mardi 12 juin 2018

Michèle Torr, l’envers du chemin.


Tout a commencé comme ça, par une déclaration faite devant les lecteurs du Progrès, en réponse à une question de Suzanne Mougenot, d’Andrézieux-Bouthéon :
« Pensez-vous réenregistrer un album avec vos premiers succès ? », Michèle Torr déclarait :
« Vous lisez dans mes pensées ! Je vais vous raconter quelque chose. Je ne vais pas beaucoup sur les réseaux sociaux mais je regarde quand même un peu ce qui se dit de moi… Il y a quelque temps, je suis tombée sur un site internet qui m’est dédié, qui s’appelle L’Admirateur, qui est tenu par deux messieurs. Grâce à ce site, j’ai redécouvert des chansons que j’avais un peu oubliées. Il y a eu les tubes et puis, à côté, il y a eu de formidables autres chansons, très belles mais que l’on a moins entendues et qui sont un peu tombées dans l’oubli.
Tout cela m’a en effet donné envie de réenregistrer ces chansons qui étaient un peu passées à la trappe. Un coffret spécial est donc en projet, un coffret qui contiendra, entre autres, toutes les chansons que l’on trouvait à l’époque sur les Face B des 45 tours. ».
(Propos recueillis par Romain Gavidia et Cerise Rochet


Et puis tout récemment, dans une interview au Dauphiné Libéré, elle déclarait, en réponse à la question:
«Allez-vous sortir un nouvel album ?
- Oui, en juillet j’enregistrerai un disque avec Guy Matteoni, sur une idée de mon fan-club. Mes fans me font des listes de belles chansons que j’ai complètement oubliées. Nous allons les réadapter musicalement. En août, je repartirai en tournée avec mes chansons et des reprises des chanteurs qui m’ont donné envie de faire ce métier comme Brel, Piaf ou Bruno Coquatrix ».
(Propos recueillis par Marie-Félicia Alibert, publiés le 12/05/2018,
https://c.ledauphine.com/vaucluse/2018/05/12/michele-torr-deux-eurovision)


Et encore, le 12 juin, lors d’une interview sur Limpact TV  où elle a surtout évoqué son action au profit de l’association de son fils Romain Vidal, SEP du  Pays d’Aix (www.sep-paysdaix.fr), pour la recherche sur la sclérose en plaque, voici ce qu’a déclaré Michèle Torr à propos de ses projets:
- En parallèle vous continuez votre métier, vous êtes chanteuse. Quelles sont les prochaines échéances pour vous ? Avez-vous prévu de remonter sur scène ?
MT : Oui. Pas avant le mois d’août. Je serai en juillet en studio avec Guy Mattéoni pour, j’allais dire faire plaisir aux personnes du club… Me faire plaisir d’abord. Ils me réclament des chansons qui sont passées un petit peu à côté de tubes. Vous parliez d’Emmène-moi danser ce soir, J’en appelle à la tendresse ou Je m’appelle Michèle mais à l’époque il y avait quatre chansons sur le disque et donc il y en a qui sont passées à la trappe, un peu, qui sont de belles chansons donc on me les réclame et je vais… Guy Mattéoni va travailler là-dessus …
- Et après ce passage en studio, vous avez prévu des dates pour vous produire ?
MT : Oui, à partir du mois d’août, et puis cet hiver une tournée des théâtres, de petits théâtres…


Le projet, qui était « resté dans un coin de sa tête» mais semblait, à l’image de ces chansons qu’elle avait prétendu vouloir réenregistrer, voué à l’oubli, paraît donc être à nouveau d’actualité. Ce ne sera peut-être pas un coffret, ce ne seront peut-être pas que des « faces B », mais aussi des chansons méconnues parues sur les nombreux albums qu’elle a enregistrés tout au long de sa carrière, et peut-être même que ce projet n’aboutira finalement pas.
L’avenir nous le dira. 


Mais moi, les « faces B » des premiers quarante-cinq tours que j’ai achetés, je les aimais bien, et ce sont en quelque sorte mes « madeleines de Proust » secrètes, quand, las d’entendre des dizaines de fois Une petite Française, J’aime, Je m’appelle Michèle, Il viendra ou Une vague bleue, je tournais le disque pour écouter Le mal de Mai, Couleurs, Mister Mélody, Pour vivre heureux ou La louve… une dizaine de fois.
Avant de retourner le disque.
Au grand dam de mes parents qui n’en pouvait plus d’entendre du matin au soir et parfois un peu entre le soir et le matin…Michèle Torr.
Après, il y a eu Chanteuse, Au nord de la ville, La déchirance, Océan, Le pont de Courthézon, Adieu Lennon, Lettre ouverte, Le vagabond du soleil… qui ont subi peu ou prou le même sort.
Bon, en fait, on se rend compte que certaines de ces chansons n’ont pas été tout à fait oubliées, que certaines ont été plus ou moins connues du grand public et ont même un petit peu « surfé sur les ondes ». Ainsi Le pont de Courthézon qui a fait un « demi-tube » et que Michèle chante encore souvent sur scène, ou Lettre ouverte, que Michel Drucker aimait bien et qu’elle a chantée à l’Olympia en 1982. Avant A mon père, qui fut le tube que tout le monde connaît et qui colle à la voix de son interprète, presque autant que les Emmène-moi danser ce soir, Je m’appelle Michèle, Discomotion ou J’en appelle à la tendresse. Et La louve, elle l’a chantée à l’Olympia, en 2005, car, disait-elle à l’époque, c’était une chanson qu’elle n’avait jamais chantée sur scène, mais c’était l’une de celles que le public lui réclamait le plus souvent. C’est donc bien que Toutes les chansons ont une histoire… même celles qui n’ont fait l’objet que d’une face B et que chacune, un peu, beaucoup… participe, beaucoup ou un peu, petit si petit, à l’Histoire de la musique populaire.
Et l’on se rend compte, avec ces mots-là, que l’on explore déjà quelques méandres du répertoire de Michèle Torr.


Janvier 1964. Sortie du premier quarante-cinq tours de Michèle Torr et déjà c’est une chanson de la face B de cet extended play 4 titres que l’histoire de la chanson retiendra, car ce n’est pas le titre phare de la face A, Dans ma rue, qui sera le plus mis en avant, mais le second de la face B, C’est dur d’avoir seize ans, adaptation et traduction littérale de It hurts to be sixteen, qui sera considéré par tous et surtout par elle-même comme la vraie première chanson de Michèle Torr.


Au verso il y avait écrit :
« Elle s’appelle Michèle Torr. Née en Camargue le 7 avril 1947, elle se trouve en plein signe du bélier.
Elle a participé à l’âge de 6 ans à son 1° concours de chant.
Bien qu’elle soit très peu bavarde, nous sommes en mesure de vous dire qu’elle aime le jazz, qu’elle adore Brassens, et qu’elle dessine avec talent les visages de ses amis.
Quant à sa voix, c’est simple : écoutez-la, tout simplement… »
« Un demi-succès c’est vrai », vendu à cinq mille exemplaires environ, ce qui représenterait l’équivalent de la population de l’époque du village de Courthézon. Ce qui permettra tout de même à la jeune chanteuse de s’estimer satisfaite de ces premières ventes :
« Pour être honnête, le succès ne fut pas foudroyant : je vendis à peine cinq mille exemplaires. Mais cela me paraissait énorme. Rendez-vous compte : cinq mille, c’était exactement le nombre d’habitants de Courthézon. Un exemplaire par habitant du village, c’était plus qu’un triomphe, un véritable plébiscite.»
Michèle Torr, La couleur des mots, Jacques-Marie Laffont Editeur, 2005.


Bon anniversaire (face A) et Quand je sors avec toi (face B) complètent ce premier opus.
Mais l’histoire de C’est dur d’avoir seize ans ne s’arrêtera pas là puisque Michèle, pour fêter ses quarante ans, a déjà réenregistré ce titre sur son album de 1987, I Remember You. Pourquoi un tel choix ? N’est-ce pas que, à quarante ans,  quand on regarde en arrière, alors que les plus belles années de gloire  et les plus belles années d’amour sont peut-être passées, on les trouve amusantes, ces plaintes d’une toute jeune fille, à propos de tenues vestimentaires, de talons plats ou de talons aiguilles, de flirts  et de danses, alors on se peint un sourire en lèvres rouges sur la pochette et l’on rechante cela, à quarante ans:
« C'est dur d'avoir 16 ans
C'est dur d'avoir 16 ans
On est trop jeune ou trop vieux
Et l'on ne fait pas ce qu'on veut
On sait bien qu'les parents
Nous donnent de très bons conseils
Mais les copains disent pas pareil
Et l'on est hésitant
C'est dur d'avoir 16 ans
On met des souliers plats
Mais quand on voit toutes les filles
Avec des talons aiguilles
On n'ose plus faire un pas
Et si l'on vient nous inviter
On ne sait plus sur quel pied danser
Alors on ne danse pas
C'est dur car on aime ça
Pour être bien élevée
On ne se laisse pas embrasser
Par le garçon qui nous plaît
Mais un soir par dépit
On flirte avec n'importe qui
C'est dur d'avoir 16 ans
Les jeunes savent pas nous parler
Les autres faut s'en méfier
C'est dur d'avoir 16 ans
Mais si cet âge nous ennuie
Il y a une chose qui nous ravit
Inévitablement un jour on a 20 ans
Un jour on a 20 ans
On a 20 ans
On a 20 ans... »
Juste pour rire…
A quarante ans, car, n’en déplaise à Rimbaud, on n’est pas plus sérieux qu’on ne l’est à  dix-sept ans, ni plus tard encore, puisque Michèle a continué de chanter cela jusqu’à ces années-ci.


Alors, cette tendre bluette trouverait-elle une place dans un disque de reprises de chansons méconnues? Pourquoi pas, puisque c’est bel et bien une face B, en même temps qu’elle est la première chanson « officielle » de Michèle Torr. Mais elle a déjà été réenregistrée…


Avril 1964, « deuxième série », Dans mes bras oublie ta peine, chouchou de Salut les Copains sur Europe numéro 1, propose en face B Maintenant c’est trop tard que Michèle a déjà inclus dans un de ses medleys, celui de l’Olympia de 2005, ainsi que Je me demande.
« Maintenant c’est trop tard
Pour dire que tu m’aimes
Maintenant c’est trop tard
Quelqu’un l’a déjà fait
Pour toi c’est trop tard
C’est l’autre que j’aime
Et tu ne l’as pas volé… ».


Encore des histoires de baisers dans les coins :
 (« L’autre garçon savait s’y prendre, il m’embrassait dans les coins… »),
et de tenues vestimentaires :
« Je me demande ce qu’il faut faire
Pour le charmer et pour lui plaire… ».


 Novembre 1964, avec S’il m’aime et surtout Viens me le dire à l’oreille en face A, Moi, je serai là …
« …quand tu reviendras
Car je t’attendrai
Le temps qu’il faudra… »,
et Va donc le lui dire, cosignée par… Claude Carrère, en face B :
« Si tu l’aimes
Va donc le lui dire
Ne le laisse pas
Loin de toi partir
Si tu l’aimes
Surtout débrouille-toi
Pour qu’il le voie ».


La face B de la « quatrième série » est plus intéressante car après On se quitte et Hey hey, première adaptation cosignée par Michèle Torr en face A, on y trouve deux reprises des BeatlesToi l’orgueilleux (Love of the loved ») :
« Toi l’orgueilleux
Si tu voulais ne plus tricher
Tu le vivrais enfin ce jour
Que tu attends malgré tout… »,
et Et je l’aime(And I love her).
« Je lui donne tout mon amour
Ma vie entière
Mais il me donne en retour
Toute la terre
Et je l’aime… ».
Un gage de qualité.
Pour ce qui est de la face 2 de la cinquième série, on y entend Moi, je rêve d’une plage (« …d’un soleil qui m’aiderait à t’oublier ») et Nous sommes faits l’un pour l’autre, signée Pétula Clark que Michèle retrouvera lors de la tournée Age Tendre Rendez-vous avec les stars, en 2014, et encore Claude Carrère.


« Si tu es trop difficile, il se pourrait bien
Si ça continue, qu'il ne t'arrive rien
Si tu dis non, toujours non, non, non à tous les garçons!
Celui-ci est bien trop beau pour être malin.
Celui-là n'est pas idiot, il est vilain
Et tu dis non, toujours non, non, non à tous les garçons!
Si tu es trop difficile, il se pourrait bien
Si ça continue, qu'il ne t'arrive rien
Si tu dis non, toujours non, non, non à tous les garçons!
Celui-ci t'aurait bien plu, tu n'en veux pas
Car il est encore plus fauché que toi
Et tu dis non, toujours non, non, non à tous les garçons!
Non à celui qui mesure deux mètres de long!
Non à celui qui t'arrive à peine au menton!
Non sans raison mais non, non, toujours non!
Non, non à tous les garçons!
Sois pas si difficile, regarde-toi!
Sois pas si difficile, fais comme moi!
Moi je dis oui, toujours oui, oui, oui à tous les garçons ».
Est-ce parce qu’elle avait chanté des choses comme:
« Chaque fois que je le vois passer
Dans ma rue dans ma rue
J’ai envie d’aller le retrouver
Dans ma rue dans ma rue… » ou :
« Si tu penses à lui tous les jours
Va vite en courant lui dire ton amour… »,
que Serge Gainsbourg lui a écrit cette chanson-là ? La chanson de la fille qui n’a pas froid aux yeux, la chanson de la fille qui ose, la forte tête qui tient tête aux garçons et n’a pas peur de les aimer. Ou de les affronter. L’effrontée. La fille facile ou pas facile.


Non à tous les garçons est la première chanson de la face B de La grande chanson et celle-ci aussi a une importance. Car elle inscrit Michèle dans la liste des chanteuses privilégiées qui ont inspiré le grand Gainsbourg. Car elle aussi a connu une histoire un peu particulière : fin 1965, elle est sortie en Italie, en face A d’un quarante-cinq tours deux titres intitulé littéralement Sempre et solo no, avec Quella canzone (La grande chanson) en face B. Inversion des rôles.


 Car, enfin, pour son spectacle de l’Olympia 2011, Avant d’être chanteuse, Michèle a choisi de reprendre cette chanson, et elle a entonné, à la surprise générale, sur un rythme teinté de reggae :
« Si tu es trop difficile, il se pourrait bien
Si ça continue, qu'il ne t'arrive rien… »,
et comme c’était bien !


A la suite de Non à tous les garçons on trouve sur la « sixième série » une autre très jolie chanson, avec la voix d’une jeune fille de dix-huit ans s’adressant à sa mère pour lui demander de la laisser s’émanciper un peu, qu’elle lui lâche la bride pour accéder à un peu d’autonomie et d’indépendance. Qu’elle la laisse grandir. Car les parents ne voient pas le temps passer et considèrent toujours leurs enfants comme petits,
« As-tu quelquefois pensé que j’ai dix-huit ans
Que j’ai dix-huit ans
Et que tu me traites encore
Comme une enfant
Comme une enfant
Je sais vous êtes très gentils
Vous ne me souhaitez pas de mal
Mais si je veux choisir ma vie
Il n’y a rien de plus normal… »,
qui à leur tour feront des petits…
« Allons ma mère je sais que l’on ne voit pas  passer le temps
Passer le temps
Mais bientôt tu t’occuperas de mes enfants
De mes enfants
Et ma fille me dira avant longtemps
Avant longtemps
As-tu quelquefois pensé que j’ai dix-huit ans
Que j’ai dix-huit ans… »,
As-tu quelquefois pensé.
Ce disque contient aussi Tout doucement, reprise d’un  titre de… Phil Spector. Pas mal !


En mars 1966, la chanson sélectionnée pour représenter le Luxembourg au Grand prix Eurovision 1966 a pour titre Ce soir je t’attendais. Ce que l’on sait moins, c’est que les trois autres chansons du disque (Notre amour n’est pas mort, J’ai brûlé ta lettre et Je t’aime tant) ont fait partie des sélections pour représenter… la France à ce même concours. Toutes trois sont arrivées en finale des sélections internes, de même que Un enfant viendra l’année précédente.


« Un enfant viendra
En sautant de joie
Pour crier au monde
Le soleil est là
Un enfant viendra
Des joies plein les bras
Pour l’amour du monde
Notre amour à toi et moi… ».
Cette chanson, de même que Tout le bonheur de la terre, n’est pas sortie en quarante-cinq tours mais sur le trente-trois tours Ce soir je t’attendais, en juin 1966.
Tandis que l’on a réentendu un extrait de Je t’aime tant pendant quelques mois, dans les années 2000, à l’occasion de la diffusion d’un spot télé pour un produit que l’on ne citera pas :
« Je t’aime je t’aime je t’aime
Je t’aime je t’aime je t’aime tant
Tant qu’au fond de moi une chanson chante rengaine
Tant… »,
la face B des versions étrangères de Ce soir je t’attendais sera systématiquement une adaptation de J’ai brûlé ta lettre : Ich habe genug en allemand, Brucero le tue parole en italien, Queme tu carta en espagnol et I love that man en anglais. 


C’est donc celle-ci qui est davantage restée dans les mémoires :
« Dis-moi pourquoi tu me mentais
Dis-moi pourquoi je te croyais
Dis-moi pourquoi dis-moi pourquoi dis-moi
Les mêmes mots servaient deux fois
Servaient pour elle et puis pour moi
Ces mêmes mots que je croyais à moi
Et j’ai brûlé brûlé ta lettre
Où tu disais que tu m’aimais
Oui j’ai brûlé brûlé ta lettre
Et j’ai pleuré
Comme ils mentaient ces mots d’amour
Et tes « Je t’aime » et tes « Toujours »
Comme ils mentaient quand tu parlais d’amour
Les miens étaient plus maladroits
Pourtant les miens ne mentaient pas
Quand je disais : « Je t’aimerai toujours »
Tu peux brûler brûler ma lettre
Car maintenant tout est fini… ».
Joli. Triste, mais joli.


Parmi les chansons des faces B des quatre séries suivantes : Dom dom, Rien n’y fera, Toute la plage danse,  Ça c’est pour moi (chantée par une drôle de Miss Catastrophe qui cumule les maladresses, les bévues et les impairs), Doucement, simplement, tendrement,  J’aime (de la comédie musicale Mame), Prends et donne et L’homme à la guitare d’or, on pourra encore être séduit par l’incroyable énergie de l’interprète de Dom dom :
« Le soleil ne brille pas ici
Dom dom, dom dom
Et la plage est vide aujourd'hui
Dom dom, dom dom
Quand j'ai vu ton train s'en aller
J'ai bien cru que j'allais pleurer
Reviens vite, je t'en supplie
Je m'ennuie de toi
Nous n'aurions pas dû nous quitter
Dom dom, dom dom
Maintenant je suis seule ici
Dom dom, dom dom
Quand j'ai vu ton train s'en aller
J'ai bien cru que j'allais pleurer
Reviens vite, je t'en supplie
Je m'ennuie de toi…


Quand j'ai vu ton train s'en aller
J'ai bien cru que j'allais pleurer
Reviens vite, je t'en supplie
Je m'ennuie de toi
Mais là-bas au bout de la plage
Dom dom, dom dom
Je te vois, tu reviens vers moi
Dom dom, dom dom
Tous les trains peuvent s'en aller
Puisque je suis dans tes bras
La plage est remplie de joie
Et le soleil brille
Tous les trains peuvent s'en aller
Puisque je suis dans tes bras
La plage est remplie de joie
Et le soleil brille
Prends-moi dans tes bras… ».


Ou bien par la si jolie candeur de la jeunesse quand la chanteuse entonne : 
«  Doucement, doucement,
Il avait pris ma main
Simplement, simplement,
Il m'a dit : « Tu viens ? »
Je lui ai souri
Je lui ai dit oui
Tendrement, tendrement,
Il m'avait embrassée
Et le temps, et le temps trop vite a passé
On a chanté en chœur
Et l'on a dansé
Ça faisait trop longtemps
Vraiment trop longtemps
Que je ne m'étais pas amusée autant
Amusée autant, amusée autant
On a couru tous deux
Et l'on s'est baignés
Il m'a jeté de l'eau, riant aux éclats
En se moquant de moi qui n'aimais pas ça
Qui n'aimais pas ça, qui n'aimais pas ça
Gentiment, gentiment,
Il s'est fait pardonner
Très longtemps, très longtemps,
On s'est promenés
Et quand il m'a dit de venir chez lui
Simplement, simplement,
Je n'ai pas résisté
Et le temps, et le temps trop vite a passé
Il débordait de joie,
Répétait cent fois
Qu'il n'aimerait jamais une autre que moi
Une autre que moi, une autre que moi
En écoutant ces mots qui chantaient l'amour
J'avais envie d'aimer, d'être aimée toujours
Nous étions encore là au lever du jour
Au lever du jour, du jour
Mais lorsqu'il m'a quittée,
J'ai longtemps pleuré
Et cet amour d'un jour, cet amour d'enfant
Qui s'envolait au vent
J'y pense souvent
Pense souvent, j'y pense souvent
Mais depuis ce jour-là, je sais que l'amour
Effacera tout ça quand viendra mon tour
Car celui qui viendra m'aimera toujours
M'aimera toujours, m'aimera toujours
Oui, depuis ce jour-là, je sais que l'amour
Effacera tout ça quand viendra mon tour… ». 


Sans oublier le swing sympathique de Toute la plage danse :
« Rappelle-toi cet air vieillot
Que l'on jouait ensemble sur ton piano
Il est sorti de l'anonymat
C'est un succès, je n'entends que ça
Et
Toute la plage danse
Des soirées entières
Toute la plage danse
Sur notre air
Il n'y a pas un seul jour
Où je ne me souvienne de toi, mon amour
Et quand bien même j'en aurais envie
Comment veux-tu que je t'oublie ?
Car
Toute la plage danse
Des soirées entières
Toute la plage danse
Sur notre air
Ici, je me suis fait des amis
Pourtant je suis la seule qui s'ennuie
Alors, prends l'avion ou prends le train
Tu seras vite dans le bain
Car
Toute la plage danse
Des soirées entières
Toute la plage danse
Sur notre air… ».
Sans oublier enfin l’émotion qui se dégage de L’homme à la guitare d’or, quand la chanteuse se fait conteuse, pour évoquer le destin tragique d’un musicien qui a perdu sa main dans un accident et qui, par désespoir, s’est laissé mourir…
Mais, à l’exception peut-être de la dernière, il serait très surprenant de réentendre ces chansons réinterprétées par Michèle Torr en 2018. 


Finalement, c’est peut-être Rien n’y fera qui, de facture plus « classique », pourrait se prêter à une réorchestration…
« C’est ta dernière lettre
C’est ton dernier adieu
Quand je relis ta lettre
Je te devine heureux
Heureux
A vouloir t’oublier
Je ne pense qu’à toi
La fille que j’étais
Ne te reconnaît pas…
Et rien rien
Rien n’y fera…
Non rien rien
Rien n’y fera
Je ne pense qu’à toi…
Et rien rien
Rien n’y fera…
Non rien rien
Rien n’y fera
Mon cœur n’arrive pas
A s’éloigner de toi… 
C’est ma dernière lettre
Après l’avoir relue
J’y ajoute peut-être
Qui sait reviendras-tu ?...».
Signée Jacques Revaux et  Roland Hilda.


Ceci explique cela !


Nous voici déjà arrivés au dernier EP de Michèle Torr, paru en janvier 1968. Avec la fin des quarante-cinq tours quatre titres, ce sont un peu les yéyés qui se taisent, et l’âge tendre qui s’achève. Heureusement, cette douzième et dernière « série » est…double. Car édité deux fois en quatre semaines, une première fois avec Ce que veut dire aimer et La Cible en face B, et une deuxième fois avec Mais la vie c’est la vie et… L’amour est bleu
La première est très belle…
« Ne vivre que pour toi
Ne suivre que tes pas
Poursuivre malgré moi
Ce rêve
Qui habille de bleu
Mes chansons et mes yeux
Quand le matin frileux
Se lève
Te serrer sur mon cœur
Etouffer de bonheur
Lorsque ma bouche effleure
Ta lèvre
Rêver quand tu es là
Trembler quand tu t’en vas 
Ce que veut dire aimer c’est ça
N’avoir qu’une chanson
Ne voir qu’un horizon
Où folie et raison
Se fondent
Rebroder chaque jour
Les draps bleus de l’amour
Pour que tourne toujours
La ronde
Des serments éternels
Des contes de Noël
Qui font briller le ciel
Du monde
Devoir taire sa joie
Et cacher son émoi
Ce que veut dire aimer c’est ça
Cacher un jour trop gris
Changer un ciel de pluie
Pour en faire un joli
Dimanche
N’avoir plus jamais froid
Ce que veut dire aimer c’est ça»,
mais son orchestration très datée. Ne serait-ce pas une bonne idée de la « réhabiller » ?


La deuxième, une rareté, car la première édition semble avoir eu moins de succès que la seconde: 
« Tire
Sur la cible
C’est l’amour que tu veux tuer
Vise bien le cœur de la silhouette de papier
Tire
Sur la cible
Il est trop tard pour reculer
Vise bien le cœur du premier coup tu vas gagner… ».


On se rappelle mieux la troisième :
« Il faudrait accorder à tous les gens qui s'aiment
Le temps d'y croire un peu avec le temps d'en profiter
De saison en saison, de dimanche en semaine
Il faudrait leur donner le temps pour bien s'aimer
Mais la vie c'est la vie
Et elle court après nous
Les pendules sont partout
Qui nous surveillent
Mais la vie c'est la vie
On en fait des chansons
C'est plutôt la prison
De nos merveilles
Il faudrait me donner à moi qui t'aime tant
Et des millions de vies et des millions de jours de joie
Pour t'aimer comme je t'aime il m'en faudrait du temps
Il faudrait me donner le Ciel pour être à toi
Mais la vie c'est la vie
On se cherche, on se perd
Il nous reste un désert
Qui nous ressemble
Mais la vie c'est la vie
On la vit sans se voir
Elle nous laisse l'espoir
Pour être ensemble
Oui, la vie c'est la vie
Des soleils défendus
Des bonheurs inconnus
Mais moi je t'aime
Mais la vie c'est la vie
C'est comme ça, je m'en fous
Moi, je vais malgré tout
T'aimer quand même
T'aimer quand même
Pour la vie ».


Et surtout la quatrième. Car Love is blue, adaptation de L’amour est bleu, a été un tube planétaire. Car la version originale de la chanson, interprétée par Vicky Leandros, est arrivée, un an après Ce soir je t’attendais par Michèle Torr, quatrième du Grand Concours Eurovision  de la chanson 1967, pour le Luxembourg.
Mais, même si on ne peut pas plus réécrire l’histoire de la chanson qu’on ne peut réécrire l’Histoire, n’en déplaise à son compositeur, quand on écoute les deux versions françaises de L’amour est bleu, on peut se dire, entendant la version fraîche et quelque peu sautillante de Vicky Leandros,  que, si  c’est Michèle Torr qui l’avait chantée à l’Eurovision en 1967, elle aurait, grâce à sa voix profondément mélodieuse et aux beaux arrangements qui lui servaient d’écrin, pu la faire monter plus haut dans le classement et même, peut-être, lui permettre d’atteindre la victoire.
Mais on ne peut réécrire l’Histoire… de la chanson.
On peut cependant réécouter une des plus belles faces B de la discographie de Michèle Torr :
«Bleu, bleu, l'amour est bleu
Berce mon cœur, mon cœur amoureux
Bleu, bleu, l'amour est bleu
Bleu comme le ciel qui joue dans tes yeux
Doux, doux, l'amour est doux
Douce est ma vie, ma vie dans tes bras
Doux, doux, l'amour est doux
Douce est ma vie, ma vie près de toi
Comme l'eau, comme l'eau qui court
Moi, mon cœur court après ton amour
Gris, gris, l'amour est gris
Pleure mon cœur lorsque tu t'en vas
Gris, gris, le ciel est gris
Tombe la pluie quand tu n'es plus là
Comme l'eau, comme l'eau qui court
Moi, mon cœur court après ton amour
Fou, fou, l'amour est fou
Fou comme toi et fou comme moi
Bleu, bleu, l'amour est bleu
L'amour est bleu quand je suis à toi
L'amour est bleu quand je suis à toi ».
Signée Pierre Cour (pour les paroles) et André Popp (Manoukian( ?), pour la musique).


Alors si, à la fin de la période des quarante-cinq tours 4 titres on devait faire une première sélection, quelles sont les chansons que l'on retiendrait?
C'est dur d'avoir seize ans?
Non à tous les garçons?
J'ai brûlé ta lettre?
Rien n'y fera?
Ce que veut dire aimer?
Mais la vie c'est la vie?
L'amour est bleu?
Autant de chansons que l'on redécouvrirait avec un grand plaisir...


Puis vint la période des quarante-cinq tours deux titres qui vont disparaître au début des années 1990. Le premier 45 tours deux titres de Michèle Torr, c’est Lady Winchester. Il est sorti pendant l’été 1968. C’était il y a tout juste cinquante ans. Alors que cette chanson est franchement humoristique, Au bord d’une plage, l’unique chanson de la face B, n’est pas une chanson heureuse. Pleine de mélancolie, elle évoque une rupture qui suscite bientôt la nostalgie.
«  Au bord d’une plage sans soleil
Rien ne brille plus pour moi
Quelques gros nuages dans le ciel
Ce soir me font penser à toi… ».


Notre chanson l’est davantage :
« Comme une fleur
Elle a poussé
Avec le temps qui passe
Mais dans nos cœurs
Elle a trouvé
Sa place
Et puis elle a grandi
Elle a chanté dans notre vie
Notre maison
Où l’on s’aime
Mon amour
Notre chanson
Ce n’était qu’un refrain
De quatre sous
De quatre notes
De presque rien
Quand on s’est rencontrés
Notre chanson
Elle n’avait que les mots
De tous les jours
Que l’on s’est dits
Rien qu’un beau jour
C’est ainsi qu’elle est née
Notre chanson … »,
en face B de En regardant les amoureux.
Ensuite, Un homme dans ma vie, bien que mentionné en premier sur la pochette, est bien la face B de Je t’ai donné ma vie. Et depuis janvier de l’année 1969, c’est officiel, il y a bien un homme dans la vie de Michèle Torr. Il s’agit de Jean Vidal. Tous deux se sont mariés à Avignon mais en l’été 1969, elle chante, au futur, ce qu’elle vit au présent:
« Il y aura un homme dans ma vie
Et ma vie se fera soudain plus belle
Quand viendra cet homme dans ma vie
Nous ferons tous deux le chemin de son cœur
A mon cœur
Ensemble ».


Menue monnaie, au dos de Aime, adresse, sur un rythme festif, une note d’espoir aux musiciens des rues qui pour gagner leur vie par le biais de leur passion pour la musique sont contraints de faire la manche.
« Chaque dimanche
Tu fais la manche
Et tu ramasses
La menue menue monnaie
Que tu dois compter compter
Lorsque tu as fini de chanter… »
en attendant des jours meilleurs :
« Mais ne t’inquiète pas
Un jour tu verras
La fortune viendra
Et tu souriras
Et alors ce jour-là
Finie la manche
Tous les dimanches
Et plus jamais
De menue menue monnaie
Que tu dois compter compter
Lorsque tu as fini de chanter… ».
Pourtant il n’est pas sûr que cela fonctionne ainsi pour tout le monde !


Mais c’est en 1970 qu’on trouve en face B de Les papillons la chanson la plus marquante de cette période: Rire ou pleurer, cosignée par Charles Dumont, avec laquelle Michèle Torr est sélectionnée pour représenter la France au festival de Rio où elle chante dans l’immense stade Macaraña devant, parmi la foule, un habitué du lieu : le « roi » Pelé : 
« … Je sais qu’un jour
Le soleil brillera
Que dans le ciel de l’amour
Il éclatera
Et ce jour-là plus besoin de chercher
Je saurai bien s’il faut rire ou pleurer… ».


Puis on trouve au verso des 45 tours suivants en 1971 Alors on marche (face b de  Ça pourrait être vrai, qui est cosignée par Jean Vidal), Pour un roi de cœur (face B de C’était un petit homme) et, en 1972, Petit si petit, face B de Aime celui qui t’aime.
Si la deuxième sonne encore comme de la chanson de variété traditionnelle, de même que précédemment Notre chanson, Un homme dans ma vie ou Rire ou pleurer, la première…
« Pour une rose au fond du cœur
Pour un sourire contre des pleurs
Changez donc la Terre en un jardin
Sans vos armes sans vos poings
Pour voir tous nos enfants heureux
Revoir le jour sous un ciel bleu
Pour ne voir partout que des sourires
Pour n’entendre que des rires
Alors on marche
Marchons encore
Qu’on se promène
Et pas de chaines
Qu’on se promène
Et les emblèmes … »,
Alors on marche,
et la troisième …
« Toi qui es petit si petit
A peine plus grand qu’une fourmi…
Tu pourrais au moins de temps en temps
Avoir l’ai content
Couche-toi dans ta couchette
Allume une cigarette
Pense un peu à la planète
Qui tourne sans toi »,
Petit si petit,
sont davantage dans l’air hippie du temps du fait de l’engagement esquissé dans les paroles et de rythmes plutôt festifs que l’on entend aussi dans Bye bye l’amour, enregistré par Michèle avec le groupe Alliance, également constitué de Serge Prisset, Bélinda et… Herbert Léonard.


Parmi les raretés de cette période, certains se rappelleront aussi deux chansons inédites, On s’aimera un peu, beaucoup, (« rengaine nostalgique
que chantaient Juliette et Roméo
On s’aimera un peu, beaucoup
A la folie ou pas du tout
On s’aimera passionnément pour toute la vie
On s’aimera rien qu’une nuit
On s’aimera pour quelques jours
On s’aimera oh ! mon amour
C’est drôle la vie
J’aime écouter la musique du vieux piano d’autrefois
Quand il devient diabolique pour chanter Samson et Dalila… ») avec laquelle Michèle a tenté en vain sa chance aux sélections de l’Eurovision pour représenter la France, mais aussi Est-ce mon cœur ou le printemps ?
« Est-ce mon cœur ou le printemps je ne sais pas
Mais aujourd’hui c’est autrement que je te vois
Tu me souris et brusquement ma tête tourne tourne
Et je crois bien que le soleil n’y est pour rien
Au bord de l’eau un petit bal s’ouvre en plein vent
Comme autrefois les petits bals de nos parents
Cet air  vieillot ce vieux piano tout nous fait rire rire
Et malgré ça tout en dansant entre tes bras
Je me vois un beau dimanche
Tourner en robe blanche
Ainsi qu’un tableau du passé
Une rose printanière fleurit ta boutonnière
Les gens crient vivent les mariés… ».
Deux chansons apparemment signées, de même que Dis Pierrot, bande originale du film Une fille nommée Amour, par Pascal Sevran, dont la reprise pourrait être une bonne idée.


Mais il y a surtout Enfants d’aujourd’hui, homme de demain dont il n’existe qu’une version en français en public parue uniquement au Japon, tandis que la version nippone de J’ai pleuré de joie comporte en face B une version studio en japonais de ce titre de Paul Mauriat qui a permis à Michèle de remporter le « Grand Prix des Chanteurs » au festival de Tokyo en 1971.
Pourquoi ne pas réenregistrer cette chanson plus que jamais d’actualité qui alertait déjà le monde sur les dangers liés à la pollution pour les générations futures ?
« Si la mer devient cimetière
Pour les algues et pour les poissons
Et si les moissons de la terre
Meurent dans les sillons
Dites-moi que sera le jour à venir
Et comment pourrez-vous grandir
Enfants d’aujourd’hui destinés à vivre
A vivre ou mourir en hommes de demain »,
Enfants d’aujourd’hui, homme de demain.



Mais l’envers du chemin, un projet discographique dont le concept serait de faire (re)découvrir les chansons méconnues du répertoire de Michèle Torr, ce pourrait être aussi revisiter les trente-trois tours que la chanteuse a enregistrés.
Dans les premiers, à l’exception de Un enfant viendra et de Tout le bonheur de la Terre, on ne trouve que des chansons déjà présentes sur des 45 tours. Par contre, on trouve une série de belles chansons jusque là inédites sur Tous les oiseaux reviennent, le superbe album de 1970 arrangé et orchestré de somptueuse façon par Jean Claudric.
Il y a d’abord celle qui donne son titre à l’album Tous les oiseaux reviennent, seulement sortie en 45 tours promotionnel :
« Ecoute tous les oiseaux reviennent
Et le printemps est de retour
Regarde tous les oiseaux reviennent
Avec eux s’en revient l’amour… »,
que ceux qui ont eu la chance de voir L’amertume de la chanteuse devant l’utilité des fils barbelés, très beau moyen métrage d’Armand Lameloise, avec Fabienne Babe, ont pu réécouter, réarrangée par Jean-Michel Bernard, qui a aussi  arrangé Michèle Torr chante Piaf, C’est l’amour.


Il y a ensuite J’ai pleuré de joie, qu’Enrico Macias, dont elle a fait, avec Michel Sardou, la première partie de son Olympia de 1970, lui a offerte.
« Que de fois
J’ai pleuré de joie
A te regarder
Vivre à mes côtés
Que de fois
J’ai vu dans tes yeux
L’existence du merveilleux… »,
Une merveilleuse chanson, en effet.


Mais il y a aussi, avec la fantaisiste Je vais faire sauter la banque ou la reprise énergique des Shocking Blue, Fleur de soleil, pleine d’éclats de voix, Quand le rideau est fermé, L’oiseau et l’enfant, la triste Pour quelques roses, mais avec Mon amour (cosignée par Charles Dumont, de même que Rire ou pleurer), Pour toi ou encore et surtout  Ça, très jolie chanson de Jean Claudric et Pierre Cour, qui décrit avec beaucoup de délicatesse la complexité du sentiment amoureux à sa naissance:
« Ça
Quand on ne l’attend pas
Tout à coup le voilà
A demi nu
Ça
Alors on ne sait pas
Ni pour qui ni pourquoi
Il est venu…
Ça
Qui commence avec toi
Qui finit avec moi
C’est peut-être l’amour »,
on voit bien que la chanteuse tient à montrer… qu’elle est amoureuse !
Choisir un titre et un seul dans ce si bel album serait possible, mais bien difficile…



Pourtant, malgré bien des efforts et des succès d’estime, la carrière de la jeune chanteuse ne décolle pas vraiment et certains considèrent même qu’elle fait déjà partie de ceux et celles, apparus dans la décennie précédente, que l’on commence à oublier. De sorte que sa maison de disques, Philips, déçue par des ventes de disques qu’elle juge insuffisantes, décide de la remercier et de lui rendre son contrat. Malgré cela (ou grâce à cela) après avoir songé à confier les rênes de sa carrière à un certain… Claude François devenu producteur, c’est dans une autre équipe qu’elle va se faire une place, celle des disques Az où elle va rencontrer Jean Albertini et Paul de Senneville, entre  autres, qui vont très vite la remettre, et durablement, sur la voie du succès et lui permettre d’accéder au statut de très grande vedette, voire de star de la chanson…
Sur son premier album paru chez Az en décembre 1974 on trouve les chansons des quatre quarante-cinq tours successivement sortis, Les amoureux, Un enfant c’est comme ça, Une vague bleue et… Un disque d’amour. Un enfant c’est comme ça sera la chanson qui va marquer son retour en force et Une vague bleue, dixième plus forte vente de 45 tours de Michèle Torr,  sera à son tour un tube marquant puisque ces deux chansons se retrouveront régulièrement inscrites dans les futurs tours de chant de la chanteuse et font partie de celles qui resteront gravées dans bien des mémoires.
En face B de ces quatre disques on trouve quatre autres chansons: Et piano va l’amour :
« Et piano va l’amour
Passe le temps
Et piano va l’amour
Toujours plus grand
On s’aime et l’on s’embrasse encore
Un peu plus fort
Nous sommes à tout jamais liés
Au même sort
Et piano va l’amour
Au long des jours
On s’aime et piano va l’amour… »,
Paul :
« Paul que tu es bien chez toi
Et oublie qu’il existe pour la ville un chemin
Des autos et des grands trains
Paul que tu es bien chez toi
Ici on vit trop vite
On ne connaît même pas son voisin
La ville ne te ressemble pas
Paul tu es bien chez toi… »,
La louve et La voix d’un enfant.


La plus connue des quatre, c’est indiscutablement La louve …
« Quand la louve frissonne
A son premier printemps
Quand elle tourbillonne
De joie et d’émotion
Ce sera mariage
Avec un jeune loup
Un vrai loup de son âge
Un vrai loup de chez nous
C’est comme nous
Comme une histoire d’amour
C’est comme nous
Un peu plus chaque jour
C’est comme nous
Comme moi comme vous
On est tous un peu loup
On est tous un peu loup…
Quand la louve s’inquiète
Qu’elle est bien fatiguée
Vois le loup qui sans trêve
La soutient pour marcher
C’est comme nous
Comme une histoire d’amour…
Quand le loup ferme les yeux
D’avoir trop travaillé
La vieille louve pleure
Celui qui va manquer
C’est comme nous
Comme une histoire d’amour…
On est tous un peu loup
On est tous un peu loup »,
La louve, 1974,
car c’est celle de ses chansons méconnues que ses fans ont le plus réclamée à Michèle Torr au point que, trente ans plus tard, elle a décidé de l’inclure, pour la première fois, dans son tour de chant, celui de l’Olympia de 2005.
Ensuite, elle a décidé de la réenregistrer en studio et d’en faire le titre phare d’un album paru en 2006 dans lequel on retrouvait en majorité des chansons cosignées par… Michèle Torr : Seule, Tant je t’aime, etc.
Pourquoi cette chanson en tête d’un tel album ? C’est qu’elle a eu beau être cosignée par Jean Vidal, La louve n’en aurait pas moins été écrite sur une idée de Michèle elle-même, et ce choix de la mettre en avant, c’était aussi une façon d’en revendiquer la… maternité. Une affaire de famille en quelque sorte, au moment où celle-ci s’agrandissait, puisque Michèle et de Jean Vidal venaient de donner à Romain une petite sœur, Emilie…


« C’est la voix d’un enfant
Qui croyait en Noël
Qui rêvait tendrement
Que la vie était belle
C’est la voix d’un enfant
Qui s’imagine encore
Qu’il suffit d’être au chaud
Lorsqu’il fait froid dehors
Ô ô ô…
C’est la voix d’un enfant
Qui s’endort chaque nuit
Qui attend d’être grand
Pour goûter à la vie
C’est la voix d’un enfant
Qui demande chaque jour
Des pourquoi ? des comment ?
Et qui sourit toujours
Ô ô ô…
C’est bien ça mon enfant
Ce n’est pas illusion
Il n’y a de tourment
Rien que dans les chansons
Endors-toi mon enfant
Demain il fera beau
Et il sera bien temps
De rêver à nouveau
Ô ô ô… »,
La voix d’un enfant, 1974.


Et sur ce même album, une superbe Ritournelle, histoire triste et belle d’un vieux clown qui ne sait plus faire rire…
« Il joue encore avec amour la ritournelle
Sur un violon petit violon mal accordé
Il joue encore avec amour la ritournelle
Faut-il en rire ou faut-il en pleurer ? ».


C’est une chanson que l’on oublie souvent mais, avec Cette fille c’était moi, Michèle Torr va obtenir, en 1975, l’une des plus fortes ventes de disques de sa carrière : avec 210 000 exemplaires vendus, c’est sa sixième plus forte vente de 45 tours, devant bien des titres qui vont pourtant s’inscrire plus durablement dans ses tours de chant. Remportant un vif succès à l’étranger, au Québec et en Allemagne en particulier, elle va faire l’objet d’une adaptation en allemand : Wie das leben so spielt, (La vie est comme ça, « Oh ! la la c’est l’amour… »), en 1976.
En face B de ce 45 tours, on trouve une chanson fiévreuse aux rythmes très changeants, Bleu :
 « Prends-moi dans tes bras
Et fais de moi ce que tu voudras
Je me suis dit « On n’aime qu’une fois »
Alors pourquoi pas ?
Bleu comme le ciel
Quand il veut nous sourire un peu
Et comme la nuit
Quand elle sait bien nous rendre heureux
Bleu comme la mer
Qui se confond avec nos yeux
Et comme l’espoir
Qui nous permet de vivre à deux
Prends-moi dans tes nuits
Et fais de moi l’ombre de ta vie
Je me suis dit « On ne vit qu’une fois »
Alors pourquoi pas ?
Bleu comme une fleur
Qui s’est posée contre mon cœur
Et comme la peur
De perdre un jour notre bonheur
Bleu comme la chambre
Où nous vivons des jours heureux
Et comme l’amour
Toujours brûlant comme du feu
Prends-moi dans ton cœur
Et fais de moi ton porte-bonheur
Je me suis dit « On ne se quitte qu’une fois »
Alors pourquoi pas ?
Bleu après l’amour
Comme la fumée d’une cigarette
Et quand vient le jour
Comme une brume un peu secrète
Bleu comme la lumière
Qu’on aperçoit toujours un peu
Et comme la vie
Quand on veut bien se prendre au jeu. »
En allemand Bleu, ce sont Les couleurs de ce monde : Die farben dieser welt.


En face B de Je m’appelle Michèle, neuvième plus forte vente de 45 tours de la chanteuse avec 170 000 exemplaires écoulés, Mister Mélody, en 1976, nous parle d’un musicien menant une vie de bohème (« Il dormait à la belle étoile »), s’accompagnant non pas d’une guitare mais d’un piano mécanique, « boîte à musique » contenant « mille chansons », « une chanson triste pour tous les malheureux (la la la la…), une jolie mélodie pour tous les amoureux (la la la la)», des « ritournelles nostalgiques », chansons aux « mots magiques » et aux musiques « originales, pleines de vie »… Mais qu’est devenu ce Roméo qui « venait au milieu de la nuit »  jouer à sa Juliette de son instrument ? On n’en saura pas plus puisqu’ :
 «… un jour il est parti
Paraît-il que c’est en Amérique
Faire sa vie… », comme beaucoup de musiciens, qui semblent souvent avoir le cœur vagabond…

Ces deux chansons, Bleu et Mister Mélody, on les retrouve sur l’album intitulé simplement Michèle Torr, paru en 1976…


Et puis sur cet album (Je m’appelle…) Michèle Torr  de 1976, il y plusieurs bien jolies chansons peu connues comme A tes genoux, Paris laisse-moi vivre ma vie, Le jardin d’Angleterre et surtout…Je chante, superbe chanson cosignée par François Bernheim…
« Je chante pour les gens heureux
On m’appelle l’artiste
Je chante pour les gens heureux
Je ne suis jamais triste
Pour un instant pour une nuit
Alors la vie est belle
Après je repars dans la nuit
Je chante à tire d’aile
Je ne suis rien
Je ne suis qu’une voix
Une musique
Je viens te voir
Pour te faire rêver
Et c’est magique
Regarde un peu le troubadour
Approche-toi un peu de moi… »
Je chante, 1976.


1976. Après un second album (disque d’or sans qu’aucun 45 tours n’en soit extrait, pas même Jezebel) de reprises de grandes chansons françaises et étrangères (adaptées en français) intitulé aussi… Michèle Torr , en décembre sort Il viendra, chanson grave sur un personnage emblématique: …le Père Noël. En face B d’un disque tout de même vendu à 125 000 exemplaires, une autre chanson forte : Pour vivre heureux


« Le ciel gris fumée d’usine
Le bleu pétrole de la mer
Sont les couleurs qui dominent
Aujourd’hui sur notre Terre
Et pour ne pas me jeter
Dans ce monde qui me déçoit
C’est devant ma cheminée
Que j’ai le cœur en émoi
Pour vivre heureux
Vivons cachés
Pour vivre heureux
Pour vivre heureux
Vivons cachés
Cultivons notre jardin
Mais qui donc a pu dire ça ?
La vérité n’est pas loin
Plus je vais plus je le crois
Quatre poutres et de la terre
Quelques murs couverts d’un toit
Il n’y a rien d’autre à faire
Pour m’apporter de la joie
Pour vivre heureux
Vivons cachés
Pour vivre heureux
Pour vivre heureux
Vivons cachés
Quant aux jouets de plastique
Il paraît qu’il faut s’y faire
Pour ceux qui sont nostalgiques
Tout se traîne et tout se perd
Une chanson ne suffit pas
A expliquer le pourquoi
Je n’accepterai jamais
D’applaudir cette vie-là
Pour vivre heureux
Vivons cachés
Pour vivre heureux
Pour vivre heureux
Vivons cachés »,
Pour vivre heureux, 1976.
Un monde décevant à cause de la pollution et des méfaits d’une trop grande exposition qui poussait déjà à prôner la simplicité… sujets restés (et qui le sont plus que jamais) d’actualité.
Une chanson qui fait partie des « plus belles chansons » de Michèle Torr, et que l’on retrouvera l’année suivante, à juste titre, sur l’album compilation Une petite française… et ses plus belles chansons. Avec Le (joli) mal de mai


Le mal de mai, jolie chanson parue en mars 1977:
 « Quelque part dans la ville
Sur les pavés brûlants
Le soleil est tombé
Quelle chaude journée !
Nous avions tant marché
En nous tenant la main
Que l'on s'est arrêté
Au boulevard Saint-Germain
Et j'ai le mal d'aimer au mois de mai
Il y a des aventures que l'on n'oublie jamais
J'ai le mal d'aimer au mois de mai
Si c'était aujourd'hui, je recommencerais
Entre deux cigarettes
Tu parlais d'amitié
Entre nous deux, je crois
C'était bien plus que ça
Je me souviens de tout
De ces gens qui criaient
Comme s'ils étaient jaloux
De voir que l'on s'aimait
Et j'ai le mal d'aimer au mois de mai
Il y a des aventures que l'on n'oublie jamais
J'ai le mal d'aimer au mois de mai
Si c'était aujourd'hui je recommencerais
Et puis c’est le brouillard
Je ne sais plus très bien
Bousculé par la foule
Tu as quitté ma main
On ne s’est plus revus
Presque dix ans déjà
Un printemps malgré tout
A marquer d’une croix 
Et j'ai le mal d'aimer au mois de mai
Il y a des aventures que l'on n'oublie jamais
J'ai le mal d'aimer au mois de mai
Si c'était aujourd'hui je recommencerais … »,
en face B d’Une petite française, en version …française mais aussi anglaise, espagnole et allemande, qui ressemble à La Foule:
« Je revois la ville en fête et en délire
Suffoquant sous le soleil et sous la joie
Et j'entends dans la musique les cris, les rires
Qui éclatent et rebondissent autour de moi
Et perdue parmi ces gens qui me bousculent
Étourdie, désemparée, je reste là
Quand soudain, je me retourne, il se recule,
Et la foule vient me jeter entre ses bras...
Emportés par la foule qui nous traîne
Nous entraîne
Écrasés l'un contre l'autre
Nous ne formons qu'un seul corps
Et le flot sans effort
Nous pousse, enchaînés l'un et l'autre
Et nous laisse tous deux
Épanouis, enivrés et heureux.
Entraînés par la foule qui s'élance
Et qui danse
Une folle farandole
Nos deux mains restent soudées
Et parfois soulevés
Nos deux corps enlacés s'envolent
Et retombent tous deux
Épanouis, enivrés et heureux...
Et la joie éclaboussée par son sourire
Me transperce et rejaillit au fond de moi
Mais soudain je pousse un cri parmi les rires
Quand la foule vient l'arracher d'entre mes bras...
Emportés par la foule qui nous traîne
Nous entraîne
Nous éloigne l'un de l'autre
Je lutte et je me débats
Mais le son de sa voix
S'étouffe dans les rires des autres
Et je crie de douleur, de fureur et de rage
Et je pleure...
Entraînée par la foule qui s'élance
Et qui danse
Une folle farandole
Je suis emportée au loin
Et je crispe mes poings, maudissant la foule qui me vole
L'homme qu'elle m'avait donné
Et que je n'ai jamais retrouvé... », créée par Edith Piaf, et que reprit Michèle en 2003, sur son album …. Chante Piaf, c’est l’amour, le temps d’une version étourdissante.


1977. 502 000. C'est le nombre de 45 tours vendus. J'aime. Des paroles de Jean Albertini et, pour la première fois pour Michèle Torr, de Didier Barbelivien. Ce sera pour lui le premier disque d'or. Deuxième plus forte vente de singles pour la chanteuse sur l'ensemble de sa carrière. Sur un instrumental du groupe Abba. Un des tubes de l'été 77. En face B, Couleurs. Pas beaucoup de place pour le noir ou le blanc, le rouge ou le vert...Michèle voit la vie en rose sous un ciel tout bleu.
"Le bleu vit dans le ciel
le blond dans le soleil
le rose vit dans les fleurs
et ce sont là mes trois couleurs
le bleu vit dans mes yeux
le blond dans mes cheveux
le rose vit dans mon cœur
mes trois couleurs".
C'est, paraît-il, une superstition d'artiste:"...Mais surtout pas de vert..."
Pas si sûr puisqu'en octobre de la même année elle reprend, au verso de sa version de Petit Papa Noël, Mon beau sapin:
"Mon beau sapin, roi des forêts
Que j'aime ta verdure
Quand par l'hiver, bois et guérets
Sont dépouillés, de leurs attraits
Mon beau sapin, roi des forêts
Tu gardes ta parure...
Mon beau sapin, tes verts sommets
Et leur fidèle ombrage
De la foi qui ne ment jamais
De la constance et de la paix
Mon beau sapin, tes verts sommets
M'offrent la douce image".

Et J'aime devient le titre phare d'un 33 tours que la chanteuse vêtue d'un manteau blanc au col de fourrure considère presque comme un album de Noël, où on trouve également Dis-moi mon Dieu, sur une superbe musique de Schubert, qui aurait amplement mérité de faire partie de son tour de chant pour sa tournée des églises, Chanter, c'est prier. Et si on cherche d'autres belles chansons méconnues sur cet album, on trouvera par exemple Je n'oublierai jamais, que C. Jérôme a cosignée, ou encore La gloire ou bien l'amour, sur le même thème que la face B du 45 tours suivant...


« Avec mon maquillage
J’ai un autre visage
Devant moi
Au loin j’entends la salle
Qui remue et qui parle
C’est à moi
Et comme chaque soir
Dans ma robe noire
J’ai le trac je le dis
Mais après tout j’ai choisi
Chanter c’est ma vie … 
La gloire ou bien l'amour
J'ai choisi un jour
On ne chante pas la même chanson
Pour un homme ou pour des millions
La gloire ou bien l'amour
Jusqu'au dernier jour
Je vivrai la vie que j'ai choisie
La chanson est ma seule amie
Juste devant la foule
Le film se déroule
Je suis bien
L’ambiance est  un orage
Qui emporte au passage
Mes chagrins
Et pendant une heure
Avec tout mon cœur
Je me donne à la musique
Et quand j’entends les bravos
J’ai froid dans le dos
La gloire ou bien l'amour
J'ai choisi un jour…
Mais après le spectacle
Quand le rideau miracle
Est tombé
Quand je me démaquille
Je retrouve la fille
Que j'étais
Et je me surprends
À pleurer vraiment
De tristesse ou bien de joie
Aujourd'hui je ne sais plus
Mais je l'ai voulu
La gloire ou bien l'amour
J'ai choisi un jour… »
La gloire ou bien l’amour, 1977.


Sur le même thème, Chanteuse ,1978 :
 « Sous les sunlights de minuit
Je viens vers vous en robe blanche
Il n’est plus là mais tant pis
Devant le micro je m’avance
Tout près de vous je souris
Ma chanson est toujours magique
Il m’a quittée c’est fini
Je n’ai que vous et la musique
Chanteuse ne pleure pas
Ne pleure pas et chante
La solitude est faite
Pour les gens comme toi
Chanteuse ne pleure pas
Ne pleure pas et chante
Les larmes de ta vie
C’est pour une autre fois
J’aime les bravos et les cris
Je voudrais tant qu’il vous ressemble
Je vous salue et merci
On est vraiment si bien ensemble
Chanteuse ne pleure pas
Ne pleure pas et chante…
Je sors de scène et déjà
Derrière le rideau on m’entraîne
Mais j’ai encore de la voix
Pour dire adieu pour dire je t’aime
Chanteuse ne pleure pas
Ne pleure pas et chante… »,
face B du 45 tours numéro un des ventes de singles  de Michèle, avec 650 000 exemplaires vendus (disque d’or), il s’agit bien sûr d’Emmène-moi danser ce soir. Curieusement, on ne retrouvera pas cette chanson  sur l’album qui sortira au début de l’été suivant, où l’on découvrira dix titres inédits, pour un voyage musical entre les Etats-Unis (Boulevard du rock, La musique de là-bas), l’Italie et la Provence (Le cours de chant La maison de mon enfance…), et où Profession artiste vient compléter ce thème de la solitude de la chanteuse déjà évoqué dans La gloire ou bien l’amour et Chanteuse.
« Quatre heures du matin n’importe où
La solitude après la gloire
Dans cette rue humide et blanche
Le vent léger me donne froid
Je marche devant ma chanson
Le dîner n’était pas très bon
Devant cet hôtel cette chambre
Il n’y a plus que moi et moi…
Profession artiste
Les yeux de toutes les couleurs
Née je ne sais plus le jour ni l’heure
Signe particulier sensible
Profession artiste
Que l’on soit mime ou bien chanteur
On est toujours seul sur la piste
Même à l’ombre des projecteurs
La nuit me laisse dans le noir
La solitude après la gloire
Et je m’invente des images
Comme un vieux film qu’on revoit
Quelques sourires et des bravos
Des signatures sur les photos
Quelques dialogues et des visages
Comme des forêts devant moi
Profession artiste… »,
Profession artiste, 1978.
Sur cet album majeur, on peut écouter aussi l’Ave Maria de Charles Gounod ou encore Comme une mélodie d’automne.
«  Je me sens comme une mélodie d’automne
Que les violons font pleurer
Tu m’oublies tu m’abandonnes
Je n’ose plus rêver
Comme une mélodie d’automne
Que la pluie va emporter
Tu m’oublies tu m’abandonnes
Au milieu de l’été… »,
Comme une mélodie d’automne.
Pendant ce temps, l’ami C. Jérôme, déjà sollicité l’année précédente avec Je n’oublierai jamais, a déjà dû reprendre sa plume…


Et de la délicate plume de l’ami C. Jérôme qui cosigne le titre coule une jolie chanson, aussi vigoureusement rythmée pour la phrase musicale qui sert de refrain que tendrement nostalgique pour les paroles des couplets :
« Dans le parc au nord de la ville
Au milieu des allées tranquilles
N'oublie jamais que le dernier cygne
Vit sur le lac, fragile
Tu le verras au milieu des eaux
Comme un oiseau d'argile
Dans le parc au nord de la ville
Je ne suis plus une petite fille
Et le manège tourne sans moi
Dans la neige et le froid
Le temps d'un rêve, tu te souviendras
Et il s'arrêtera
Dans le parc au nord de la ville
Un roman un peu trop facile
Tu m'embrassais sur le banc de bois
On était bien, je crois
Mais la rivière en dessous du pont
N'est pas Venise, oh non
Dans le parc au nord de la ville
Quand on a refermé la grille
Je n'ai pas voulu me retourner
Sur mes jeunes années
Ne dites rien, je perds la mémoire
Et c'est une autre histoire
Quelque part au nord de la ville »,
Au nord de la ville, 1978, face B de La séparation.


Il récidivera, l’année suivante, avec Discomotion, vendu à  350 000 exemplaires pour le 45 tours, ce qui en fait le quatrième plus gros tube de Michèle, dont la face B est aussi une très belle chanson. Tous les malheurs du monde
« Ce voile de mariée abimé par la pluie
Ce soldat condamné qui jette son fusil
Ces enfants malheureux pour le jouet qu’on abime
Ce bateau naufragé prisonnier sur la mer
Ce vieil homme épuisé qui tremble dans l’hiver
Ces amoureux d’un soir que l’amour illumine
Chacun l’a vu, chacun le sait
Elle a les yeux de la souffrance
Chacun ici le reconnaît
Quel joli nom la déchirance
Elle est comme le vent sur le feu des forêts
Elle est pire que le temps, on ne l’oublie jamais
Elle est toujours debout au milieu de la foule
Elle te prend le bonheur que tu cachais si bien
Elle t’a brisé le cœur, elle ne laissera rien
Elle emportera tout comme une pierre qui roule
Chacun l’a vu, chacun le sait…
Nous ne dormirons plus dans un lit tous les deux
Qui de nous s’est perdu, l’amour n’était qu’un jeu
Tes lèvres sur ma joue, c’est déjà la rupture
Elle est venue prendre ta place
Elle a les yeux de la souffrance
Elle est venue prendre ta place
Elle est en moi la déchirance
Chacun l’a vu, chacun le sait
Elle a les yeux de la souffrance
Chacun ici le reconnaît
Quel joli nom la déchirance »,
La déchirance, 1976.
N’est-ce pas même l’une des plus belles ?
De l’album qui suivra, où l’on trouve aussi de jolis titres comme Le bistrot, Et l’amour ou encore Juste après l’été, sera encore extrait un quarante-cinq tours, également intitulé Chanson inédite, en janvier 80, juste avant l’Olympia, avec en face B Histoire de la musique populaire.
« Je viens vous raconter l’histoire
L’histoire de la musique populaire
Celle qui fait chanter toute la Terre
Ça commence par une petite note en l’air… ».
Mais entre temps sera sorti un autre 45 tours : Quand un homme a du charme196 000 exemplaires. Septième plus forte vente de 45 tours de Michèle Torr.
Océan en face B, chanson fiévreuse aux paroles faciles, avec une voix lointaine et un peu acide, comme du fond des brumes. Etrange chanson.


Et en janvier 80, tandis que pour la France et d’autres pays européens Az choisit de sortir Chanson inédite, la Belgique a droit à un 45 tours qui hélas ! n’est pas sorti chez nous, avec une version studio inédite en France de Les Roses blanches et, en face B, une version disco de L’Homme à la moto emprunté à Edith Piaf. Loin des beaux arrangements -signés Jean-Michel Bernard- de Michèle Torr chante Piaf, c’est l’amour  en 2003. Brillant comme une boule à facettes.


Difficile après le succès de J’aime, d’Emmène-moi danser ce soir, de Discomotion ou de Quand un homme a du charme, et surtout après un triomphe mémorable sur la scène de l’Olympia du 19 février au 3 mars 1980, de proposer des chansons qui seront à la hauteur de celles qui ont précédé… Au printemps 1980, c’est encore C. Jérôme qui cosigne, avec Jean Albertini et Didier Barbelivien, Pendant l’été. Jolie mélodie, jolies guitares qui sonnent bien sixtees, jolis chœurs et surtout joli solo de saxo, très langoureux… mais cela ne suffit pas à convaincre les radios… ni la chanteuse elle-même, partie pour une tournée d’été marathon reprenant le spectacle de l’Olympia, qui sillonne le pays où partout fleurit l’affiche rose… Et qui préfère bientôt inclure dans son tour de chant non pas Pendant l’été mais… la face B : Le pont de Courthézon. S’il en est deux qui sont incontournables, celle-ci est la première, puisque cette chanson figurera dans la plupart des tours de chant de Michèle Torr, pendant toutes les années qui vont suivre et jusque dans les années 2010. Car elle aime à chanter cet hymne à sa région, la Provence, sur un rythme festif qui met en joie le public dès les premières mesures. 


« Une place au soleil
Pas très loin de Marseille
Un petit village perdu dans la Provence
Une région de France
Où même à la Noël
C’est comme les grandes vacances
Tu te rappelles
A l’eau de la fontaine
Tu viens chercher ton eau
Tu n’as jamais de peine
Il fait trop beau
Il y a dans ma région
Le parfum de melons
La chanson des cigales
Et le mistral… ».
Et tant pis si le pont de Courthézon n’existe pas.
« Dans ma maison
De Courthézon
Les enfants chantent chantent des chansons
Et sur le pont
De Courthézon
Les enfants dansent dansent tous en rond ».
Ce n’est qu’en chanson qu’il fait concurrence à celui d’Avignon.  
« Je connais le prénom
Du premier des santons
Son père est vigneron
Je me rappelle
On ne s’est pas quittés
Depuis la maternelle
Et pour lui je m’appelle
Toujours Michèle
Dans ma maison
De Courthézon…
Je donnerais Paris
Venise Miami
Pour une poignée de terre
De ma Provence
J’aime ses fleurs sauvages
Et les gens du voyage
Qui ont gardé l’accent
De mon enfance
C’est une histoire d’amour
Je reviendrai toujours
Dans ce pays où j’ai
Laissé mon cœur
Au soleil du Midi
Je n’ai que des amis
Qui sont au rendez-vous
De mon bonheur
Dans ma maison
De Courthézon… ».


Ah ! les délicieuses fragrances de celle que Mme de Sévigné appelait… la gueuse parfumée !
Le disque se vendra quand même à 120 000 exemplaires.
A l’Olympia en 1998, elle a même osé une version dance (c’était dans le vent à l’époque) que l’on retrouve sur Portrait de scène (1999).


Mais l’année 1980 n’est pas terminée. Didier Barbelivien  a fait d’Elle un tube dans les mois précédents, alors Michèle lui demande la même pour elle… Ce sera, en toute logique, Lui. Résultat : 400 000 45 tours vendus. Troisième plus gros tube de la chanteuse qui interprète un Je t’aime tendrement nettement plus fade en face B.
« … Je tourne les pages d’un roman
Où tu es toujours mon amant
Et nous ne serons jamais vieux
Etrange sentiment
Dehors il neige ou bien il pleut
Ecoute-moi ferme les yeux
Je t’aime tendrement
Je t’aime tendrement ».
Sur l’album dont les photos de la pochette ont été prises par Bernard Leloup dans le Colorado de Rustrel, au milieu des ocres du pays d’Apt, une série de chansons tendres aussi : N°1 avenue de la solitude, Rencontre, Mon fils, Love

Cependant c’est le 8 décembre 1980, alors que Lui était numéro 1 en France et au Québec,  que John Lennon a été assassiné, à New York, par Mark David Chapman …


Hommage sera rendu dès le printemps 1981 avec Adieu Lennon, en face B de De l’amour à celui dont elle avait repris And I love her (Et je l’aime) et Love of the loved (Toi l’orgueilleux).
« Adieu Lennon
Dans ma mémoire ta guitare résonne
Adieu Lennon
Dans ma sono plus de "Revolution"
Adieu Lennon
Les chansons que tu laisses
Ont les yeux de ma jeunesse
J'ai toujours dans ma vie
Une chanson d'amour qui dit "Love, love"
J'étais fière d'être celle
Que tu appelais "Michèle"
« Michelle
Ma belle
Sont des mots qui vont très bien ensemble
Très bien ensemble… »

T'en fais pas, les rockers vont au paradis


Adieu Lennon
Dans ma mémoire ta guitare résonne…
Dans les rues d'autrefois
"Yesterday" ne s'oublie pas
Liverpool c'est fini
Une chanson d'amour me dit "Love, love"
L'Angleterre aimait tant
Quatre garçons dans le vent
Quelque part dans le ciel
Un ange a écrit
"Adieu Lennon"
Toi qui joues sur des pianos électriques
Personne ici n'oubliera cette musique
Je salue ton époque, toi qui nous quittes
Adieu Lennon
Adieu Lennon
Adieu, adieu, adieu, adieu, adieu Lennon
(What do you do can the rock born right)
(I got a song )
(What you're alright can the city drive)
(Ouh, I got a song)
Adieu, adieu, adieu, adieu, adieu, adieu, adieu Lennon
Adieu Lennon ».

« Il y a trop de larmes dans ce monde en délire… »,
Euphémisme pour dire, après l’assassinat de Lennon,  face aux menaces terroristes, trop de violence.
Quelques semaines avant l’assassinat de John Lennon, en effet, le vendredi 3 octobre 1980, soir du shabbat et jour de la fête juive de Sim'hat Torah, a eu lieu un attentat à la bombe dirigé contre la synagogue de l'Union libérale israélite de France, rue Copernic, alors qu’un grand nombre de fidèles se trouvait dans ce temple. Ce fut le premier attentat contre les juifs en France depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
C’est à la suite de ces événements que Jean Albertini et Didier Barbelivien ont écrit pour Michèle Torr J’en appelle à la tendresse.  Lettre ouverte en face B. 


Elle a « le cœur d’une femme » et on lui donne « les mots pour le dire » :
« Je n'ai jamais chanté que des chansons rose bonbon
Il y a un temps pour tout et c'est très bien
Je ne regrette pas d'être descendue dans la rue
Mais aujourd'hui, tu sais, n'en parlons plus
Je ne jugerai pas quelqu'un à travers ses chansons
À chacun ses idées peut-être bien
Le France ou le Potemkine sont des bateaux, bien entendu
Mais aujourd'hui, c'est vrai, n'en parlons plus
Le succès d'un chanteur est comme celui d'un boxeur
Il a trois minutes pour toucher au cœur
J'ai pas toujours gagné, c'est le destin qui l'a voulu
Mais aujourd'hui, c'est vrai, n'en parlons plus


Pas facile d'être une star, j'ai toujours envie de chanter
Pour moi c'est un plaisir, pas un métier
Pour me sophistiquer, laissez tomber, peine perdue
Mais aujourd'hui, c'est vrai, n'en parlons plus
J'ai eu des aventures, quelques amours et des chagrins
Je ne suis pas la seule, je le sais bien
Pour chacun d'entre nous, jardin secret et rien de plus
Mais aujourd'hui, merci, n'en parlons plus
Je suis femme avant tout, j'aime les hommes et les enfants
Je sais que ma vie n'a rien d'étonnant
J'habite à la campagne avec Émilie et Romain
Et parlons-en si vous le voulez bien
J'habite à la campagne avec Émilie et Romain*
Oui, parlons-en si vous le voulez bien ».


Dans la pochette où l’on voit la chanteuse parmi les chevaux blancs de la Camargue qu’elle aime tant, sous un ciel « rose et bleu lavande », un album simple et tendre encore (Ma mère a pleuré, Maman la plus belle du monde, Doucement) face à un monde  hostile qui nous Moody Blues.
La Pologne, créée sur la scène de l’Olympia le 30 novembre 1982, viendra compléter ces chansons au ton plus grave que la plupart des faces B des années précédentes.

* « …J’habite Aix-en-Provence tout près d’Emilie et Romain
Et parlons-en si vous le voulez bien… ».Cela suffirait à la remettre dans l’actualité…


De même qu’il y a eu Elle et Lui, il y a eu, en août 1982,  Le vagabond du soleil, face B de A faire pleurer les femmes, en écho - peut-être - à la Petite fille su soleil chantée par Christophe en 1975.
« Petite fille du soleil
Le matin va venir
Petite fille du soleil
Je dois partir
Petite fille du soleil
Je garde en souvenir
Petite fille du soleil
Nos délires
D'autres envies d'autres rêves
Viendront dormir dans tes nuits
Déjà le jour se lève
Comment te dire que tout est fini?
Tout est fini
Petite fille du soleil
Le matin n'attend pas
Petite fille du soleil
Non ne pleure pas
Petite fille du soleil
Surtout ne m'en veux pas
Petite fille du soleil
Oublie-moi
D'autres désirs d'autres fièvres
Viendront brûler dans ta vie
Pourquoi me dire "Je t'aime"?
Demain je serai loin d'ici
Bien loin d'ici
Petite fille du soleil
Le matin va venir
Petite fille du soleil
Je dois partir
Petite fille du soleil
Je garde en souvenir
Petite fille du soleil
Nos délires
Petite fille du soleil
Le matin n'attend pas
Petite fille du soleil
Non ne pleure pas
Petite fille du soleil
Surtout ne m'en veut pas
Petite fille du soleil
Oublie-moi ».
(Paroliers : Daniel Bevilacqua / Didier René Henri Barbelivien)
«… A faire pleurer les femmes possède quelques relents de notre histoire, aussi. Quant au Vagabond du soleil, il pourrait bien être une réponse à la fameuse Petite fille du soleil, elle-même écrite cinq ans plus tôt par le même Barbelivien. Toutes ces allusions amusaient beaucoup Albertini* qui, rappelons-le, m’avait connue par l’intermédiaire de Christophe dont il était alors le producteur »,
Michèle Torr, La couleur des mots, Jacques-Marie Laffont Editeur, 2005.
* Producteur de Michèle Torr entre 1973 et 1990.


« Le vagabond du soleil ne parlait pas d'amour
C'était plus fou que ça
Le vagabond du soleil vivait au jour le jour
Mais vivait comme un roi
Il arrivait d'un nouveau continent
Il racontait des légendes aux enfants
Il n'avait que son cœur et sa guitare
Souviens-toi de son histoire
Le vagabond du soleil libre comme un oiseau
Venait dormir chez toi
Le vagabond du soleil regardait les bateaux
Mais ne voyait que toi
Tu lui parlais de ta vie, de ta ville
Il dessinait les montagnes du Brésil
Il te disait "Liberté, mon amour"
Tu te souviendras toujours
Du vagabond du soleil
Ses yeux noirs te rappellent
Qu'il n'a été pour toi
Qu'un vagabond du soleil
Couché dans ton sommeil
Les nuits où tu ne dors pas
Un vagabond du soleil
Couché dans ton sommeil
Comme l'été qui s'en va
Il était toujours fidèle aux rendez-vous d'amour
Il t'attendait déjà
Ce vagabond du soleil, les filles tournaient autour
Mais il n'aimait que toi
Il t'a promis l'océan et les roses
Il t'a dit "Viens, je connais autre chose"
Il a souri mais tu n'as pas compris
Ta vie n'était pas la vie
Du vagabond du soleil
Ses yeux noirs te rappellent
Qu'il n'a été pour toi
Qu'un vagabond du soleil
Couché dans ton sommeil
Les nuits où tu ne dors pas
Un vagabond du soleil
Couché dans ton sommeil
Comme l'été qui s'en va ».
Si c’est le vagabond qui parle à la petite fille dans la chanson de Christophe, c’est une autre personne qui s’adresse à elle dans la chanson de Michèle Torr : une amie, une sœur, une mère… Une mise à distance dans un dialogue en chansons qui ne fut possible qu’au-delà du temps… Mais il paraît donc que ce n’était qu’un jeu et que cela ne rendait absolument pas compte de l’état d’esprit de la chanteuse à l’époque. Et si la première a été un tube, la deuxième est restée bien cachée en son verso et ne réclame peut-être aujourd’hui que la lumière… du soleil.


Après les quatre semaines passées à l’Olympia en novembre et décembre 1982, Michèle Torr commence l’année 1983 avec une reprise d’un énorme tube de Louise Tucker, Midnight Blue, qui devient Midnight Blue en Irlande et, en même temps, le cinquième plus grand succès de Michèle, dont il s’écoule 250 000 exemplaires. Ainsi s’achève la décennie (de 1973 à 1983) au cours de laquelle elle aura vendu le plus de quarante-cinq tours alors, que pendant toute cette période et encore pour quelques années, ce sont ses trente-trois tours qui se vendront le mieux, se transformant systématiquement en disques d’or ou de platine.


Voici pour mémoire, selon Charts in France, le Top des ventes de quarante-cinq tours ou singles de Michèle :
Emmène-moi danser ce soir, 650 000 exemplaires,
J’aime, 502 000,
Lui, 400 000,
Discomotion, 325 000,
Midnight blue en Irlande, 250 000,
Cette fille c’était moi,  210 000,
Quand un homme a du charme, 196 000,
J’en appelle à la tendresse, 180 000,
Je m’appelle Michèle,  170 000,
Une vague bleue,  169 000,
Une petite française,  150 000,
Il viendra, De l’amour,  125 000,
Pendant l’été,  La séparation, Petit papa Noël, 120 000,
Un disque d’amour, 109 000,
Un enfant c’est comme ça,  70 000. 
Alors, bien sûr, comme elle n’a jamais été classée au Top 50 qui a été créé en novembre 1984, on considère trop souvent Michèle Torr comme une vedette des années 60 et 70 seulement, alors qu’elle a vendu beaucoup de disques dans la première moitié des années 80. C’est même son Olympia 83 (en fait de décembre 82) qui constitue sa plus forte vente de trente-trois tours.
En face B de  Midnight Blue en Irlandeaprès J’aime ou Je t’aime tendrement, on trouve… Je l’aime, également présente sur l’album Midnight Blue en Irlande, avec Le vagabond du soleil, L’homme à la moto jusque là inédit en France ou encore Ceux du parking, qui fut le générique de la série télé Joëlle Mazart au printemps précédent. Suite de Pause café, avec Véronique Jannot dans le rôle d’une assistante sociale. Un instrumental en face B. Mais aussi Ile, une reprise d’une chanson de Jean-Michel Caradec, Change la vie, Si on m’avait dit qu’un jour ou Histoire d’aujourd’hui sur le thème de La séparation


Je l'aime, c’est une liste de toutes les choses que l’amour peut nous amener à faire : le chanter aux cigales,  bâtir des cathédrales, se faire mal, dessiner des fleurs, s'en crucifier le cœur, le crier aux étoiles, en devenir sauvage, aimer les nuages, à rêver de son visage, à lui écrire mille pages, tout cela surtout sans faire de mal à celui dont on aime même les défauts, si tant est que des « allures provinciales » en soient un:
« J'aime un sourire, un parfum de charme
J'aime un souvenir couleur de larmes
C'est un rêve, un crime, un cri
Une maladie de vouloir aimer ainsi… ».
Rien de mémorable dans cette chanson.


Et puis à l’automne 1983 sortira un nouveau quarante-cinq tours : Adieu. Mais très vite Michèle Torr se lasse de chanter cette chanson qui ne retient pas non plus beaucoup l’attention des radios alors qu’elle était  belle  et mériterait peut-être d’être redécouverte:
« Adieu
Quand il y aura des larmes dans tes yeux
Quand tu auras le cœur un peu plus vieux
Quand tu auras la voix qui tremble un peu
Adieu
Quand tu te trouveras seul sur un banc
À regarder passer tous les amants,
À regarder s'aimer quelques enfants
Qui oublieront le temps qui passe
Adieu ...
Tu seras seul avec ta croix
Les yeux baissés, le cœur sans joie
Il suffirait d'un mot de toi
Alors, oublie et viens près de moi
Adieu
Bien sûr, pour toi, il faut que l'on se quitte
Mais, tu sais, je dis les choses un peu trop vite
On n'a jamais l'amour que l'on mérite
Adieu
Quand le vent et la pluie te feront peur
Et que tu n'auras rien contre ton cœur
Et que tu seras seul avec tes pleurs
En écoutant le temps qui passe
Adieu ...
Tu seras seul avec ta croix
Les yeux baissés, le cœur sans joie
Il suffirait d'un mot de toi
Alors, oublie et viens près de moi
Adieu
Pourquoi partir ? Tu n'en as pas envie
Pourquoi me dire des mots de nostalgie ?
Pourquoi mentir à l'heure où tu m'oublies ?
Adieu
Tu aimeras des femmes et des chansons
Mais c'est dans mon cœur qu'il y a ta maison
C'est dans mes yeux qu'il y a l'horizon
De vivre tout ce temps qui reste
À deux ... ».


Et c’est la face B de ce disque qui est devenue un tube présent dans les hits-parades et dans tous les tours de chant à venir: A mon père.  
« Cet homme du midi de la France
Ce baladin de la Provence
Ce facteur du courrier du cœur
Qui a toujours fait mon bonheur
Il chante avec la même voix
Des souvenirs qui sont en moi
Mon père, oh oh oh mon père
Mon père, oh oh oh mon père
Papa je t'appelle Papa
Mon père quand je pense à toi »,
Alors celle-là, personne n’a pu l’oublier…


L’album A mon père / Adieu paru dans la foulée contient aussi de belles chansons comme La demoiselle ou Romantique féminine  que Michèle, invitée d’honneur de Michel Drucker pour une émission d’exception,  a chantées lors du Champs Elysées spécial 31 décembre 83 au cours duquel elle en interpréta -fait exceptionnel- six, mais aussi La princesse aux pieds nus, Ma ville d’enfance  et surtout Maman, que Salvatore Adamo lui a offerte et qu’elle a enregistrée en duo avec sa fille Emilie.


Le début de l’année 1984 voit paraître deux quarante-cinq tours de Michèle Torr: Le voyage en bateau, une jolie chanson de Jean-Jacques Debout, pour la bande originale du film Les parents ne sont pas simples cette année:
« Ah! mon Dieu qu’il était beau
Courant au fil de l’eau
Le voyage en bateau…
Ah ! mon Dieu qu’il était grand
Mon ami l’océan
Dans tes rêves d’enfant…
Quand on s’aime on peut bien faire
Tout le tour de la Terre
Sans quitter la rivière… »,
et Pas bien dans sa vie, qui a déjà fait l’objet d’une « redécouverte » puisque, à la demande de son public, elle a figuré dans le tour de chant du spectacle de l’Olympia 2011, avec,  en face B, La province.
« C'est une maison de lierre
Qui nous attend un jour
Avec des murs de pierre
Et ses rideaux velours
La province, la province
C'est un clocher qui sonne
Et un banc qui s'ennuie
C'est un ciel de Provence
Et la Bretagne en pluie
La province, la province
J'y parlerai d'amour avec mes cheveux blancs
Verrai passer les jours et grandir mes enfants
Je relirai encore l'histoire du Petit Prince
En province, en province
J'ai vécu dans la ville aux lumières de béton
Dans des automobiles loin du cœur des piétons
De province, de province
J'irai revoir les fleurs et chanter des chansons
Assise au bord d'un lac
A la morte saison
En province, en province
J'y rêverai d'amour et j'aurai dix-huit ans
Au fond d'un champ de blé
Ou au bord d'un torrent
Elle a le cœur d'un homme et des allures de prince
La province, la province
C'est une maison de lierre
Qui m'attendra un jour
Avec un cimetière
Au point de non retour
La province, la province
J'y vois René Fallet, Brassens et Aragon
Des bouteilles de vin aux parfums des moissons
En province, en province »,
Jolie chanson sur le temps qui passe et l’expression d’un désir, à l’époque, en voie de se concrétiser : quitter la région parisienne pour aller s’installer… en Provence. Y retrouver l’essentiel.
Une chanson de Jean Albertini et Didier Barbelivien qui gagnerait à être revisitée, avec l’orchestration la plus simple possible, en piano-voix, que l’on retrouve sur l’album Donne-moi la main, donne-moi l’amour, reprise d’une chanson de Mike Oldfield. Face B du quarante-cinq tours : Et si c’était à refaire.


« C'est vrai qu'on espérait un autre paradis
Je me suis arrachée de ta vie
C'est vrai, tu avais tout fait pour me faire rêver
Rien à reprocher
Depuis j'ai fait des safaris appartements
Séisme affectif côté sentiment
C'est vrai, on va chercher toujours beaucoup trop loin
Son premier matin
Et si c'était à refaire
Tu sais, je recommencerais
À t'aimer comme à dix-sept ans
Force quinze dans mon cœur d'enfant
Et si c'était à refaire
Tu sais, je recommencerais
À jouer avec tous les feux
Pour me retrouver dans tes yeux
Si bleus
C'est vrai que le plus pur de tous les sentiments
Peut souvent rester caché longtemps
Ce soir je veux me retrouver tout comme avant
Et vivre un roman
Et si c'était à refaire
Tu sais, je recommencerais
À t'aimer comme à dix-sept ans
Force quinze dans mon cœur d'enfant
Et si c'était à refaire
Tu sais, je recommencerais
À jouer avec tous les feux
Pour me retrouver dans tes yeux
Si bleus
Et si c'était à refaire
Tu sais, je recommencerais
À jouer avec tous les feux
Pour me retrouver dans tes yeux
Si bleus.»


Et celle-ci pourrait bien être, par son titre même, le titre-phare d’un disque dans lequel Michèle Torr réenregistrerait les chansons méconnues de son répertoire et les faces B de ses quarante-cinq tours qui ont eu le plus de succès. Et la chanteuse, plutôt que tout recommencer à l’identique, de s’inventer un roman dans lequel elle aurait choisi de mettre en lumière ce qu’elle a caché dans son répertoire. D’autres chansons, qui auraient fait d’autres succès… d’autres soleils. C’est pourquoi Et si c’était à refaire pourrait même être le titre de cet album qu’elle est en train de préparer.
Et puis il y avait sur le trente-trois tours Donne-moi la main, donne-moi l’amour d’autres belles chansons : mais elle a déjà mis certaines d’entre elles en avant dans ses tours de chant : La couleur des larmes, le château des grisailles, à l’Olympia en 1987 et en 2011, mais aussi sur son double CD Portrait de scène, alors… Il ne reste, entre Minuit heure locale, T’es l’homme que j’aime, Papiers à fleurs, Mariage ou La pasionaria, guère que Le temps… Les mots d’une mère s’adressant à son fils de seize ans…


En 1985, après Un amour qui m’appelle, en face B de Chanson napolitaine,
« Quand le lilas blanc couvrira ma maison
Oh, oh, oh
Quand l'oiseau du vent viendra me dire son nom
Quand les étoiles de septembre brilleront dans le ciel
Je serai seule à entendre un amour qui m'appelle
Quand tous les violons parleront en silence
Oh, oh, oh
Quand toutes mes passions deviendront des romances
Quand le soleil de novembre brûlera mes dentelles
Je serai seule à entendre un amour qui m'appelle
J'aurai pour lui des cheveux blonds, un cœur tzigane
J'irai dormir pour lui au creux de la montagne
Je l'attendrai auprès du pont
Je l'entendrai murmurer mon prénom
Quand mes illusions renaîtront en Provence
Oh, oh, oh
Quand ces jours trop longs seront des rires d'enfance
Quand la lumière dans ma chambre sera couleur de miel
Je serai seule à entendre un amour qui m'appelle
J'aurai pour lui des cheveux blonds, un cœur tzigane
J'irai dormir pour lui au creux de la montagne
Je l'attendrai auprès du pont
Je l'entendrai murmurer mon prénom
Oh, oh, oh
Quand les étoiles de septembre brilleront dans le ciel
Je serai seule à entendre un amour qui m'appelle… »,
chanson « provençale » joliment rythmée, signée Albertini, Barbelivien et… Guy Mattéoni, plus proche de l’image de la chanteuse que la poussive face A, Michèle Torr décide de fêter, avec un an de retard puisque son premier disque est sorti en 1964, 20 ans d’amour


Avec un album de douze chansons, dont les deux dernières précédemment évoquées, et l’histoire d’une face A devenue face B.
Car la maison de disque a décidé de ne pas sortir de quarante-cinq tours en même temps que l’album, préférant attendre le choix des radios avant de commercialiser un single. C’était là la version officielle, mais en fait, Az avait envoyé aux radios un 45 tours hors-commerce dont la face A était Je t’aime encore (cosignée par C. Jérôme) et la face B 20 ans d’amour :
« Vingt ans, elle est adolescente
Notre aventure d'amour
Vingt ans que vos bras, vos mains vantent
Un rêve chaque jour
Vingt ans d'amitié, de tendresse
De désespoirs aussi
Feux de joie, fusées de détresse
Qui éclairent ma vie
Et ça fait vingt ans que j'aime
Envers et contre tout
Mes amis de la bohème
Je les fête avec vous
Mes vingt ans d'amour et c'est la nostalgie
Qui souffle et rallume les bougies
Vingt ans que la lumière joue
A maquiller mes peines
Que je suis la même partout
En ville comme en scène
L'amour s'est appelé plusieurs
Et je m'appelle moi
Quand je chante, écoutez mon cœur
Il couvre ma voix
Et ça fait vingt ans que j'aime
Envers et contre tout
Mes amis de la bohème
Je les fête avec vous
Mes vingt ans d'amour et c'est la nostalgie
Qui souffle et rallume les bougies
Vingt ans que je vis votre vie
Que vous vivez la mienne
Vingt ans, vos enfants ont grandi
Je sais, on a les mêmes
Votre maison de tous les jours, c'est un peu ma maison
Vos amours, ce sont mes amours, c'est vous ma chanson
Et ça fait vingt ans que j'aime
Envers et contre tout
Mes amis de la bohème
Je les fête avec vous
Mes vingt ans d'amour et c'est la nostalgie
Qui souffle et rallume les bougies
Qui souffle et rallume les bougies »
Signée Gilles Marshall et Claude Lemesle.


Mais l’album s’intitulait 20 ans d’amour, Je t’aime encore, Aventurier… et c’est ce dernier titre qui paraîtra en 45 tours début décembre avec, en face B, Je t’aime encore :
« Avec tes idées un peu drôles
C'est ce que j'ai toujours aimé
Du jour où je t'ai rencontré
Je t'aime encore
Tu jouais bien ton premier rôle
Je n'avais plus qu'à succomber
Je l'ai fait sans me faire prier
Je t'aime encore
Jours de soleil et jours de pluie
Ne comptaient pas dans notre vie
Nous ne connaissions pas l'ennui
Je t'aime encore
Et tout me semblait si joli
C'était un peu le paradis
Nous étions amants et amis
Je t'aime encore
Je t'aime encore
C'était pour moi la première fois
Ce sont des choses qu'on n'oublie pas
Je t'aime encore
Et si tu me le demandais je referais ce chemin-là
Tu as lu cent fois "L'étranger"
Mais tu devais lui ressembler
Solitaire dans la liberté
Je t'aime encore
La guitare que tu m'as laissée
Qui m'a toujours accompagnée
Aimerait bien me faire chanter
"Je t'aime encore"
Je t'aime encore
C'était pour moi la première fois
Ce sont des choses qu'on n'oublie pas
Je t'aime encore
Et si tu me le demandais je referais ce chemin-là
Nous avons connu des orages
Même parfois on en riait
Mais c'était là notre secret
Je t'aime encore
Et tant de nuits sans un nuage
Avec des mots qu'on inventait
Gravés dans nos cœurs à jamais
Je t'aime encore
Pourtant les années ont passé
Mais je n'ai jamais retrouvé
Un amour aussi passionné
Je t'aime encore
Combien de fois j'en ai rêvé
De tous ces moments égarés
À nous quitter, à nous aimer
Je t'aime encore
Je t'aime encore
C'était pour moi la première fois
Ce sont des choses qu'on n'oublie pas
Je t'aime encore
Et si tu me le demandais je referais ce chemin-là »,
une idée un peu drôle en effet; C. Jérôme aura plus de chance l’année suivante avec son tube Et tu danses avec lui, mais ces trois chansons montrent bien sur quelles pistes Jean Albertini pensait pouvoir faire évoluer le répertoire de Michèle Torr :le droit chemin, avec des chansons dans la ligne de celles qui avaient plu précédemment (Je t’aime encore), la voie des grandes chansons signées par de grands auteurs-compositeurs (20 ans d’amour) et celle de la modernité et de l’air du temps: Aventurier


« Quand je te vois comme ça caresser les étoiles
Et dresser des nuages qui n'explosent jamais
Je te voyais courir, petit prince en sandales
Comme le temps s'envole, comme la roue a tourné
Que tu es grand, mon fils
Que le temps passe vite
Le monde t'appartient
Et moi, je n'ai plus rien
La Terre est à tes pieds
Apprends bien à l'aimer
Apprends bien à m'aimer
Un p'tit peu s'il te plaît
Tu étais si petit et me voilà fragile
Le chemin fut si long et rempli de broussailles
Et de pluie en soleil, d'arc-en-ciel en chamailles
C'est dans tes yeux d'amour qu'elle est si claire ma vie ».
Il y avait aussi sur cet étrange album une seconde chanson intitulée Mon fils, après celle de 1980, une émouvante Chanson d’adieu, des mélodies aux sonorités très provençales : Petit Jean, Je reviendrai dans mon pays et Amour de ma jeunesse, un théâtral Reviens (reprise d’une chanson étrangère), et, signée, comme Le temps, Rodolphe Hassold, journaliste à France SoirUne mère d’autrefois, portant un regard critique sur les événements de 1968. Car Jean Albertini et son équipe avaient aussi pensé pour Michèle Torr à une voie… politique.
isque est sorti en 1964, 20 ans d’amour



Bref, un disque étrange, fiévreux, surprenant, en un mot déroutant. Qui méritait qu’on s’y attarde un peu.


1986. Trois quarante-cinq tours.
Un sur la « voie » politique (France, ton romantisme fout le camp), un sur la  « voie » moderniste (Amsterdam, adapté de l’énorme tube de Cora), et un sur la voie habituelle (Qui).
Avec successivement en face B Grace,
« Moi j’envie ces gens heureux
Ces compagnons secrets
Qui retrouvent auprès d’eux
La Dame de Beverley…
Grace
Où s’en vont tous ces oiseaux
Peut-être vers toi là-haut
O Grace 
Nous qui sommes encore en bas
Ne nous abandonne pas
Nous avons besoin de toi
De grâce»,
 hommage à Grace Kelly devenue princesse Grace de Monaco signé Pierre Delanoé, Et si plaisir d’amour, signé Christiane Mouron et Jean-Pierre Lacot,
« Tout ce qui fait danser, voler
Un jour fait partir et pleurer
Tout ce qui fait tomber, hurler
Fera sourire et pardonner
Et si plaisir d'amour
Ne dure qu'un seul instant
Je veux vivre un seul jour
Et mourir maintenant
Et si chagrin d'amour
Dure toute la vie
Je veux pleurer toujours
Pour mieux rire aujourd'hui
J' m'en fous de l'hiver
J' m'en fous de mourir
J' m'en fous de perdre
J' m'en fous de vieillir
D'être la plus belle
D'être en premier
J' m'en fous de la chance
J' m'en fous de gagner
Folle de la vie
Folle de l'amour
De tous les gens
De tous les fous
Folle du cœur
Folle tout court
De toi, de vous, de moi, de nous
Et si plaisir d'amour
Ne dure qu'un seul instant
Je veux vivre un seul jour
Et mourir maintenant
Et si chagrin d'amour
Dure toute la vie
Je veux pleurer toujours
Pour mieux rire aujourd'hui
J' m'en fous d'hier
J' m'en fous de l'avenir
J' m'en fous de l'enfer
J' m'en fous de souffrir
Du temps qu'il fait
Et des méchants
J' m'en fous de la peur
J' m'en fous de l'argent
Folle de la terre, des océans
De chaque fleur
De chaque enfant
Folle de la nuit
Folle du matin
Du vent, du vin
De tout, de rien
Et si plaisir d'amour
Ne dure qu'un seul instant
Je veux vivre un seul jour
Et mourir maintenant
Et si chagrin d'amour
Dure toute la vie
Je veux pleurer toujours
Pour mieux rire aujourd'hui»,
et Dans ma vie, composée, comme Juillet août à Tahiti en 1980, par … Romain Vidal. 


« Dans ma vie
J'ai vu des fleurs pousser en hiver
Et des soleils briller sans lumière
J'ai vu des enfants partir en guerre
Je n'avais pas tout vu dans ma vie
J'ai vu pleurer un soir de Noël
Un inconnu qui cherchait le ciel
J'ai vu trembler la tour de Babel
Je n'avais pas tout vu dans ma vie
J'ai vu tant de gens qui manquaient d'argent
Quand d'autres habitaient des murs de diamants
Que je croyais vivre à côté du temps
Ma vie faite de joie et de peine
Je la vis, c'est la mienne
Qu'importe où le vent m'entraîne
Ma vie moitié souffrance et poème
Je la vis, c'est la mienne
Si tu ne me dis pas "Je t'aime"
Qui me le dira ?
Dans ma vie
J'ai vu des rois vivre malheureux
Et des mendiants mourir orgueilleux
J'ai vu la croix brûler dans le feu
Je n'avais pas tout vu dans ma vie
J'ai vu l'amour se mettre à genoux
Et des agneaux qui mordaient des loups
J'ai vu tomber les roses de Corfou
Je n'avais pas tout vu dans ma vie
J'ai vu tant de gens qui manquaient d'argent
Quand d'autres habitaient des murs de diamants
Que je croyais vivre à côté du temps
Ma vie faite de joie et de peine
Je la vis, c'est la mienne
Qu'importe où le vent m'entraîne
Ma vie moitié souffrance et poème
Je la vis, c'est la mienne
Si tu ne me dis pas "Je t'aime"
Qui me le dira ?
Dans ma vie
J'ai vu tant de choses qui ne valaient rien
Même des géants petits comme des nains
Je n'ai jamais trouvé mon chemin
Et je n'ai pas compris
Ma vie faite de joie et de peine
Je la vis, c'est la mienne
Qu'importe où le vent m'entraîne
Il me ramènera ».
Et là, on peut se demander si les faces B n’ont pas été plus marquantes que les faces A car, si France, ton romantisme fout le camp a fait brièvement son petit effet (pas forcément positif pour l’image de la chanteuse !), Amsterdam et Qui n’ont guère marqué les esprits et les mémoires. Par contre, Et si plaisir d’amour et Dans ma vie étaient déjà au programme de l’Olympia 87…
On trouve sur l’album, en plus des chansons déjà présentes sur les trois 45 tours qui l’ont précédé, Ne me prenez pas mon fils, Merci pour les mamans, Si tous les enfants du monde, Cendrillon rock, Le ciel s’en va,
« Quand le jour est mort
Qu’il ne reste rien
Que trois pétales de remords
Quand est gravé le mot fin
Sur les pages de l’amour
Le ciel s’en va
Le ciel s’en va… »,
 déjà chanté à l’Olympia en janvier 1987, mais aussi une petite merveille : Un mot de toi


« Moi je t’aime pour un cri un sourire
Une fleur sous le soleil ou la pluie
Pour les enfants à venir
Et le présent à écrire
Je t’aime pour un mot de toi
Moi je t’aime pour le temps qui s’en va
Pour tous les hommes et pour toutes les femmes
Pour la justice et la paix
Les fruits de la liberté
Je t’aime pour un mot de toi
Dès demain nous marcherons tous les deux
Nous ouvrirons notre porte à tous ceux
Qui oseront croire en l’amour
Que l’on construit jour après jour
Nous dessinerons dans le soir
La vie aux couleurs de l’espoir
Moi je t’aime pour le blé dans les champs
Le bleuet le coquelicot sous le vent
Pour la plaine la montagne
La ville et puis la campagne
Je t’aime pour un mot de toi
Moi je t’aime pour le bruit le silence
Pour les nuages et les océans
Les murs qui ne seront pas
Les arbres qu’on abattra
Je t’aime pour un mot de toi
Dès demain nous marcherons tous les deux
Nous ouvrirons notre porte à tous ceux
Qui oseront croire en l’amour
Que l’on construit jour après jour
Nous dessinerons dans le soir
La vie aux couleurs de l’espoir
Moi je t’aime pour un cri un sourire
Une fleur sous le soleil ou la pluie
Pour les enfants à venir
Et le présent à écrire
Je t’aime pour un mot de toi
Je t’aime pour un mot de toi…»,
Un mot de toi, 1986.
France, ton romantisme fout le camp, Amsterdam et Qui seront les derniers 45 tours parus chez AZ, label dont Michèle Torr avait été la première artiste.


En mai ou juin 1987, le président du fan-club de Michèle Torr avait annoncé, outre un dernier 33 tours de reprises chez Az et un changement de maison de disques, pour l’automne suivant, la sortie d’un nouveau 45 tours, Adieu photographe, dans le style d’Aventurier. Finalement cette chanson ne sortira pas. A-t-elle été enregistrée? On ne le sait  pas. Si tel était les cas, cela voudrait dire qu’il y aurait quelque part, dans quelque tiroir,  cette chanson, inédite… 


Car en 1987 et 1988, après l’Olympia et l’anecdotique album Chansons de toujours, le dernier paru chez Az (on aurait préféré un double album en public avec l’intégrale du spectacle de l’Olympia pour boucler la boucle en beauté!) les deux premiers albums parus chez Zone music, un label Charles Talar, I remember you (1987) et Je t’avais rapporté (1988), forment un vrai diptyque, et auraient d’ailleurs mérité une édition en double album.
En 1987, Michèle Torr, qui a quarante ans exactement, change donc de maison de disques, mais pas d’équipe (Jean Albertini, Didier Barbelivien etc), et le nouvel album est annoncé comme celui d’un retour en force. Belle pochette en noir et blanc, très soignée, très glamour : une pose un peu frileuse, un regard détourné, rêveur. Des chansons variées : un premier extrait très « classique » mais avec un refrain accompagné d’un saxophone un peu jazzy, omniprésent. C’est I remember you. Un exotique Carnaval à gogo, un Sixtees  au son live. Des chansons tristes et émouvantes aussi : Fleur de mai, surtout, une belle et douloureuse chanson de Noël qui rappelle que c’est le 28 décembre 1965 que Michèle Torr a perdu sa maman dans un accident de voiture.

Une chanson de Noël...


« À la Noël
Maman était très belle
Comme la poupée, au pied du sapin vert
Dis-moi pourquoi,
Je n'aime plus les Noëls
Ni les fêtes,
Ni les anniversaires
Quand j'ai grandi
Mes poupées ont vieilli
Dans un grenier
Ou dans l'oubli
Quand j'ai grandi
J'ai laissé sous la pluie
Tout un bouquet
De fleurs de mai
Drôle de printemps
Où le soleil m'attend
Avec la peur d'aimer
La peur de vivre
Et de temps en temps
Tous mes chagrins d'enfant
Sont comme des pages
Arrachées dans un livre
Quand j'ai grandi
Mes poupées ont vieilli
Dans un grenier
Ou dans l'oubli
Quand j'ai grandi
J'ai laissé sous la pluie
Tout un bouquet
De fleurs de mai
À la Noël
Maman était très belle...
Dis-moi pourquoi
Je n'aime plus les Noëls
La vie passe
Et rien n'est plus pareil »,
mais aussi Les mots pour te dire, signée Michèle Torr, en hommage à sa mère justement, qu’elle avait créée à l’Olympia en janvier de la même année, et Les choses de la vie, signée Romain Vidal pour la musique.


« Jouer sur un piano un adagio d’Albinoni
Toucher du bout des doigts une fleur qui vient à la vie
Rêver au bord de l’eau et même sous la pluie
Penser que tout est grand et que tout est joli
Parler tout doucement à un enfant avec son cœur
Aimer passionnément sans plus jamais compter les heures
Chanter au gré du vent sans jamais avoir peur
Donner en espérant pour un monde meilleur
Les choses de la vie sont une symphonie
Le jour et la nuit sont en harmonie
Tout est beau jusqu’à l’infini
Malgré ce monde en folie
Les choses de la vie sont une symphonie
Le jour et la nuit sont en harmonie
Tout est beau jusqu’à l’infini
Malgré ce monde en folie
Pleure ça fait partie de notre vie et pourquoi pas ?
Danser avec celui qu’on a choisi un soir comme ça
Garder des souvenirs et des secrets pour soi
Fermer son cœur à qui ne le mérite pas
Les choses de la vie sont une symphonie
Le jour et la nuit sont en harmonie
Tout est beau jusqu’à l’infini
Malgré ce monde en folie
Les choses de la vie sont une symphonie
Le jour et la nuit sont en harmonie
Tout est beau jusqu’à l’infini
Malgré ce monde en folie… ».


Mais c’est en écoutant les autres chansons qu’on comprend le concept : les lèvres rouges d’abord, dessinées sur la photo en noir et blanc, sont un sourire, et ce disque est en fait une parodie : Michèle se moque doucement d’elle-même et de la chanteuse aux chansons « rose bonbon » qu’elle est devenue et à laquelle se réduit injustement son image. Par ailleurs, elle a pris l’habitude de clore ses albums par une chanson « rouge passion », très lyrique, un brin excessive, qui traite de la passion amoureuse de façon parfois outrancière: Mélancolie femme en 1981, Romantique féminine en 1983 (face A), La passionaria en 1984, Reviens en 1985 …L’album I remember you est en fait construit sur l’alternance de chansons à prendre au premier degré, où prime une émotion non feinte, et d’autres au second : c’est le cas de I remember you , de C’est dur d’avoir seize ans,  repris l’année de ses quarante ans, de Et toute la ville en parle  où sont évoquées de façon très théâtrale les amours d’une star qui voit sa vie étalée dans les journaux. Cette chanson sera le deuxième extrait sorti en 45 tours, avec une pochette en forme d’article de journal; avec I remember you  elle  montre bien les deux faces de la vie d’une vedette : le glamour et le scandale, l’art et le saccage de la vie privée. Il y a aussi le très drôle Toi émoi  sur l’infidélité et comment la dépasser : on y entend dans les couplets une femme acrimonieuse, probablement trompée, qui accueille son mari dans l’entrée au moment où il rentre, en pleine nuit, et elle l’accable de reproches, tandis que dans le refrain, sont énumérés des titres de films dans lesquels la passion amoureuse est évoquée dans toute sa splendeur. Entre le quotidien et l’expression artistique l’écart est parfois grand ! Mais tant pis : « Same player  shoots again ! » dit la dame (car il n’y a pas de mal à se faire du bien).  Et pour finir le génial Tu ne vaux pas une larme  signé Torr/ Mecca, chanté avec une voix de tête surprenante, celle de la harpie faisant sans cesse des reproches à son mari, caricature et métamorphose de la gentille mère de famille d’Emmène-moi danser ce soir :
« Même ton chien est content que tu quittes la maison, même pas tes amis ne te réclameront ». Monsieur n’a pas la côte à la bourse de l’amour !
Les lèvres rouges étaient le symbole de cette autodérision. Mais qui l’a dit dans la presse ou à la télé ? Qui a salué cet album pour ce qu’il était vraiment ? Pas grand-monde, et c’est bien dommage. On a seulement pu lire dans Télé Poche, un article titré Michèle Torr : à 40 ans, je veux enfin vivre, dans lequel elle disait avoir chanté certains titres de cet album « pour [s]’amuser »…
Puis la promotion de Et toute la ville en parle  a vu se transformer les fausses larmes en vraies car, Michèle Torr l’a dit plus tard, elle voit dans sa chanson le reflet de sa vie et n’a plus le cœur à en rire ni à la chanter. Alors qu’elle aurait dû devenir l’un des plus gros tubes de Michèle, elle est reléguée à l’oubli …pour quelques mois, avant qu’elle ne soit reprise par Margaux.  Ou pour  quelques années, avant que Michèle ne reprenne elle-même « sa » chanson, « ma chanson », à l’Olympia, en 1996.
De même Tu ne vaux pas une larme  sera reprise sous le titre Dans le blues de l’amour  sur l’album Seule (1997), chantée très différemment, beaucoup plus bas, tout en puissance et en colère. Les paroles sont à peine retouchées : la bourse de l’amour devient le blues de l’amour, et la dame paraît beaucoup plus en colère, plus orageuse. Beau succès en concert pour cette chanson aussi drôle par le traitement du thème que forte scéniquement dans cette deuxième version. 


Deux 45 tours ont donc été extraits de cet album : I remember You avec en face B Carnaval à gogo :
« Un doigt de calypso
Un zeste de mambo
Dans un shaker en stéréo
Un peu de charango
Un filet de bango
Bien secoué dans le tempo
De l’alcool de coco
Faut ce qu’il faut
Dans l’Américano
La voix de Gilberto
Dans le cœur de Rio
C’est trop… »,
ou l’exotisme facile comme recette musicale, et Et toute la ville en parle avec en face B Les mots pour te dire :
 « Je n’ai pas les mots ma mère
Je n’ai pas les mots pour te raconter
Parler de ta voix
De ta joie de tes colères
Tu es lumière tu es mistral
Mais aussi caresse tendresse
Je n’ai pas les mots ma mère
Je n’ai pas les mots ma mère
Je n’ai pas les mots pour te raconter
Parler de tes yeux
Appel que je n’ai pas compris
Regard changeant ruisseau juste au bord de tes cils
Ma mère
Je n’ai pas les mots ma mère
Je n’ai pas les mots pour te raconter
Ma vie aujourd’hui
La maison dont tu as toujours rêvé
Le bonheur de chanter
C’est avec toi que je voudrais les partager
Je n’ai pas les mots ma mère
Je n’ai pas les mots pour te raconter
Mais je n’ai pas envie
Les mots sont inutiles
On ne raconte pas la lumière… »,
Les mots pour te dire, 1987.


    En 1988 est sorti  Je t’avais rapporté, deuxième disque, deuxième face du même concept : Michèle en smoking crème sur la pochette fait son cinéma : simulation d’une pellicule. Au verso, une photo dans une loge, robe noire (ce sont des tenues qui ressemblent beaucoup à celles de l’Olympia 87), séance coiffure. Le même graphisme, les mêmes lettres rouge passion pour le nom de l’artiste. Sur ce disque c’est sur la face A que s’enchaînent les parodies. Je t’avais rapporté  annonce la couleur : « Je t’avais rapporté des bouquets d’orchidées du plus rouge éclaté », « … des musiques nouvelles ». Je suis love , Sentiments , Passion fatidique  (avec une voyante guettant l’arrivée de l’homme idéal dans sa boule de cristal, les cartes et les astres avant…le suivant !), Puisque c’est un adieu  (très drôle, l’idée de la femme qui court après son amant en faisant le tour de la Terre … dans l’autre sens pour être sûre de le croiser à nouveau!), Je pense à vous  (face B et deuxième extrait en 45 tours) sont des chansons qui fonctionnent aussi bien au premier qu’au deuxième degré. 


Puis viennent des chansons plus intimistes et émouvantes : Où est ton étoile (magnifique hommage à Elton John :
« Où est ton étoile
Où est ton étoile
Toi qui chantes les Fleurs du mal en symphonie
Toi qui es piano
Toi qui sais les mots
Toi qui es dans cette vie
Un passant génial
Où est ton étoile
Où est ton étoile
Toi qui brilles comme toutes les stars à l’infini
Derrière tes lunettes
Les yeux du poète
Toi qui es dans cette vie
Un dandy bizarre
Si les maisons de Yellow Break Road
Qui t’ont connu enfant
Te revoyaient quand tu rôdes
Perdu dans ton smoking blanc
Au petit jour
Sur quelles mélodies
Rêves-tu la nuit ?
Quelle musique ! Merci.
Sur quelle harmonie
Vois-tu la vie,
Quel accord choisi ?
Où est ton étoile
Où est ton étoile
Toi qui joues avec le soleil à minuit
Au cœur des studios
Le ciel est si beau
Tout est en harmonie quand tu te réveilles…
Si les maisons de Yellow Break Road
Qui t’ont connu enfant
Te revoyaient quand tu rôdes
Perdu dans ton smoking blanc
Au petit jour … »,
et quand on écoute la version originale de cette chanson d’Albert Hammond, Before you change the world, on prend un peu mieux la mesure du talent de Michèle Torr…
…Partir un jour, Le chemin de bohême et  l’étrange Touchez pas à ma ville terminent l’album.


Deux extraits en 45 tours donc: Je t’avais rapporté avec en face B Je suis love, chanson jazzy bien plus réussie qu’I remember You :
«Quand l’automne prend ses couleurs
Qu’un piano joue en mineur
Qu’un oiseau bleu sur la branche
Me dit que c’est dimanche
Quand j’attends au téléphone
La voix d’une seule personne
Que les nouvelles du matin
Me disent que tout va bien
Quand il y a dans la musique
Un feeling romantique
Quand il y a dans le silence
Des mots d’amour qui dansent
Je suis love love love tendrement
Rien n’est plus important
Je suis love love love pour toujours
Une femme devant l’amour
Je suis love love love avant tout
Je suis love jusqu’au bout… »,
et Je pense à vous, avec en face B Sentiments


« Et tous les Mozart de la Terre
Entière
Jouent un concerto solidaire
Super
Sur notre histoire d’amour vécue sans heurts
Comme au premier quart d’heure …
Et tous les violons de la Terre
Entière
Jouent un adagio solidaire
Super
Sur notre histoire d’amour vécue sans faille
Sans violence ni bataille».
Lyrique !


Zone music ne donnera ensuite le jour qu’à deux 45 tours de Michèle Torr.
En 1989 d’abord, ce sera Argentina, qui sortira à l’automne, en même temps que le dernier 33 tours vinyl de la chanteuse ; c’est une simple compilation de 10 titres, dont 8 issus des deux albums précédents, et comportant deux inédits : Argentina et, en face B, Le temps qu’il faudra.


Ce disque était censé annoncer un retour à Paris pour deux semaines sur la scène de l’Olympia, en janvier 1990, mais la vie va en décider autrement.  En effet on apprend par la presse que la chanteuse est souffrante. On craint un cancer mais, malgré le démenti très vite apporté, après une lourde opération et des analyses qui révèlent que la tumeur était bénigne, beaucoup garderont en mémoire l’idée que la chanteuse a combattu -et vaincu- un cancer. Il n’empêche, l’Olympia devra être annulé, de même que la promotion d’Argentina.
Et tout le monde aura compris qu’entre Michèle Torr et Jean Vidal, malgré les images d’Epinal d’un bonheur retrouvé, rien ne va plus.
Victime de l’amour sortira au printemps 90, avec en face B… la version instrumentale de la face A.
Et, pendant l’été suivant, c’est l’annonce du divorce entre Michèle Torr et Jean Vidal qui fera la Une de la presse populaire.
Après cela, la chanteuse se retrouve seule, sans impresario, sans maison de disque (Zone music), sans directeur artistique (Jean Albertini), avant d’apprendre qu’elle est lourdement endettée.
Pour se reconstruire, il lui faudra… le temps qu’il faudra.
« J’attendrai les trains les bateaux ou les avions
La pluie ou un arc-en-ciel
J’attendrai quelqu’un qui portera ton prénom
J’attendrai jusqu’au soleil
Mes nuits d’avril sont plus belles que mes jours d’ennui
Même sur une île j’attendrai aussi
 Le temps qu’il faudra
Les années ne comptent pas
Les matins d’été les soirs lilas
Je ne connais de saison
Que dans l’amour passion
Le temps qu’il faudra
Au cœur de la ville je serai là
A guetter les bruits guetter tes pas
Je ne connais de silence
Que dans l’amour patience
Le temps qu’il faudra
J’attendrai que sonne le tocsin du téléphone
La couleur d’un télégramme
J’attendrai quelqu’un qui ne sera sûrement personne
J’attendrai la petite flamme
Un rendez-vous dans un jardin ou dans un port
Même à genoux j’attendrai encore
Le temps qu’il faudra
Les années ne comptent pas
Les matins d’été les soirs lilas
Je ne connais de saison
Que dans l’amour passion
Le temps qu’il faudra
Au cœur de la ville je serai là
A guetter les bruits guetter tes pas
Je ne connais de silence
Que dans l’amour patience
Le temps qu’il faudra… ».


De cette période il reste aussi une compilation plus complète, intitulée Les choses de la vie, comportant des chansons de I remember You et Je t’avais rapporté, ainsi qu’ Argentina, Le temps qu’il faudra et Victime de l’amour.


C’est une année entière qu’il faudra à Michèle Torr pour revenir, après Victime de l’amour, sur le devant de la scène. Elle revient, en mai 1991, avec un 45 tours intitulé Ophélia, belle chanson, superbement arrangée, où le célèbre personnage shakespearien d’Ophélie, au moment de sombrer, trouve les mots les plus lyriques pour expliquer son triste naufrage. Car elle meurt, voyant qu’Hamlet, celui qu’elle aime, se préoccupe davantage de venger la mort de son père plutôt que d’elle…
« Oh, j'ai froid, j'ai chaud
Il fait si noir au fond de l'eau
La cage hantée
Je m'abandonne à tes baisers
Quelle était l'étoile de mon destin ?
La lune pâle dans ma main
Sèche les pleurs de mon malheur
Oh amour, je suis là
Dans ma tête, invisible et pourtant là
Oui, c'est moi Ophélia
La folie pas à pas te relie à ma loi… ».
Ce beau 45 tours paru chez Vogue sera le dernier vinyl commercialisé de Michèle Torr. Car le marché du disque est en train de changer et les ventes de 45 tours se sont effondrées. Les maisons de disque tenteront, sans grand succès, de mettre en vente des cassettes deux titres pour remplacer les 45 tours, mais aucune chanson de Michèle Torr ne sera commercialisée sur ce support.
Ophélia, dernier 45 tours de Michèle Torr, avec en face B Les femmes dansent. Une chanson tendrement féminine, légèrement féministe (féministe sans lourdeurs) signée, comme Argentina Michelle Agsen et Pierre Delanoë, avec Gérard Stern…  
« Les hommes inventent des machines
Mais par la volonté divine
La Terre tourne dans le même sens
Et les femmes dansent
Les enfants qui se font tout seuls
La vie de famille en trompe l’œil
Les petites filles n’ont plus d’enfance
Et les femmes dansent
Les femmes dansent
Dans la folie
Dans le silence
Dans la fureur et l’insolence
Sur tous les orchestres du temps
Comme le cœur avec le temps
Un seul droit celui d’être belle
Dans ce monde pour top model
Look fausse pudeur indécence
Et les femmes dansent
Le plaisir des amours galères
Les fins de nuit en solitaire
L’aventure part en vacances
Et les femmes dansent
Les femmes dansent
Dans la folie
Dans le silence
Dans la fureur et l’insolence
Sur tous les orchestres du temps
Comme le cœur avec le temps
La peur de l’ennui qui se maquille
Les rendez-vous secrets en ville
Le défi pour seule défense
Et les femmes dansent
Lancées sur une drôle d’autoroute
Elles n’ont qu’une réponse à leurs doutes
Une immense envie d’indépendance
Et les femmes dansent
Les femmes dansent
Dans la folie
Dans le silence
Dans la fureur et l’insolence
Sur tous les orchestres du temps
Comme le cœur avec le temps
Le cœur de plus en plus fragile
La bonne volonté ça se fatigue
Depuis deux mille ans d’indifférence
Que les femmes dansent
Les hommes inventent des machines
Mais par la volonté divine
La Terre tourne dans le même sens
Et les femmes dansent … »,
Les femmes dansent.


Car Ne m’oublie pas, l’une des plus belles et des plus intimes chansons de Michèle Torr :
« Puisqu'il est des blessures
Qui ne peuvent se dire
Plutôt que de mentir
Il valait mieux partir
Pour te laisser le temps
D'essayer de grandir
Pour me laisser le temps
D’oublier de guérir
Mais il est des douleurs
Que le temps n'efface pas
Quel que soit le jour, l'heure
Et quel que soit l'endroit
Ne m'oublie pas
Ne m'oublie pas
Ne m'oublie pas
Dans cette chambre j'ai laissé
Un peu de moi pur toi
Et si tu sais chercher
Tu me retrouveras
Juste à coté du cœur,
Où les mots ne vont pas
Pour que t'aies plus jamais peur,
Pour que t'aies plus jamais froid
Mais il est des couleurs,
Des parfums, des sourires
Qui se planquent au fond du cœur
Pour n'en plus ressortir
Ne m'oublie pas,
Ne m'oublie pas,
Ne m'oublie pas
Et si tout nous sépare
Et si tout nous déchire
J'veux pas que notre histoire
Comme ça puisse finir
Il ne te fallait pas jouer
Ace jeu avec moi
Maintenant faut s'aimer
Ou se faire mal,
C'est comme ça
C'est comme ça, mais
Ne m'oublie pas,
Ne m'oublie pas,
Ne m'oublie pas
Et s'il est des blessures
Qui ne peuvent s'écrire
Comment faire pour te dire
Comment si t'es pas là
Que ma vie sans toi se déchire
En silences, en petits bouts
L'amour ne peut mourir
Lorsque je pense à nous
Mais il est des douleurs
Que le temps n'efface pas
Quel que soit le jour, l'heure
Aussi loin que tu sois
Ne m'oublie pas,
Ne m'oublie pas
Moi j't'oublie pas,
J't'oublie pas
J't'aime »,
après un disque promotionnel envoyé aux radios, ne sera finalement pas commercialisé. 


« Je l’écarte avec les yeux
Il me revient par le cœur
J’ai voulu tourner la page
Pour une liberté mirage
Dans la folie de ce naufrage
Il m’a gardée en otage
C’est souvent ceux qui laissent
Qui sont seuls qui se blessent…
Comme on rêve de la mer
Au fond d’un désert
Je te cherche dans le noir 
Ton absence m’assassine
Je suis devenue anonyme
C’est souvent ceux qui laissent
Qui sont seuls qui se blessent…
Je dessine du bout des doigts
Ton corps encore dans mes bras
Je tourne en rond je crie ton nom
Prise au filet de notre histoire
Prise au filet de ton regard
Beau comme un diamant noir 
Quand coulaient sur ma peau
Les mots qui tiennent chaud
Comme on rêve de la mer
Au fond d’un désert
Je te cherche dans le noir 
Ton absence m’assassine
Je suis devenue anonyme
C’est souvent ceux qui laissent
Qui sont seuls qui se blessent…
Je te ferais des aveux
A t’en faire fermer les yeux
T’apprivoiserais mes peurs
A m’en faire battre le cœur
C’est souvent ceux qui laissent
Qui sont seuls qui se blessent…
C’est souvent ceux qui laissent
Qui sont seuls qui se blessent…».


Le disque comportait, en face B, Ceux qui laissent, une autre chanson dont, quand on en relit les paroles en se rappelant ce que la presse a laissé transparaître de la séparation douloureuse de la chanteuse et de son mari, on voit bien qu’elle était tout aussi personnelle que Ne m’oublie pas.
C’est aussi la banale histoire d’une femme qui, découvrant la trahison de celui qu’elle aime encore, décide de s’en aller… A moins que ce ne soit elle, aussi, qui a trahi. 


Ceux qui laissent fait partie, avec Ne m’oublie pas, Ophélia, Danger liaison, Vague à l’homme et Les femmes dansent, des plus belles chansons d’un disque par lequel on voyait avec grand plaisir se renouveler en profondeur le répertoire de Michèle Torr. Du fait de chansons moins fortes, telles Rentrer sur scène, Vivre dans l’instant qui ont été pourtant présentes dans certains tours de chant, ou Ma vie avec toi et Voir Venise et repartirVague à l’homme était un disque inégal mais très personnel, et les arrangements, dont certains étaient signés Carolin Petit, superbes. Dommage qu’il n’ait pas eu, malgré de multiples émissions télé, plus d’impact.


C’est chez Az, après cette brève - et pas très heureuse sur le plan contractuel - parenthèse chez Vogue, que revient Michèle Torr en 1993. Avec un magnifique album, très homogène mais d’une grande diversité musicale, intitulé A mi-vie. L’année de ses 46 ans.
Foin de la nostalgie,
« Quand on sait ce qu’on sait…
Qu’on a été brûlé
Par différents soleils …
Tout reste à dire
Tout peut revenir
Tout peut se donner
Tout recommencer » chante donc une femme qui renaît à la vie et nous offre une belle leçon d’optimisme dans un disque intensément joyeux, tout gorgé de lumière.
 Un disque solaire, dont la plupart des textes, fruits de longues discussions entre la chanteuse et le parolier, sont signés Pierre Grosz. Les arrangements et plusieurs mélodies sont de Gérard Daguerre qui avait déjà travaillé pour elle sur l’album Emmène-moi danser ce soir. C’est probablement un de ses plus beaux albums et à coup sûr l’un des plus personnels.
Dans cet album, la Belle Michèle Torr du temps présent évoque aussi tout ce qui, à ce moment de sa vie de femme, la rend heureuse :
- sa fille qui peu à peu devient adulte (Je serai ton amie),
- sa Provence (Fanny sur le port et Mon sud),
- la musique qui console après la peine :
« Je fermerai la porte
J’amadouerai mon chagrin
Jusqu’à ce que le soleil m’apporte
Un nouveau matin »
Dans la maison du blues,
« Où même les musiques tristes me caressent comme de la soie »,
- les enfants et la leçon de vie qu’ils lui donnent (J’apprends de vous),
- l’amour avec L’homme en or (variation rock sur le thème de la recherche du prince charmant), Si je t’aime (une déclaration), Quand on n’a que l’amour (autre hymne, de Brel celui-là) :
« Quand on n’a que l’amour
Pour peupler de merveilles
Et couvrir de soleil
La laideur des faubourgs… »,
mais aussi La prière sévillane (qui parle d’amour maternel)…
- et le soleil.
Mai qu’apprend-on, du côté du soleil ? Qu’une fois essuyés les pleurs, balayés les doutes et les regrets, il ne faut pas rester caché dans un presque sommeil, il faut trouver l’énergie d’aller se retrouver, de rallumer sa vie
« Au soleil de quelqu’un
De quelqu’un ou des autres
Et en allant vers eux
Leur lumière et la nôtre
nous fait briller les yeux ».
Il faut s’émerveiller de danser, et même de tomber avec la pluie… Car c’est cela aussi, la vie ; et le bonheur, ça se cultive. C’est un état d’esprit.
De ce si bel album seront extraits trois CD 2 titres (équivalents provisoires des 45 tours dont la diffusion s’est définitivement arrêtée) : A mi-vie en avril, Mon sud en juin et La prière sévillan(n)e en septembre, avec, en deuxième titre, équivalant aux face B des 45 tours, successivement : 


-Dans la maison du blues,
« Il y a une chambre
Dans la maison du blues
Où j’aime descendre
Quand mes amours se décousent
Quand mon cœur a mal
Au lieu de pleurer moi je chante
Et quand je me réveille
Mon âme est neuve et innocente
J’allais là-bas
Dans la belle maison du blues
Avant mes tendres tendres tendres nuits avec toi
Je refermais la porte
J’amadouais mon chagrin
Jusqu’à ce que le soleil m’apporte
Un nouveau matin
C’était avant ces heures
Où nos lèvres et nos cœurs s’épousent
Où même les musiques tristes
Me caressent comme de la soie
Mais comme la vie m’a appris
La vie m’a appris
Que rien ne nous est jamais acquis
Que rien ne dure toujours
Je sais qu’on va se quitter un jour
Et alors moi j’irai dans la maison du blues
Où j’aime descendre
Quand mes amours se décousent
Je refermerai ma porte
J’amadouerai mon chagrin
Jusqu’à ce que le soleil m’apporte
Un nouveau matin
Oui comme la vie m’a appris
La vie m’a appris
Que tout ce qui commence
Un jour ça finit aussi
Moi j’irai faire un tour là-bas
Dans la maison du blues
Me ressourcer
Dans la maison du blues
Je penserai à nos amours
A en rendre les colombes jalouses
Comme je l’ai fait avant toi
Dans la maison du blues
Avant que tu sois à moi
Avant que nos cœurs s’épousent » ;


- Je serai ton amie,
 « Quand tu me diras y’a trop d’étoiles
Pour que je dorme dans la nuit
Rencontré un garçon génial
Envie de dormir avec lui
Ma fille je serai ton amie…
Quand tu me diras j’ai trop de larmes
Pour tenir dans un cœur de fille
On s’est quittés je rends les armes
Dans mon futur plus rien qui brille
Ma fille je serai ton amie…
Je serai ton amie
A la bonne distance
Sans violer les silences
Où tu te réfugies
Je serai ton amie
Quand j’aurai une chance
Si du moins tu le penses
De t’aider dans la vie
Je serai ton amie
Et quand pour ton premier travail
Planeront sur toi les soucis
Quand tu seras dans les batailles
Qu’on doit livrer tous aujourd’hui
Ma fille je serai ton amie …
Quand tu penseras je t’aimerais pareil
Si tu n’étais pas ma famille
Et dans le ciel moi je surveille
Pour voir si ta bonne étoile brille
Ma fille je serai ton amie …
Et s’il t’arrive aussi un jour
De celui que tu vas choisir
Un bébé né de votre amour
Qui comblera tous vos désirs
Ma fille je serai ton amie
Je serai ton amie
A la bonne distance
Sans violer les silences
Où tu te réfugies
Je serai ton amie
Quand j’aurai une chance
Si du moins tu le penses
De t’aider dans la vie …
Tu sauras ce que ça veut dire
Et que ce n’est pas des broutilles
De chuchoter dans un sourire
A un bout de vie qui babille
Ma fille ; je serai ton amie
Je serai ton amie
A la bonne distance
Sans violer les silences
Où tu te réfugies
Je serai ton amie
Quand j’aurai une chance
Si du moins tu le penses
De t’aider dans la vie… »,


- et Fanny sur le port.
chanson consacrée au personnage de Fanny créé par marcel Pagnol dans la trilogie Marius – Fanny – César,  qui évoque l’attente et les inquiétudes de la jeune femme après que celui qu’elle aime (Marius) s’est embarqué sur un bateau pour exercer ainsi le métier dont il rêvait, alors qu’elle est restée, à sa place, auprès du père de son amoureux,  afin de l’aider à gérer le café qu’il tient sur le Vieux port de Marseille ;
«D’un café rouge et vert dans le quartier du port
Chaque jour je t’écris mais rien que dans ma tête
Puisque je ne sais pas où te poster mes lettres
Et si de ton côté tu m’oublies je l’ignore
Mes larmes ont la douceur salée de nos baisers
Quand on se retrouvait là-bas dans les calanques 
Je regarde le soleil doucement s’en aller
Un peu plus chaque jour mon amour tu me manques
Je pense encore encore                           
A ta bouche à ton corps
A ta peau sur la mienne
A tes mais qui me tiennent
A tes bras tes épaules
Quand le bonheur nous frôle
Où es-tu à cette heure
Se demande mon cœur
Idiot qui ne sait pas
Combien je meurs de toi
Au bout de l’océan
Je t’aime et je t’attends
Ton père va et vient il est comme d’habitude
Il bougonne à son bar il m trouve bien pâle
Ton prénom est présent dans nos deux solitudes
Et chacun de nous deux sait bien que l’autre a mal
Mais toi sur ce trois-mâts lourd de bois des Antilles
Et de camphre et de poivre où tu rejoins tes rêves
As-tu perdu de vue naviguant d’île en fille
Nos soirs de grands secrets et le goût de mes lèvres ?
Je pense encore encore
A ta bouche à ton corps
A ta peau sur la mienne
A tes mais qui me tiennent
A tes bras tes épaules
Quand le bonheur nous frôle
Où es-tu à cette heure
Se demande mon cœur
Idiot qui ne sait pas
Combien je meurs de toi
Au bout de l’océan
Je t’aime et je t’attends
Je regarde là-bas du côté de la mer
Et ne vois que les jours qui succèdent aux jours
Je ne pense qu’à toi et j’enroule pour toi
Ton prénom de tout plein de croix
Et je signe Fanny ta femme… ».


Trois magnifiques chansons sur un disque qui est évidemment celui de l’amour retrouvé.
« Et quand je dis je t’aime
Je dis vraiment je t’aime
Dans l’amour retrouvé
Dans l’amitié aussi…
Et celui qui me dit
Ne va pas prendre froid
Celui que j’espérais
Que je n’attendais pas
Est-ce que c’est toi
A mi-vie
Là où je suis », 
« J’allais là-bas
Dans la belle maison du blues
Avant mes tendres tendres tendres nuits avec toi…
C’était avant ces heures
Où nos lèvres et nos cœurs s’épousent…
Avant que tu sois à moi
Avant que nos cœurs s’épousent »,
« C’est une femme très bien dans son temps
Dans les lilas bleus du printemps
Qui pique un fard en écoutant
Des mots tout neufs si vieux pourtant… »,
les mots de L’homme en or à qui elle susurre aussi :
« Si je t’aime c’est parce que je t’aime
Et peut-être ça ne s’explique pas… »,
et au risque d’être encore indiscret on notera parmi les choristes le nom d’un certain Philippe Lopez. Mais…
« Tout ce qui commence un jour ça finit aussi ».


1995. Second album chez Az deuxième période. Ce sera donc le dernier. C’est l’ex-journaliste Francis Dordor qui se trouve aux commandes du label et qui a l’idée de faire chanter de la country à Michèle Torr.
Vous retrouverez la malheureuse histoire de ce disque - A nos beaux jours - racontée par Laurent Chalumeau (l’auteur des dix adaptations qu’il comporte) lui-même (ou presque) en cliquant sur le lien suivant :
De cet album un seul single sera extrait, A nos beaux jours, avec, comme deuxième titre, Mes yeux bleus sont gris, adapté de…
«Don’t Make My Eyes BlueMéga succès pour Crystal Gayle jeune sœur de Loretta Lynn, en 1978. Pas vraiment country. Plutôt easy listening. Mais jolies petites afféteries au piano et phrasé magistral, en syllabes étirées et fin de vers feulés » dira Laurent Chalumeau au magazine Schnock, après avoir transformé cela en:
« Jamais n'ai-je eu tant de mal
Sans doute est-ce bien normal
Une autre t'a séduit
Quand ils pleurent
Mes yeux bleus sont gris
Si tu pars, tu le sais
Mon monde s'écroulerait
Tu me rayes de ta vie
Quand ils pleurent
Mes yeux bleus sont gris
Tu gardes tes secrets
Dis des mensonges
Pas d'explications
Tu sais qu'elles me rongent
Dis-moi que tu m'aimes
Oui, dis-le quand même
Dis ce que tu veux
Mais jamais "Adieu"
J'ai donc dû te décevoir
J'étais sûre de t'avoir
À présent j'ai compris
Quand ils pleurent tous les yeux sont
Quand ils pleurent tous les yeux sont
Quand ils pleurent tous les yeux sont gris 
Quand ils pleurent tous les yeux sont
Quand ils pleurent tous les yeux sont gris ».
Joli, tout de même!


Et puis sur cet album, d’autres belles reprises comme (Même ta femme a) Des états d’âme, pendant humoristique et rafraîchissant d’Emmène-moi danser ce soir, le très sensuel (et chaud ! chaud ! chaud !) Là où fond la banquise ou l’illégal Un chant de sirènes
Pour que les maris comprennent qu’ils doivent prendre soin de leur femme, car elle mérite d’être traitée « juste aussi bien que la télé » (Même ta femme a) Des états d’âme. Car à trop avoir été négligée, madame finit par se sentir aussi froide… que la banquise.  Mais, dès lors que monsieur l’emmène danser (ou sait se servir avec précision de ses lèvres) c’est en râle amoureux que se transforme son chant. Et la femme frigide se métamorphose, au contact de ces lèvres expertes, en femme-fontaine. Après cela, elle se dit prête à tout… Mais à quoi ? Chhhhuuuut !
« J’attendais que tu m’y emmènes
Pour un jour moi aussi aller
Là où fond la banquise
Tout contre toi
Des sensations exquises
A chaque fois
Et je jure que je t’aime
Oui je jure que je t’aime…
Si nous dansons seuls tous les deux
Perdus dans la foule
Quand tes bras m’enserrent de leur mieux
Sens-tu de mon ventre la houle ?
Car pour l’amour l’un de l’autre
Rien ne nous effraie
Et lors des nuits comme les nôtres
Il n’est rien que je ne ferais
Là où fond la banquise
Et je me noie
Des sensations exquises
A chaque fois
Tes lèvres se font précises
J’entends la musique
Alors là où fond la banquise
Tu me fais rêver
Et je jure que je t’aime… »,
Là où fond la banquise, 1995.
Tombée en pâmoison, elle  se dit aux septièmes cieux et nous jure tout ce qu’on veut. Et monsieur de se sentir magicien!
« Un chant de sirène
Toujours me ramène
Aux délectables
Souvenirs de sable… »,
délectable Chant de sirène en effet.


En 1996,  quand paraît le CD Le meilleur de Michèle Torr en public, un single est envoyé aux radios : Sortir ensemble, un vrai single, une seule chanson, cosignée par Hervé Vilard, alors qu’au Canada c’est un CD 3 titres qui voit le jour, avec, après Sortir ensemble version studio (inédite en Cd commercialisé), la version en public et, également en public, Hymne à l’amour, toutes deux extraites de l’album. 


En 1997, quand paraît le CD Seule, un deux titres hors-commerce est à son tour édité.
« J'ai pris tous les avions du monde
Et je ne sais toujours pas
Si de l'autre côté la Terre est ronde
Où est l'envers, où est l'endroit ?
Folies des hommes, j'ai eu si mal
Je suis morte cent mille fois
Les gens se font la malle
Les blessures restent là
Amie des plus grands de ce monde
Des rois, des chefs d'État
Poupée de chiffon dans une ronde
Une reine ne danse pas
Femme promise, qu'on me réponde
Pour quel prince, pour quel roi
N’ai-je pas été blonde
N’ai-je n'aimé que toi ?
Je suis une femme seule
Entourée mais si seule
Je n'ai que des amis
Mille dans chaque pays
Je suis une femme seule
Et dans ma tour d'ivoire
Entre mariage et deuil
Toujours un peu plus seule
Quand tu t'en vas…».
Après Seule, on y trouve une autre chanson très personnelle de Michèle Torr, d’autant que les textes de ces titres sont signés Michèle TorrTes silences. Elle y raconte plutôt plus que moins ce qu’elle est en train de vivre… Sur la pochette on la voit, belle égarée, sur une voie de chemin de fer désaffectée.
« Et ce putain de portable qui marche pas !
Pas moyen de t'appeler, te dire que ça va pas
Embarquement immédiat,
J' suis bloquée à Roissy
Si loin de tout ici
Je pense à toi
Un mouchoir j' trouve plus mes lunettes noires
Pour cacher les blessures de tes armes
Et j' me fous que les gens voient mes larmes
Ne suis-je pas faite comme toutes les femmes ?
Arrête tes silences
Joue plus l'indifférence
Laissons-nous une chance
Tout est gagné d'avance
Si tu fais le premier pas
Et ce putain de passé qui me revient
Je me souviens de nos étés, une bastide, un jardin
Quelques roses trop blanches
Qu'on appelait "Michèle"
Il pleut sur la Provence
Je pense à toi
Des couloirs bien trop longs, égarée
J'ai pas le trac, je cherche le plateau B
Notre histoire en direct, une télé
Seras-tu là pour me regarder ?
Arrête tes silences
Joue plus l'amour vengeance
Laisse-moi une chance
De regagner ta confiance
J' vais casser ce silence
Car de toute évidence
J' veux plus de cette absence
J' veux que tout recommence
Arrête tes silences
Joue plus l'indifférence
Laissons-nous une chance
Tout est gagné d'avance
J' vais casser ce silence
Car de toute évidence
J' veux plus de cette absence
J' veux que tout recommence
Si tu fais le premier pas
Allez, viens ! »
Suivent sur l’album d’autres chansons cosignées Michèle Torr (Regarde-les ou Tant je t’aime…) Mais aussi quelques pépites comme Le sac


En 1999, c’est au tour de Je te dis oui de se trouver dans les rayons de trop rares disquaires.
« Quand je t'ai vu la première fois
J étais ailleurs j' étais pas là
Je revenais de tellement loin
J' entendais plus je voyais plus rien
Je voyageais dans d'autres sphères
Où l'amour n'a plus rien à faire
D'où vient cette énergie bizarre
D'avoir encore envie d'y croire
Je te dis oui
A tes décors et à ta vie
A tes encore et à tes nuits
A tes images plus ou moins sages
Je te dis oui
A tes voyages et à tes cris
A tes hier à tes prières
A tes colères à ta folie
Je te dis oui
A tes extrêmes
Je te dis oui
A tes « je t'aime »
Je te dis oui
A l'infini
Je te dis oui… ».
 On entend, après la mélodie aux délicieux accents slaves de la première chanson un extrait de Portrait de scène, double CD enregistré en public et sorti en mars de la même année, Charlotte, cosignée Michèle Torr pour le texte, et dédiée à sa première petite-fille.
« Tu es le soleil de ma vie
Tu es une île un paradis
Quand je te regarde plus besoin de mots
Tu es chanson tu es poème
Tu es le soleil de ma vie
Et chaque fois que tu souris
C’est un peu de moi
Que je retrouve en toi
Une petite fille que j’aime…
Ma petite-fille que j’aime »,
Charlotte, 1999.


En 2002, nouveau CD 2 titres paru en avril en même temps que l’album Donner (dont on se rappelle L’après-bonheur, Apprivoise-moi, S’en aller ou encore Je n’ai pas fini de t’aimer, la plus belle du disque selon le magazine Platine).
La première chanson qu’on trouve sur le CD 2 titres, c’est J’ai donné, et la seconde, Toutes les chansons ont une histoire.
« On les écrit à l'encre de chagrin d'amour
De couplets déchirés en gouttes de velours
On les retrouve témoins des tournants de nos vies
Associés pour toujours à une mélodie
Elles sont comme ces miroirs qui reflètent le temps
De nos premiers baisers au tout dernier printemps
Elles rythment la cadence des secondes et des heures
Et comme on les connait, on les reprend en chœur
Toutes les chansons ont une histoire
La mémoire qu'on n'efface pas
Toutes les chansons ont une histoire
Un jour il était une voix
Toutes les chansons ont une histoire
Des paroles que l'on n'oublie pas
Et cette chanson me parle encore de toi
Elles traversent la rue et partent au bout du monde
Charmer un inconnu ou surfer sur les ondes
Du pavé des trottoirs aux balcons de Vérone
Elles flirtent avec l'histoire de ceux qui les fredonnent
Elles cachent entre les rimes tant de jardins secrets
Tant de rêves, tant de pleurs et de larmes séchées
Si l'on oublie souvent le nom de leurs auteurs
On sait que ces chansons ont fait battre nos cœurs
Toutes les chansons ont une histoire
La mémoire qu'on n'efface pas
Toutes les chansons ont une histoire
Un jour il était une voix
Toutes les chansons ont une histoire
Des paroles que l'on n'oublie pas
Et cette chanson me parle encore de toi
Encore de toi
Un jour il était une voix
Toutes les chansons ont une histoire
La mémoire qu'on n'efface pas
Toutes les chansons ont une histoire
Un jour il était une voix
Toutes les chansons ont une histoire
Des paroles que l'on n'oublie pas
Et cette chanson te parlera de moi
Te parlera de moi ».


Puis, en octobre, quand sort un Best of , il est annoncé par un single hors-commerce, une reprise de Daniel Balavoine : Aimer est plus fort que d’être aimé.  
« Toi qui sais ce qu'est un rempart
Tu avances sous les regards
Courroucés
Tu écris mais sur le buvard
Tous les mots se sont inversés
Si tu parles il te faut savoir
Que ceux qui lancent des regards
Courroucés
Ne voudront voir dans leur miroir
Que ce qui peut les arranger
Toi qui as brisé la glace
Sais que rien ne remplace
La vérité
Et qu'il n'y a que deux races
Ou les faux ou les vrais
L'amour
Te porte dans tes efforts
L'amour
De tout délie les secrets
Oh ! et face à tous ceux qui te dévorent
Aimer est plus fort que d'être aimé… ».


Il en sera de même en 2005, avec C’est un message.
« C’est un message pour le temps qui passe
Et qui nous poursuit tout au long de notre vie
C’est un message pour le temps qui passe
Le jour comme la nuit où je frôle l’insomnie de la vie… ».


Pas de seconde chanson non plus sur le single Son paradis c’est les autres, hommage à Sœur Emmanuelle, sorti en 2009, extrait de Ces années-là (où on trouve aussi de jolies chansons méconnues comme Encore ou C’était toi).


Pas plus qu’après Avant d’être chanteuse, superbe chanson trop vite oubliée qui a accompagné la sortie du Best of 3 CD de 2011…
« Si quelqu’un t’interroge toi tu lui parleras
De la robe dans ma loge du café moitié froid
Si quelqu’un te demande si j’ai peur ou j’ai froid
Dis-leur que ces guirlandes sont mes Noëls à moi
Avant d’être chanteuse on est n’importe quoi
Une apprentie rêveuse une star sans éclat
Avant d’être chanteuse on a chanté cent fois
La chanson orgueilleuse du succès qui viendra
Avant d’être chanteuse on essuyait les plats
Ou on était ouvreuse dans un vieux cinéma
Avant d’être chanteuse on a été tout ça
On n’est jamais heureuse que les soirs de gala… ».
Et point de single pour promouvoir Chanter c’est prier, de même qu’il n’y en avait pas eu à la sortie de C’est l’amour, Michèle Torr chante Piaf.
Point non plus pour Je ne veux chanter que l’amour.
Mais les téléchargements ont depuis longtemps supplanté ces jolis formats de disque que furent les CD 2 titres et surtout les quarante-cinq tours.
Ainsi s’achève, pour le moment, l’histoire, l’histoire des faces B (et de quelques autres chansons) des disques d’une chanteuse populaire… par trois petites notes en l’air.


Michèle Torr: l’envers du chemin ou l’embarras du choix…

« …Il y a quelque temps, je suis tombée sur un site internet qui m’est dédié, qui s’appelle L’Admirateur, qui est tenu par deux messieurs. Grâce à ce site, j’ai redécouvert des chansons que j’avais un peu oubliées. Il y a eu les tubes et puis, à côté, il y a eu de formidables autres chansons, très belles mais que l’on a moins entendues et qui sont un peu tombées dans l’oubli.
Tout cela m’a en effet donné envie de réenregistrer ces chansons qui étaient un peu passées à la trappe. Un coffret spécial est donc en projet, un coffret qui contiendra, entre autres, toutes les chansons que l’on trouvait à l’époque sur les Face B des 45 tours. ».
(Propos recueillis par Romain Gavidia et Cerise Rochet
C’est donc ainsi que le projet du Cd que Michèle Torr vient d’enregistrer et qui devrait sortir fin mars 2019 est né.
Quelles seront les chansons retenues ? C’est à ce moment-là qu’on le saura…
Mais à se remémorer toutes ces chansons, faces B à l’envers des quarante-cinq tours ou éparpillées parmi toutes celles enregistrées au fil de 55 années de carrière, c’est l’embarras du choix, on ne sait trop lesquelles choisir, et plus on les écoute, plus on se dit : « Pourquoi pas celle-ci? Ou celle-là ? » et la liste de s’allonger, de s’allonger…
Car il en est qu’on a aimées, certes, comme en secret, mais ne vaut-il pas mieux quelles restent telles quelles, exquises madeleines dont il vaudrait mieux ne pas changer la recette sous peine de n’en faire ressortir que la fadeur ?
A d’autres il suffirait de changer quelques mots peut-être, pour les rendre plus actuelles…
Et il faut avant tout que ce soit la chanteuse qui prenne du plaisir à les revisiter et parvienne à leur donner une nouvelle dimension….
Pour qu’on prenne du plaisir à notre tour à les redécouvrir réinventées.
Et puis est venu s’ajouter l’intention de leur adjoindre des chansons inédites, et dans le fond, n’est-pas cela que l’on préférerait ? Un album de chansons nouvelles…


A suivre, donc.