis elle m’a dit oui. Ensuite, elle a cuisiné elle-même  puis elle a ouvert une bouteille de Champagne et elle m’a dit :
« Bon anniversaire ! »
Il y avait sa secrétaire et Jean-Pierre  et quand elle m’a demandé :
« Tu veux finir le repas au Champagne ? »
j’ai dit oui.
Après le repas j’ai continué de travailler mais il ne faut pas croire que j’étais saoule, non, je n’étais pas saoule…
C’était à Mérindol, on était dans l’autre maison, pas celle en pierres.

Il y en a qui m’ont dit que je mélangeais tout, l’amitié, la patronne…pour moi, Michèle, c’est une amie et pour elle, je ne serais qu’une femme de ménage…
Mais un jour elle m’a dit :
« Il n’y a pas de honte à être une femme de ménage », et une autre fois :
« Tu es mon amie et tu resteras toujours mon amie ».
Maintenant je ne la suis plus mais je suis toujours en contact avec elle et je sais que je garderai un bon souvenir de ces 35 années passées à son service.


Vous l’aurez compris, Chantal aura été pendant 35 ans un témoin privilégié de la vie de Michèle Torr. Nous espérons avoir trouvé avec elle le « juste milieu » pour parler de la femme et de l’artiste en les respectant, elle et sa famille. Pour Chantal, la peur de trahir aura été présente tout le long de nos entretiens. Ayant recueilli l’intégralité de son témoignage, nous regrettons qu’elle préfère ne pas le livrer en entier, car il était beau et émouvant, mais comprenons et respectons son choix.

L'admirateur