jeudi 26 novembre 2015

Michèle Torr. La tournée des églises: une profession de Foi.

Petit retour en arrière: avant le début de la tournée Chanter c'est prier, nous vous proposons une édition revue et corrigée de notre chronique de l'an dernier: Michèle Torr, une profession de foi.


« Chanter c'est prier deux fois », ont dit Saint Augustin, Père de l’Eglise, puis Martin Luther, théologien. La tradition chrétienne a toujours accordé une place essentielle au chant, par lequel l'assemblée participe à la liturgie. Par lui se transmet une bonne part de l'enseignement biblique et catéchétique. Nous avons tous fait l'expérience de cantiques familiaux transmis de génération en génération, que parfois l'on a chantés bien avant d'en comprendre le sens à l’occasion de mariages, d’obsèques, de messes de Noël…. Car la sensibilité peut précéder l'intelligence. De même la prière et le chant peuvent s'intervertir. Il arrive que des personnes ne parviennent pas à prier, ne sachent pas prier ou soient mal à l'aise avec la prière. Le chant peut alors se révéler pour elles un meilleur moyen d'expression, car la charge spirituelle y est portée à la fois par les mots et la musique. Quelquefois, chanter c'est prier sans en avoir l'air, et cela peut satisfaire notre pudeur. Le chant peut alors devenir une école de la prière. Nous connaissons tous l’adhésion de Michèle Torr à la spiritualité ou plutôt aux spiritualités…La foi a pu être dans certaines périodes de sa vie une béquille, un rempart, dans d’autres un sens donné à la vie, ou bien encore une prière universelle par laquelle elle nous a invités avec elle à communier.
Cette chronique est un pèlerinage au cœur de son répertoire ou plutôt une profession de foi, sa profession de foi,  messages plus ou moins secrets entendus à travers toutes ces chansons qu’elle nous a offertes tout le long de cinq décennies, où il est question d’un Dieu intense, d’un Dieu paysage, d’un Dieu passion amoureuse, d’un Dieu ange gardien, d’un Dieu Amour, mais aussi d’un engagement et d’une spiritualité…

…Michèle Torr chante la foi.

Le nom de Dieu n’apparaît dans certaines chansons que comme une expression visant à exprimer l’étonnement ou l’intensité de l’amour humain ou d’un autre sentiment.
(Dans  Une vague bleue, 1974 :
« Je flirte avec toi
Mon Dieu comme j’aime ça… ».
Comme dans  Le voyage en bateau, 1983 :
 « Ah ! mon Dieu qu’il était beau
Courant au fil de l’eau
Le voyage en bateau… ».
Ou dans C’est joli la mer, en 1987 :
« Tu es entré dans mon regard
Dieu qu’il était chaud cet espoir… ».
Ou encore dans Ma plus belle histoire d’amour, c’est vous, (re)prise à Barbara en 2000 :
« Mon Dieu que j’avais besoin de vous » dit-elle au public).

Dans d’autres chansons, églises et clochers ne sont que des éléments du paysage :
« C’est un clocher qui sonne
Et un banc qui s’ennuie… »
La province, 1984.
« Un clocher quelques maisons
Sur une place une fontaine »
Je reviendrai dans mon pays, 1985.
« Petit Jean souviens-toi de nos dimanches
Tu me trouvais très belle dans ma robe blanche
Sur les bancs de l’église je t’admirais
Timidement tu me regardais »
Petit Jean, 1985.
« Mon village
Au clocher aux maisons sages
Où les enfants de mon âge
Ont partagé mon bonheur »
Douce France, 1987.
« Un p’tit village
Un vieux clocher
Un paysage
Si bien caché »
Que reste-t-il de nos amours,  1987.
« Devant l’église une roulotte peinte en vert »,
Les comédiens, 1999.

Mais souvent l’amour  et la foi se font écho dans des titres dont le sujet est celui de la passion amoureuse et non des convictions religieuses.
Ainsi dans  Les amoureux, 1973:
« On ne voit plus les amoureux
Prendre le Ciel comme témoin… »
« A  tes  genoux
Je tombe à tes genoux
Comme à l’église
Lorsque l’on prie »
Dans  A tes genoux, 1976.
« Aimer comme je t’aime
Est un bienfait de Dieu
Et je veux sur ce thème
Broder des jours heureux »
Dans  Aimer comme je t’aime, 1976.
« Mujer si puedes tu con Dios hablar
Preguntale si yo alguna ves
Te he dejado de adorar… »
Dans  Perfidia, 1976.
« All I do is pray
The Lord above will let me
Walk in the sun once more”
Dans  Stormy weather, 1976.
C’est aussi le cas en 1982 avec A faire pleurer les femmes :
« Tu ne seras jamais malheureux
Parce que... tu as des yeux…
A faire pleurer les femmes
A leur faire des enfants
A leur faire croire en Dieu… »
Dans  Midnight blue en Irlande, en 1983:
« Midnight blue
Dans l’église à genoux
Je pense aux années bleues
Où nous étions heureux ».
Dans  Je l’aime, en 1983 :
« Je l’aime à bâtir des cathédrales…
A m’en crucifier le cœur … »

Dans Mariage, en 1984 est évoquée brièvement une cérémonie religieuse:
« Dans l’église enchantée
Les cloches qui sonnaient
Et les enfants qui chantaient
Et vivent les mariages d’amour… »
« Ensemble nous revivrons
Paradis et enfer »,
Tu ne vaux pas une larme, 1987, Dans le blues de l’amour, 1997.
Dans Puisque c’est un adieu, en 1988, il est davantage question d’un dieu qui serait une sorte de Cupidon:
« Puisque c’est un adieu pour toi et moi
La plus belle des histoires emporte-la
Si l’amour a un dieu qu’il n’oublie pas
Je suis prête à le croire encore une fois… ».
Passion fatidique, en 1988 : l’homme aimé est déifié :
« Toi seul mon unique
Mon dieu mon amour ».
« Mais je sais que chaque nuit
Je dis à Dieu merci
De m’avoir donnée à toi »,
La vie avec toi, 1991.
Puis la foi est présentée comme l’ultime rempart contre les amours interdites :
« Oh ! mon Dieu protégez-moi
De faire cette folie folie
Sans trêve empêchez-moi
De faire des folies folies »,
Danger liaison, 1991.
« Au secours car je tombe
Et c’est un péché
Passer ton seuil me tente
Retiens-moi d’entrer »
Au secours, 1995.
Rempart  que l’on peut franchir en toute impunité en rêve pour accéder au septième ciel :
« C’est grâce à des péchés de rêve
Qu’on arrive au Paradis »
Là où fond la banquise, 1995.
A moins que la punition ne soit la fin de l’amour :
« Est-ce une décision divine
Ou juste une érosion mesquine
Comme une garde-robe qui lasse
Tout comme le temps l’amour passe »
Un chant de sirènes, 1995.


C’est surtout dans les reprises de chansons  d’Edith Piaf que l’amour et la Foi se trouvent évoqués ensemble :
« Ils ont versé tant de prières :
"Délivrez-nous, nos frères !
Délivrez-nous, nos frères ! »
Exodus, 1976 et 2003.
« Dans le Ciel plus de problème
Dieu réunit ceux qui s’aiment »,
Hymne à l’amour, 1987, 1996, 2003.
« J'ai crié, j'ai pleuré,
J'ai nié, j'ai prié... »
La belle histoire d’amour.
Mon Dieu, reprise en 2003 et  2005, encore présente dans le spectacle « En concert avec vous » en 2012 et 2013, est une intense prière à Dieu pour qu’il consente à ce que l’amour pour un homme puisse durer un peu plus.
« Mon Dieu ! Mon Dieu ! Mon Dieu !
Laissez-le-moi
Encore un peu,
Mon amoureux !
Un jour, deux jours, huit jours...
Laissez-le-moi
Encore un peu
A moi...

Le temps de s'adorer,
De se le dire,
Le temps de se fabriquer
Des souvenirs.
Mon Dieu ! Oh oui...mon Dieu !
Laissez-le-moi
Remplir un peu
Ma vie...»


…Et dans Il viendra,  en 1976, Dieu est remercié pour… l’existence du Père Noël :
« Il viendra
Dieu merci ce n’est pas un rêve
Un enfant me l’a dit
Alors je le crois » !


Mais tous ces titres n’évoquent pas la Foi de façon très profonde et cela resterait anecdotique sans les chansons dont il va maintenant être question.
A l’époque de Salut les copains et des yé-yés, le sujet de la foi n’était pas très à la mode et Michèle Torr n’a pas évoqué ses croyances avant 1968, date à laquelle elle a repris Mon ange, chanson signée Bruno Coquatrix ; c’est par les chansons enregistrées sur cet EP qu’elle est enfin parvenue à chanter les chansons qu’elle avait vraiment envie de chanter et non plus seulement celles que lui imposait sa maison de disque, même si auparavant il y a eu des titres comme La grande chanson ou Ce soir je t’attendais…: progressivement , elle avait pu s’orienter vers un répertoire de grande variété qui lui plaisait davantage et  reprendre Mon ange lui tenait à cœur. Une chanson en forme d’acte de contrition après une période tumultueuse qui, si elle a permis à la jeune chanteuse devenue mère célibataire d’obtenir le soutien de Louise de Vilmorin, lui aura aussi valu de s’attirer la désapprobation d’une partie de l’opinion publique. La chanson n’est peut-être pas très explicite sur le plan de la foi, l’ange à qui elle s’adresse semble être un simple ange-gardien et aurait pu être nommé bonne étoile ou destin, mais les références religieuses sont nettes car il y est question de pain quotidien (« …notre pain de ce jour… »), de péchés et d’offenses  à se faire pardonner, ainsi que de méchanceté :
 « Pardonnez-moi d’être méchante
 […] Car même si je recommence
Je le ferai sans y penser ».
On imagine bien que l’ange en question, même si on comprend bien à quoi devait penser l’a chanteuse en interprétant ce titre,  se sera fait un plaisir de pardonner…

Un peu plus tard, avec la mode hippie, les comédies musicales Hair et surtout Jésus-Christ super star, le Christ est redevenu une figure emblématique, symbole d’une génération aussi frivole et excentrique en apparence que désenchantée en profondeur du fait d’un contexte historique peu réjouissant. Alors que la chanteuse aurait pu devenir une figure de l’émancipation des femmes, elle continuait de tenter de redorer son image en la rendant la plus lisse possible, voire déjà « conservatrice ». Cela l’a ainsi conduite à chanter :
« Il pourrait revenir
Ce jeune homme ce martyr
Il ne finirait pas
Ses jours sur une croix »,
dans Ca pourrait être vrai en 1971. Une chanson dans l’air du temps.
« Bientôt tu déposeras un agneau
Au fond de la crèche à Noël »
Paul, 1973.


A l’automne 1977 l’album J’aime sort : il comporte les reprises de Petit Papa Noël et Mon beau sapin,  et sur la photo Michèle porte un manteau blanc au col de fourrure qui laisse penser que c’est de ce disque-là qu’elle parle quand elle dit en 2013 à l’occasion de la sortie de Chanter c’est prier que sa maison de disques lui a demandé d’enregistrer un CD de chansons de Noël mais qu’elle l’a déjà fait. Ce disque contient par ailleurs (et surtout) des chansons qui ne parlent pas de Noël, loin s’en faut : J’aime, La gloire ou bien l’amour, Je ne sais pas pourquoi, Je n’oublierai jamais,  Nos arrières grands-parents, Couleurs, Quatre saisons, Comme un voilier…
Dans Si ma musique, elle chante :
« Si la musique
N’existait pas
L’amour n’aurait plus aucun droit
Je n’aurais plus les mêmes joies
La même vie la même foi ».
Mais l’album contient surtout une magnifique chanson, en forme de prière, sur une mélodie de Franz Schubert : c’est Dis-moi mon Dieu, où la chanteuse exprime d’une voix profondément lyrique et émouvante son incompréhension à l’idée que des enfants puissent être malheureux, en particulier à l’occasion de Noël :
« Dis-moi mon Dieu
Pourquoi mon Dieu
Y a-t-il des enfants
Sans joie un vingt-cinq décembre
Dis-moi mon Dieu
Pourquoi mon Dieu
Il y en a tellement
Qui pleurent tout seuls dans leur chambre
Et pourtant, dans leurs prières
Un peu avant minuit,
Que d'enfants dans leur misère
A genoux te supplient
Dis-moi mon Dieu
Pourquoi mon Dieu
Sont-ils si malheureux
Si malheureux ».
(Paroles de Jean Albertini et Raymond Bernet sur une très belle musique de Schubert).

Michèle Torr récidive dans le registre de la musique classique et de la foi en reprenant en 1978, sur l’album Emmène-moi danser ce soir l’Ave Maria de  Charles Gounod. Elle a chanté cette chanson plaintive, qui est autant une supplique qu’une prière,  non seulement sur scène lors de ses galas (par exemple à l’Olympia en 1980 : on la retrouve sur l’enregistrement public) mais aussi à plusieurs occasions lors de cérémonies religieuses qui avaient un caractère privé, ainsi que lors d’un Téléthon en décembre 1990.


En 1981, il est question de la foi et des croyances dans J’en appelle à la tendresse :
« Devant les synagogues devant les cathédrales
Il n’y a qu’un bon Dieu mais toujours plusieurs diables… »
La chanson a été écrite par Didier Barbelivien et Jean Albertini après l’attentat antisémite de la rue Copernic. Bien qu’un peu maladroite ou ambigüe, la phrase n’a pas suscité de polémique : il y est simplement question d’un Dieu qui serait un rempart contre la barbarie humaine incarnée par des terroristes qui viennent mettre en danger sur leurs lieux de culte la vie de croyants dont la religion importe peu. La chanson se poursuit en forme d’hymne humaniste quelque peu désenchanté :
« J’en appelle à la tendresse
A l’amour s’il nous en reste
J’en appelle à tous les hommes
Que leur volonté soit bonne… »
Comme s’il pouvait ne plus exister de tendresse ni d’amour dans le cœur de l’homme. Comme si à la volonté de Dieu pouvait se substituer celle de l’homme. Un hymne désenchanté donc, mais pas désespéré :
« Une chanson d’espoir en somme ».
Et un tube, malgré une promotion télévisée relativement discrète.

Dans A mon père, 1983, la foi fait aussi partie des éléments du portrait paternel :
« Il m'a récité les paroles
De tous les héros de Pagnol
Il se lève avant le soleil
Il croit en Dieu il croit au Ciel
Il est toujours auprès de moi
Des jonquilles au dernier lilas… »

Puis Michèle Torr a tenté d’exprimer ouvertement sa foi dans certaines de ses chansons, de façon plus nettement engagée :
Dans  Une mère d’autrefois en 1985 :
« Elle leur a appris le soleil
La prière avant le sommeil… ».
Et dans  France ton romantisme fout l’camp en 1986 :
« Il fallait à tout prix qu’ils te rentabilisent
Des couloirs des mairies aux clochers des églises ».
Pour que les lieux de culte ne soient pas que des moyens de faire des gains ou de simples musées…
Cela ne sera pas très bien perçu par le public à qui la chanteuse donne toujours raison et elle renoncera très vite à continuer dans cette voie d’un conservatisme pas toujours en accord avec sa biographie et l’ouverture d’esprit qu’elle a souvent montrée par ailleurs.

« J’ai vu pleurer un soir de Noël
Un inconnu qui cherchait le Ciel …
J’ai vu la croix brûler dans le feu.»
Dans ma vie, 1986.
Et dans Touchez pas à ma ville  elle ajoute :
« Touchez pas à ma ville
La rivière la forêt
Laissez-moi mes secrets
Je veux vivre tranquille
Les oiseaux vous regardent
Le Ciel peut-être aussi… »
Car la Foi continue tout de même de faire manifestement partie de son  jardin secret…

« Les hommes inventent des machines
Et par la volonté divine
La Terre tourne dans le même sens
Et les femmes dansent »
Dans Les femmes dansent, en 1991, l’expression de la foi se teinte de féminisme pour dénoncer les dérapages de la technologie telle que les hommes la font évoluer. La même idée sera exprimée dans Seule, à laquelle s’ajoute celle que, au nom de la religion que par ailleurs ils bafouent, les hommes oppressent en plus les femmes.

« J’ai vu à travers vous le monde
Comme dans un cinéma
Les guerres les gosses qu’on tue les bombes
Dieu cloué sur la croix
Celles qui portent le voile
Ne savent plus sourire»,
Seule,  1997.

Dans  A mi-vie,  la foi est trois fois évoquée :
« Quand on a dix-sept ans on est tous éternels
On peut marcher sur l’eau on peut braver le Ciel »
A mi-vie, 1993. Pour excuser l’insolence de l’adolescence, péché de jeunesse.
« Laissez passer Maria
Laissez-la prier tout bas
Ecoutez monter son âme
Dans la prière sévillane »,
La prière sévillane,  1993. Pour montrer ce que l’expression de la foi peut avoir de beau et d’émouvant chez cette mère de toréador.


Et alors que l’Abbé Pierre est déjà cité dans J’apprends de vous («  Et vous aimez Sœur Emmanuelle et l’Abbé Pierre ») il l’est à nouveau dans Regarde-les en 1997 :
« …ces sans-affaires
Partis du Fan-Club Abbé Pierre… »
tandis que la chanson Son paradis c’est les autres est entièrement consacrée à Sœur Emmanuelle, en 2008. En hommage à deux de ses « étoiles », deux de ses « héros »…dont la relation à la Foi est évidente.
« L’hommage au Ciel d’une cathédrale… »,
Encore, 2008.
« Pour ne pas vivre seul…
On vit avec des roses ou avec une croix…
Pour ne pas vivre seul
On fait des cathédrales
Où tous ceux qui sont seuls
S’accrochent à une étoile… »
Pour ne pas vivre seul, 2008.


« Il y a dans ce rendez-vous quelque chose de divin »,
C’est ma première, 2002.
Il s’agissait du rendez-vous avec le public, à l’Olympia (novembre 2002 et janvier 2003).
En 2011, sur le Best Of 3 CD sorti avant l’Olympia des 6, 7 et 8 mai, on trouve trois chansons inédites : Avant d’être chanteuse, l’adaptation des Marches du Palais, avec d’autres paroles, ayant pour titre Vous m’avez tout donné, dont les textes sont de Didier Barbelivien, avec qui la chanteuse renoue une collaboration artistique commencée avec J’aime  en 1977, et qui signe aussi la musique qui accompagne le … Notre Père, une mélodie très sobre mais prenante, avec des chœurs aux tonalités de chant grégorien et la voix de Claude Barzotti qui récite la prière en italien. Un choix d’autant plus audacieux que la chanson est intégrée au spectacle de l’Olympia, intitulé Avant d’être chanteuse, et qu’on la retrouve sur le double CD et le DVD qui sortiront en février 2013. Ce choix aurait pu déplaire, mais la presse catholique, à savoir le journal La croix et les magazines  Le Pèlerin et La vie,  accueille favorablement l’initiative et consacre trois articles à l’artiste qui en interprètera aussi un extrait dans une émission de télévision exceptionnelle, à 20 heures 30, présentée par Daniela Lumbroso : Chabada. Et Télé Star lui a consacré à cette occasion un article avec pour titre : « Michèle Torr : Chanter est proche de la prière ».

C’est au cours de ce spectacle à l’Olympia, en préambule à son interprétation du Notre père, que Michèle Torr déclare :
« Pour moi chanter c’est donner, bien sûr  c’est aimer, mais c’est aussi prier ».
C’est qu’a dû commencer à germer l’idée qu’elle va exprimer à la fin de l’année 2011, celle d’enregistrer, non pas comme le lui demande sa maison de disque Sony un disque de chant de Noël – elle prétendra de façon expéditive l’avoir déjà fait -, mais un disque de chansons spirituelles, en rapport avec la religion. Dans les six mois qui vont suivre, dans le sillage du succès des Prêtres, elle va concevoir un album qu’elle enregistrera au cours du mois d’août 2012 dans un studio du Gard, et qui sortira le 12 novembre 2012, alors qu’aura déjà débuté une longue tournée de près de cinquante dates avec un spectacle intitulé En concert avec vous.  L’album s’intitulera Chanter c’est prier.

Un album de chansons qu’elle définira comme des prières  « pas nécessairement pieuses (avec une jolie diérèse, zeste d’accent provençal) mais des prières d’amour et de fraternité ». On a toujours envie de chansons originales mais on sait bien que les auteurs, surtout sur ce sujet-là, risquaient de ne pas répondre à une demande de Michèle. L’idée de reprendre ces chansons, pouvaient être à la fois un moyen de leur montrer que sa voix est l’une des meilleures pour porter leurs mots et leurs notes, et peut-être de les convaincre qu’ils peuvent aussi (encore) écrire pour elle. On y trouve donc, après la chanson éponyme, inédite, en guise de préambule : Ave Maria (Aznavour…), L’envie d’aimer (Obispo…) extraite de la comédie musicale Les dix commandements, Chante( Didn’t it  rain), Fais-moi un signe (Palaprat, revu dans la tournée Age tendre), Je crois en toi (Barbelivien), Toi qui m’as tant donné (Gracias a la vida), Coupo Santo, Notre Père, Il faudra leur dire  (Cabrel), La mémoire d’Abraham (Goldman) et  Quand vint la grâce (Amazing grace).


Ce qui frappe d’abord ce sont les auteurs qu’elle a choisis : Aznavour (à qui elle a demandé, en vain, il y a longtemps déjà, un « hymne à l’amour ») mais aussi Obispo, Goldman (à qui elle a aussi demandé, en vain aussi, de lui écrire des chansons, et qui aurait même voulu la voir en concert un soir, mais le rendez-vous n’a pas eu lieu…), Cabrel… A peine plus jeunes qu’elle mais, pour la chanson, de la génération suivante, voire de celle d’après… Comme si, puisque, malgré les sollicitations, ils ne lui ont rien proposé, elle avait résolu de piocher, malgré eux, dans leurs œuvres…Alors elle a enregistré une version lyrique et  fidèle à l’original de Ave Maria, toute sobre de L’envie d’aimer, lumineuse de La mémoire d’Abraham (l’élocution est bien plus claire que celle de Céline Dion), et Il faudra leur dire, non pas avec une chorale d’enfants, mais en duo avec sa petite-fille, Nina Vidal-Guignes.
Ensuite, c’est la signature de David Lelait Helo pour les paroles de quatre titres : l’inédit Chanter c’est prier  et les trois adaptations : Chante, Toi qui m’as tant donné  et Quand vint la grâce.
Chanter c’est prier  constitue un préambule, pour les paroles lui pour les couplets, elle pour le refrain, et pour la musique Philippe Liotard, aussi arrangeur de l’album (à l’exception du Notre Père arrangé en 2011 par Tony Meggiorin). Un rockeur et cela s’entend. Hard-rockeur même à ses heures.
 Chante  et Quand vint la grâce  ont toutes deux pour thème la naissance de la foi, dans une éruption de joie pour Chante, plus dans l’intériorité et la sobriété pour  Quand vint la grâce.
Toutes les chansons ont une histoire et celle de cette chanson-là n’est pas légère. Chant traditionnel devenu hymne des opprimés et des esclaves qui ont trouvé dans la foi une porte ouverte…la mémoire qu’on n’efface pas, même si de cela  il ne reste rien dans l’adaptation de David Lelait. Si Quand vint la grâce parle encore, après un début en forme de « Gloria », sur un rythme presque épique, de la rencontre avec Dieu, ceux que ce thème lasse peuvent y entendre l’histoire d‘une autre rencontre : celle de la femme avec l’homme de sa vie, d’abord triste et seule puis relevée, illuminée quand elle est aimée, et la mélodie est tellement belle…
Mais la plus belle, la plus personnelle, la plus intime, est probablement Toi qui m’as tant donné. On reconnaît à peine l’original tant elle semble écrite pour la chanteuse. La chanson, plus riche aussi bien musicalement que pour les paroles, aurait pu venir heureusement remplacer en concert Vous m’avez tout donné; il y a là le thème et les mots, la sérénité de cette dernière, avec l’intensité de Je ne suis qu’une femme, et plus encore : la densité de l’album A mi-vie, et même la phrase finale, en espagnol (« A las cinco en punto de la tarde » : « Gracias a la vida que ma ha dado tanto » !). Un hymne à la vie, avec la mélancolie pudique de celle à qui elle ne fait pas toujours de cadeau. Une véritable re-création plus qu’une adaptation que les arrangements, discrètement « gospel », transforment totalement. Une très belle chanson.
Ensuite ce sont les arrangements et les chœurs qui surprennent dans Chanter c’est prier.. Arrangements que Michèle Torr a voulu « modernes », parfois inspirés du rock à la source duquel Philippe Liotard semble s’être nourri, et cela étonne surtout sur l’hymne provençal Coupo Santo : pas de touche folklorique, au lieu d’arrangements traditionnels, ceux choisis par le musicien donnent au chant un souffle épique en accord avec le sujet : la renaissance de l’identité provençale. Et au fil des chansons, on entend en particulier d’étincelantes guitares. Chœurs parfois chantés par Michèle Torr elle-même, avec ses inimitables inflexions, mais aussi par une chorale parfois discrète, parfois plus présente, qui teintent l’ensemble d’une belle couleur gospel (de Toi qui m’as tant donné à Chante) et même rock dans Chanter c’est prier. Fais-moi un signe,  la plus œcuménique « …qui que tu sois, Jésus, Bouddha, Hare Krishna… »), est très efficace et rappelle l’insouciance hippie…Les arrangements de ces chœurs sont signés Marielle Hervé.
Enfin, la voix. Belle, chaude, toute en nuances, elle rappelle les intonations déjà entendues sur l’album Seule, une des plus belles réussites de Michèle Torr sur le plan vocal. Elle fait des merveilles sur l’intense lumière crépusculaire de Je crois en toi qui nous rappelle que c’est sur les mélodies de Didier Barbelivien qu’elle a souvent brillé.
L’essentiel est donc là: Michèle Torr ne renie pas ce qu’elle est : une fabuleuse chanteuse… de variétés. Sans se renier. Une très grande voix, qui a forcé sa  rencontre avec de grandes chansons ayant en commun la foi : en un Dieu, en son étoile, en son public, en la fortune qui lui permet de faire cette longue et belle carrière. Au moment où l’unité conceptuelle ne doit quand même pas faire oublier la diversité musicale, personne ne pouvait lui reprocher un manque de sincérité : elle a toujours parlé de sa foi, de son intérêt pour l’histoire des religions, s’est fait photographier avec son fils le jour de sa communion, avec toute sa famille le jour du baptême de son petit-fils Samuel … Légitime était sa démarche, même s’il y avait  eu entre temps le succès des Prêtres. Plus originale, sincère, personnelle, qu’un album de chansons de Noël, c’est certain.

Chanter c’est prier est l’un des plus attachants albums que Michèle Torr ait enregistré mais il a suscité quelques réserves, y compris dans son plus fidèle public, malgré la « vraie spiritualité » qui  s’en dégage. Sorti au moment où la chanteuse avait entamé une grande tournée, pour une remarquable série de dates, autant de stations où la chanteuse espérait  retrouver le public qui, malgré le temps et l’indifférence des médias à son égard, ne l’oublie pas– remarquable car longue, à l’heure où beaucoup de spectacles et tournées sont annulés- celle-ci s’est soldée par un vrai succès, même si on a pu remarquer que l’artiste avait évolué : moins fougueuse sur scène, on l’a vue davantage explorer l’introspection, et le spectacle était plus adapté aux théâtres qu’aux grandes salles où il a pu paraître un peu froid et la chanteuse plus triste. Voie de l’intériorité qu’elle a souhaité continuer d’explorer avec le spectacle intimiste du Trianon le 18 octobre 2015 et avec la tournée des églises qui débutera début décembre 2015.
Ensuite, le Notre Père a suscité une petite polémique: qu’une chanteuse de variété intègre cette prière à un concert n’a pas été apprécié par tous et si le silence des uns était recueilli, celui des autres pouvait être gêné. Elle a tout de même choisi de continuer de chanter Notre Père sur scène, signe qu’elle a davantage interprété ce silence comme du recueillement que comme de la désapprobation.
A la suite de cet album, dans l’air du temps, Arielle Dombale a à son tour sorti un album de chansons spirituelles, avant l’album pluri-interprètes (Anguun, Natasha Saint-Pier…) Sainte Thérèse.


La collaboration entre Michèle Torr et David Lelait sur Chanter c’est prier s’est muée en une telle complicité qu’elle a tenu à ce qu’il soit l’auteur d’une des chansons de son nouvel album, Diva, en 2014/2015, avec pour sujet des histoires d’amour très masculines…Ils s’aiment, et alors?
La chanson, qui peut sembler n’être qu’une bluette aussi sautillante qu’insignifiante, enchaînant les clichés sur les homosexuels (qui aiment les chanteuses et les fleurs, sont plus sensibles et plus démonstratifs…), n’en comporte pas moins quelques remarques plus graves : si parfois ils sont la cible des injures, il en fut, en est et, malheureusement, en sera certains qui ont payé, paient et paieront  encore de leur vie leur orientation sexuelle. Et chanter une telle chanson dans une salle de spectacle, dans une ambiance d’amour et de tolérance comme à l’Olympia, dans une ambiance de music-hall ou de café concert comme au Trianon, semble parfaitement adapté. Mais dans une église? Ce pourrait être particulièrement frappant et courageux, dans ces lieux ou parfois on rencontre plus de rigorisme, voire d’intégrisme, que de tolérance, qui est pourtant une vertu chrétienne essentielle… Mais ce serait sans doute trop provocateur et risquerait de susciter des polémiques.
De façon plus consensuelle, Dieu est, dans Diva aussi, invoqué comme le témoin privilégié du sentiment amoureux, que ce soit pour les moments heureux… :
« Sur mon âme en feu
Je jure crois-moi
Seule et devant Dieu
Je ne veux que toi »,
Je ne veux que toi,
…ou malheureux :
“All I want is you
You alone fulfil me
When my inner voice
Cries to God in pain…
Before God above
I swear that it’s true
All you want is love
All I want is you”
All I want is you.
…Dieu simple ou multiple:
« C’est le Diable et l’Enfer mêlés à tous nos jeux
C’est le Ciel qui est offert à nous par tous les dieux
Quand tu m’aimes ».
Quand tu m’aimes.
Mais Dieu est aussi l’instigateur de l’amour fraternel :
« Tout l’amour du monde est dans cet instant
Comme une communion une envie de partage
Tout l’amour du monde dans un seul instant
Comme un signe divin un cadeau un message »,
Tout l’amour du monde,
et la chanteuse se montre prête à chanter sa foi dans des lieux de concert inhabituels, si ce n’est dans le passé, pourquoi pas dans le futur ?
« J’ai parlé de la paix
Mais aussi de la guerre
Dans les plus grandes salles
Même dans les cathédrales
Du bout du monde »,
Je ne veux chanter que l’amour.
C’est Guy Mattéoni, l’arrangeur en 1981 de J’en appelle à la tendresse, l’auteur et le compositeur de cette chanson…


Michèle Torr, son paradis, c’est la scène.
La conclusion de cette chronique pourrait se faire par la citation d’une expression inspirée et - pardon -  détournée, de celle de Sœur  Emmanuelle : « Son paradis c’est les autres ». Quel paradis la chanteuse recherche-t-elle ? N’est-ce pas tout simplement la scène, endroit que l’artiste traverse dans cette quête de paradis, à la recherche du bonheur éternel, où elle communie chaque soir avec son public, donne tout pour mieux recevoir, se dévoile davantage avec les années qui passent pour être un peu mieux comprise et davantage aimée, non plus seulement  pour ce qu’elle représente mais encore plus aujourd’hui pour ce qu’elle est.
«On ne possède pas le bonheur comme une acquisition définitive. Il s'agit à chaque instant de faire jaillir une étincelle de joie. Ne l'oublions pas : ‘’Souris au monde et le monde te sourira’’.» (Sœur Emmanuelle)
Difficile de témoigner, à travers des chansons, d’un cheminement spirituel. Cela touche tellement à l’intime… Mais nous avons la certitude que cette conviction a toujours accompagné l’artiste tout le long de ces cinq décennies. Issue d’une famille judéo-chrétienne, elle a gardé au fond d’elle toutes les valeurs chrétiennes qu’elle a manifestées dans son parcours personnel et professionnel. « La fin d'une vie au cours de laquelle on a toujours cherché à entrer en communion avec Dieu, la fin de cette vie terrestre, n'est que le prélude à une symphonie » (Sœur Emmanuelle).
La tournée des églises va bientôt débuter. Comme si ce nouveau projet était la vraie manière de Michèle Torr de nous donner rendez-vous pour nous dire « Merci » pour les 50 ans d’amour qui se sont écoulés.  Comme si elle avait enfin trouvé la sérénité pour nous offrir ce moment de grâce qu’elle voudrait vivre avec son public dans des lieux de culte provinciaux et –pourquoi pas ?- parisiens.
 « Le véritable amour, solide, durable, est celui qui cherche le bonheur des autres en même temps que son propre bonheur » (Sœur Emmanuelle).

©ED & GD

lundi 23 novembre 2015


Après l’émission du 21/11/2015 sur Bergerac 95, merci à
- Alain Boucherès, admirateur d’un village voisin,
- Patrick Brugalières, bergeracois, chef d’orchestre de Michèle Torr de 1986 à 1988,
- L’Abbé Martial, homme d’église et organisateur de spectacles sur Bergerac,
- Matthieu Chocat, chef d’orchestre de la tournée Chanter c’est prier.
Merci à Philippe Bastide, directeur de Bergerac 95 et animateur de l’émission.
Et merci à Madame Michèle Torr d’avoir répondu à l’invitation.

Dans quelques jours, nous reviendrons sur cette émission, et en particulier sur les confidences que Michèle a faites, alors qu’elle évoque rarement de tels sujets, comme ses états d’âme après le triomphe de l’Olympia 80. Ou bien la robe que, comme Cendrillon, elle a dû rendre au couturier qui la lui avait prêtée, après qu’elle eût rencontré son idole Johnny Hallyday lors d’un gala de l’Union.
Nous reviendrons bien sûr sur la tournée des églises, sur le disque qu’elle n’a pas fini d’enregistrer à cette occasion, les DVD qui devraient sortir bientôt, incluant l’Olympia et le Trianon 2015 ainsi que le spectacle Chanter c’est prier, avec des chansons de Noël et des titres qu’elle n’a jamais chantés et ne rechantera peut-être jamais sur scène, parmi d’autres, issus de son répertoire, comme Mon ange, de Bruno Coquatrix qu’elle avait enregistré en 1968.
Rendez-vous donc à partir du 5 décembre pour la première date de la tournée des églises.

Bonjour les admirateurs. Je voulais juste vous dire bravo pour votre intervention à la radio ce matin. Cordialement !  Leslie

Lu sur www.micheletorr.com
Très belle émission avec la participation de MICHELE sur RADIO BERGERAC ce matin et à laquelle ont participé quatre personnes qui ont évoqué leurs premières rencontres avec l’artiste .Elle a insisté sur le plaisir que lui procurent les projets de la tournée dans les églises. Parmi les titres diffusés au cours de cette émission, nous avons pu en écouter quelques uns de l’album DIVA.
Une matinée agréable en oubliant ce temps pluvieux
Bon week-end à tous.
Amicalement
Nicole

Bonjour
Superbe émission sur Bergerac 95, des personnes qui parlent de Michèle et qui la suivent depuis des années.
Je me reconnais car moi aussi ça fait longtemps que je suis fan, vivement le concert de Bergerac je serai présente et j’ai hâte.
Marie Paule Giner

Bonjour!
J’ai été interviewé en début de semaine par Philippe Bastide: charmant animateur, à qui j’ai pu exprimer le ressenti que j’éprouve envers Michelle depuis 1967….Mon Dieu que le temps a vite passé!
Allez, tous à Bergerac le 13 décembre…Elle va encore nous faire vibrer, j’en suis certain!!!
Agenais

dimanche 15 novembre 2015

Michèle Torr, 50 ans de chansons...


Rendez-vous du lundi 16 au vendredi 20 novembre à 7 heures 10 puis à 9 heures 10 environ (après les infos), sur
pour un feuilleton radio en 5 épisodes sur les 50 ans de chansons de Michèle Torr. Chaque jour, une décennie.
Et rendez-vous le samedi 21 novembre de 10 heures à 12 heures pour une émission spéciale avec la chanteuse qui se produira à Bergerac le dimanche 13 décembre et dans de nombreuses autres villes dans le cadre de sa tournée des églises : Chanter c’est prier.

50 ans qu’elle ne chante que l’Amour, l’amour des siens, l’amour des autres. Toujours avec  cette voix puissante qui, au temps des « yéyés », des voix flûtées de Gall, Hardy, Vartan, surprenait tout le monde et même Claude François qui l’adorait …  
De Michèle Torr, on sait qu'elle fut une "idole" dans les années 60 puis une immense vedette dans les années 70 et 80, dont datent une série de tubes qui restent dans les mémoires, de Je m'appelle Michèle à A mon père, en passant par J'en appelle à la tendresse ou l'incontournable Emmène-moi danser ce soir.
Ce que l'on sait moins, c'est qu'après une bonne décennie passée à chercher à explorer de nouvelles voies musicales, elle  a pris son envol et est devenue en 1996, après une période difficile sur le plan personnel, sa propre productrice.
Depuis, elle a enchaîné les rentrées parisiennes et les longues tournées, en France mais aussi à l'étranger, comme au Québec en 2013, et a continué d'offrir à son public des albums tel Seule en 1997, Donner en 2002 ou Michèle Torr chante Piaf, c'est l'amour en 2003.
Mais depuis 2008, alors qu'elle a continué de se produire partout en France tant en solo qu'avec la troupe d'Age Tendre et tête de bois dont elle a été la première à adhérer au projet, et où le rituel de chanter à capella et sans micro lui a valu chaque fois une ovation dans tous les zéniths de France, elle a aspiré à renouveler encore son répertoire en lui donnant une dimension spirituelle puisque, après une chanson hommage à Sœur Emmanuelle, Son paradis c'est les autres  en 2008 et sa version du Notre Père en 2011, elle a enregistré en 2012 Chanter c'est prier, un album florilège de reprises et d'adaptations de chansons d'amour et de fraternité, pas forcément pieuses mais en relation avec la foi. Depuis longtemps également, elle envisage de proposer des spectacles plus intimistes, en piano-voix et, après la sortie de son album Diva en 2015 et Le Paris de Michèle Torr, composé de deux spectacles parisiens différents, celui de l’Olympia, Amour toujours, le 9 janvier, et  celui du Trianon, le 18 octobre, intitulé Intimiste, elle repart sur les routes de France pour une tournée des églises qui a pour titre Chanter c'est prier et  passera par bon nombre de villes, pour y proposer un spectacle à la fois intimiste, avec une formation musicale légère, et spirituel, puisqu'elle y interprétera non seulement des titres qui faisaient déjà partie de son répertoire, mais aussi des chants de Noël et de nouvelles reprises ou chansons inédites, tout en restant fidèle à ce qu’elle est, une chanteuse populaire, et à son public. Sur la scène, endroit que l’artiste arpente depuis plus de cinquante ans et où elle communie chaque soir avec lui, donnant tout pour mieux recevoir, se dévoilant davantage avec les années qui passent dans sa quête du bonheur de chanter.


1964-1974 
Le blé en herbe.


Michelle Odette Kléberte Tort est née le lundi (de Pâques) 7 avril 1947 à Pertuis dans le Vaucluse. Comme « elle est née chanteuse », conformément à ce qu’a dit d’elle Maurice Chevalier, on pourrait faire de sa date de naissance le début de la carrière de cette oiselle-là. Ou bien le jour où ses parents furent convoqués à l’école où, encore toute petite,  elle avait chanté Domino.  Ou bien encore celui de la kermesse où, un peu plus grande, elle interpréta Bonbons, esquimaux, chocolats, d’Annie Cordy.
Ou encore, et plus sérieusement, celui où elle remporta le concours de chant On chante dans mon quartier, en 1963, en chantant Exodus, d’Edith Piaf, ce qui lui permit de se produire en première partie d’un spectacle de Jacques Brel à Avignon, sur la scène du Palais des Papes. Cela lui valut aussi un prix et la possibilité de monter à Paris et de faire des essais pour une maison de disques : Philips. Elle enregistra Exodus. C’est cette chanson qui lui permit de signer son premier contrat, à la faveur d’une erreur d’étiquetage. Agnès Fontaine, le nom d’une jeune chanteuse qui avait déjà obtenu un certain succès, fut apposé sur l’enregistrement, et peut-être que sans cela, personne n’aurait eu la curiosité d’écouter le disque souple d’une inconnue. Grâce à cela donc, et surtout grâce à la voix de la jeune fille venue s’installer à Paris, rue Bergère, avec sa mère Clémente et sa petite sœur Brigitte, la jeune Michelle signa son premier contrat le 13 octobre 1963, le jour des obsèques d’Edith Piaf.

     Mais c’est le 14 janvier 1964 qu’est sorti son premier disque et c’est donc ce jour-là qu’il est légitime de considérer comme le début de sa carrière.
C’était un « EP » (« extended play », quarante cinq tours quatre titres), un disque de reprises de chansons anglo-saxonnes, adaptées à la chaîne comme cela se faisait en pleine vague yéyé, et, pendant les années qui suivirent, c’est encore cette recette qui fut utilisée pour concocter bon nombre de disques de la jeune fille à la voix grave à qui l’on demandait de chanter dans une tonalité qui n’était pas la sienne pour se conformer à ce qu’on considérait comme le goût de l’époque. Mais c’est son deuxième disque, sorti trois mois plus tard, comportant la chanson Dans mes bras oublie ta peine qui fut proclamée chouchou de l’émission Salut les copains,  qui lui permit de se faire plus largement connaître après le « demi-succès », comme elle le chanta plus tard dans Ma première chanson, de son premier disque dont le titre phare était C’est dur d’avoir seize ans.
Par la suite, elle dut donc reprendre de nombreux titres anglais ou américains, comme Viens me le dire à l’oreille, Et je l’aime (And I love her, des Beatles), Tout doucement (To know him is to love him de Phil Spector), Dandy (des Kinks), ou encore Only you d’Elvis Presley…
  
     Mais il ne faut pas croire que la jeune chanteuse était dénuée de personnalité. C’était  même une « forte-tête » qui allait se transformer en une jeune femme forte.
     Ce qu’elle aime, c’est la scène, et elle va commencer à brûler les planches avec de longues tournées: celle du golf Drouot (dès l’été 1964), avant l’Olympia (en décembre 1964) puis une nouvelle tournée-marathon avec Claude François, tout au long de l’année 1965, au cours de laquelle elle apprendra la mort de sa mère à la suite d’un accident de voiture au volant de la 4L que sa fille venait de lui offrir avec ses premiers cachets. Son « plus grand chagrin » chantera-t-elle en 2008.  La mère était allée accompagner le père à la gare alors que la fille venait de partir pour Marseille pour un gala après que la famille s’était trouvée brièvement réunie. C’est elle qui, à la suite de cette tragédie, prendra en main l’éducation de sa petite sœur, de neuf ans sa cadette. Une autre tournée eut lieu en 1966, avec Hervé Vilard et Christophe. Une grande passion  la lie à ce dernier et elle donne, en juin 1967, naissance à son fils Romain que Christophe, avec qui la rupture est consommée, ne reconnaîtra pas. La jeune femme, revenue à Courthézon où est né son fils, devient une figure de l’émancipation des femmes soutenue par la philosophe Louise de Vilmorin, mais elle ressent vivement la réprobation des gens du village où elle a passé son enfance (ainsi que celle de son père selon certains journaux de l'époque) et elle finira par montrer sa volonté de rentrer dans le rang et de faire oublier ses écarts.

   Ce qu’elle aime aussi, ce sont les chansons dans la tradition de la grande chanson française de variété, et, alors que sa maison de disques lui a permis d’enregistrer quelques chansons originales dont l’une des plus marquantes est Non à tous les garçons, offerte par Serge Gainsbourg, elle va assez vite pouvoir chanter des titres plus conformes à ses goûts : On se quitte, La grande chanson… C’est aussi le moment où elle va amorcer un début de carrière internationale en participant aux sélections pour l’Eurovision, pour la France d’abord avec Un enfant viendra en 1965, puis Notre amour n’est pas mort, Je t’aime tant et J’ai brûlé ta lettre en 1966. C’est Ce soir je t’attendais qui sera finalement retenu, pour le Luxembourg, à la suite de France Gall, qui avait remporté la victoire l’année précédente. Michèle Torr se contenta de la dixième place. Peu importe. A l’époque, le concours bénéficiait d’un prestige immense, et y participer donnait l’assurance d’une audience internationale et la chanson, adaptée en quatre langues (espagnol, anglais, allemand et italien) sera diffusée dans le monde entier. Puis Michèle Torr chantera Il doit faire beau là-bas, Mon Ange, signé Bruno Coquatrix, L’amour est bleu, les quarante cinq tours de 1968 et 1969 : En regardant les amoureux, Un homme dans ma vie, avant l’album de 1970, Tous les oiseaux reviennent. Ce 33 tours qui précède un Olympia, toujours  en 1970, avec Enrico Macias, contient J’ai pleuré de joie, que ce dernier a signé pour elle, parmi de nombreux autres titres somptueusement orchestrés par Jean Claudric.
Pascal Sevran a écrit aussi pour elle Est-ce mon cœur ou le printemps ? et On s’aimera un peu, beaucoup mais cette chanson ne sera pas sélectionnée pour l’Eurovision 1970, et les deux chansons demeureront inédites; par contre Michèle Torr va participer à plusieurs festivals internationaux prestigieux:
- Athènes avec une chanson inédite : Rien qu’une larme…
- Rio avec Rire ou pleurer (signé Charles Dumont),
- Orphée d’Or à Slantchev Briag, en Bulgarie, avec J’ai arrêté le temps,
- Tokyo avec Enfants d’aujourd’hui, homme de demain où elle va remporter un vif succès avec une chanson signée Paul Mauriat.

     Au cours de ces années, l’apparence physique et la coiffure de Michèle Torr ont beaucoup évolué: la petite Française aux longues tresses brunes va se muer en starlette rousse puis à nouveau brune, avant que ses cheveux raccourcissent encore pour adopter les boucles blondes de Marylin. Puis la chanteuse va laisser pousser ses cheveux qui, mi-longs, lui vaudront de la part des Japonais une comparaison, qu’elle juge justement flatteuse, avec Catherine Deneuve. Cela peut paraître anecdotique mais laisse entrevoir la tentation de se tourner vers la comédie et le cinéma qu’a éprouvée Michèle Torr.
Ainsi elle aurait joué dans une comédie musicale: Le chat botté en 1965, adaptation du conte de Perrault, avant de tourner en Espagne pour le cinéma, le long de la côte d’Alicante, sous la direction de José Maria Elorietta, dans une coproduction entre l’Espagne, le Canada et la Tunisie, un film sorti en 1969, mais seulement en Espagne et au Canada. Au Canada sous le titre Le Diable aime les bijoux, et en Espagne, en 1969 également, puis à nouveau en 1982, sous deux titres différents : Las joyas del Diablo, puis El secreto del Toison de Oro. C’est un film dans lequel se mêlent action, aventure, enquête policière, espionnage et satanisme.
Une série de vols mystérieux, de bijoux et de pierres précieuses, se produit dans de nombreux pays européens. Ces joyaux ont tous appartenu à la collection d’une organisation secrète, l’ancien Ordre de l’Aigle d’Or. Une exposition est organisée à Tolède. Interpol monte la garde mais, malgré les précautions, un autre vol se produit. L’enquête mène à un mystérieux personnage, le Duc, qui, au XX° siècle, veut faire revivre cet ordre ancien.
Mais que fait dans l’histoire le personnage de Dorothea, interprété par Michèle Torr ? D’abord, en duo avec Donald Lautrec, elle chante. Si tu pars, signée par Mick Michel qui apparaît aussi dans la distribution, est la chanson du générique. Dorothéa est la maîtresse d’un homme impliqué (à quel titre ?) dans le vol des bijoux, qui essaie de la préserver, mais, curieuse, elle va se trouver entrainée dans l’action. Elle va solliciter auprès du Duc, le responsable présumé du vol des joyaux, un emploi qui lui permettra de s’infiltrer dans son organisation. On tremble pour elle, mais comme, sur les images que l’on peut voir sur le Net, elle semble avoir la langue bien pendue, on ne se fait guère de souci. 
3 719 889 entrées en Espagne (tout de même!), 150 000  au Canada.
Peu de gens en France ont vu ce film qui semble être un nanar culte utilisant les ficelles des films d’espionnage à la James Bond, et qui a été jugé comme une « petite chose» par la presse espagnole l’une des dernières fois où il a été diffusé à la télévision ! Lors d’une émission de télévision de Jean-Pierre Foucault qui lui était consacrée, Sacrée soirée,  elle a déclaré qu’elle était ravie que le film ne soit pas sorti en France, car « ce n’était pas terrible », et, comme le réalisateur semblait avoir des problèmes de consommation peu modérée d’alcool, elle avait eu le sentiment que l’équipe n’était pas dirigée.
     Michèle Torr a aussi été l’héroïne d’un roman-photo diffusé  dans 25 numéros consécutifs du magazine Nous Deux, en 1971: Cendrillon à la voix d’or.
Ce feuilleton raconte l’histoire d’une jeune fille, Cendrine, qui rêve de faire carrière dans la chanson et va se retrouver prisonnière d’un impresario peu scrupuleux qui va tenter de lui « voler » sa voix en la séquestrant et en lui faisant enregistrer des chansons qui sortiront sous le nom de son épouse, une grande vedette qui a perdu sa voix et ne peut plus chanter. Mais un journaliste musical qui a repéré Cendrine veille sur son destin : après lui avoir prodigué des conseils pour l’aider à progresser un soir où, désespérée, elle s’apprêtait à se jeter dans la Seine, il va la sortir des griffes de l’impresario et lui donner, en même temps que son amour, les clés pour devenir à son tour une grande vedette.

     Ce roman-photos de Floriane Prévot paru dans les numéros 1235 à 1260 du magazine Nous Deux serait purement anecdotique s’il ne comportait quelques ressemblances avec la vie de la jeune chanteuse dont la carrière ne décolle pas vraiment mais qui, en 1968, a fait une rencontre qui va se révéler décisive : elle a rencontré en janvier un certain Jean Vidal. Celui-ci va l’épouser en janvier 1969 à Avignon. Il va aussi donner son nom à son fils Romain avant de songer à abandonner l’usine de carénage qu’il dirige à Cherbourg pour se consacrer à la carrière de sa jeune épouse.
Il commence par lui écrire les paroles de quelques chansons :  J’ai arrêté le temps pour le festival Orphée d’Or, Les papillons, Alors on marche…Ensuite, Michèle Torr va se laisser influencer par la vague hippie et enregistrer des chansons comme Ça pourrait être vrai ou Petit si petit, mais aussi C’était un petit homme ou  Aime celui qui t’aime (signée Serge Lama), et même faire partie d’un groupe nommé L’Alliance  et entonner, avec Serge Priset, Bélinda et Herbert Léonard, Bye bye l’amour.
 Mais, quand la maison de disques Mercury, qui trouve ses ventes discographiques insuffisantes,  rend son contrat à son épouse, cela produira l’effet d’un électrochoc : c’est bien chanteuse qu’elle est née, et Jean Vidal va s’occuper de créer autour d’elle une nouvelle équipe dans laquelle on trouve Jean Albertini, plus connu sous le nom de Jean-François Maurice (28 degrés à l’ombre), Paul de Senneville ou Olivier Toussaint, et devenir officiellement son impresario après qu’ils auront eu ensemble une petite fille, Emilie, qui va naître en 1973.

     Ainsi, après dix ans d’une carrière qui semble n’avoir pas tenu toutes ses promesses, Michèle Torr va effectuer, en cette même année 1973, un retour en force qui va préfigurer l’éclosion d’une grande vedette. Vont sortir un premier 45 tours intitulé Les amoureux puis un album : Un disque d’amour…avant un deuxième 45 tours, Un enfant c’est comme ça. Comme la Cendrine de Cendrillon à la voix d’or, après quelques péripéties un peu hasardeuses, Michèle Torr, cigale opiniâtre qui n’a cessé de sillonner la France de gala en gala, est enfin sur la voix du succès. La décennie suivante sera celle de l’éclosion et de l’épanouissement.

1974-1984
L'éclosion d'une vedette


     Dans cette deuxième décennie de carrière, Michèle Torr va s’épanouir dans la variété française et conquérir un nouveau et de plus en plus vaste public, avec beaucoup de titres sur une thématique sentimentale. Produite par Jean Αlbertini, sous le label AZ, elle va interpréter de nombreuses chansons écrites et composées par lui et quelques autres, qui vont constituer une très longue série de tubes : Un enfant c’est comme ça, Une vague bleue, puis, en 1975, Cette fille c’était moi, avant Je m’appelle Michèle et l’album simplement intitulé Michèle Torr sorti en 1976. Ce sont les premiers tubes et les premiers disques d’or. Toujours en 1976, sort un second 33 tours intitulé aussi Michèle Torr, avec cette fois la reprise de douze chansons françaises qu’elle a toujours aimées, parmi lesquelles Jezebel, de Charles Aznavour, mais aussi Exodus qui a eu une grande importance à ses débuts, ainsi que, notamment Stormy Weather. Nouveau disque d’or.
     Après une chanson de Noël à la fin de l’année 76, Il viendra, qui évoque … le Père Noël,  Michèle Torr va participer une seconde fois au Grand concours Eurovision de la chanson. C’est avec Une petite Française qu’elle représentera ce coup-ci les couleurs de la Principauté de Monaco. Quatrième place, derrière notamment Marie Myriam et L’oiseau et l’enfant, mais une prestation remarquée qui permettra à la chanson de devenir un nouveau tube et de bénéficier de quatre adaptations, en espagnol, en italien, en allemand et en anglais à nouveau, de même que Ce soir je t’attendais en 1966. C’est aux Allemands qu’elle plaira le plus, où deux 45 tours sortiront simultanément, avec les versions française et allemande. Dès le mois de mai J’aime, à l’origine un orchestral du groupe Abba, duo entre la chanteuse et Jean-François Maurice dont le nom n’est pas mentionné sur la pochette, apparaît dans les hits-parades avant même que Une petite Française n’en soit sorti. Ce titre comporte la signature d’un petit nouveau qui deviendra bientôt célèbre : Didier Barbelivien, dont tous les chanteurs vont bientôt convoiter les talents. Ce sera son coup d’essai et un coup de maître qui lui vaudra son premier disque d’or. Et un de plus pour Michèle Torr.
     Au printemps 1978 paraît Emmène-moi danser ce soir : son plus gros tube (3 millions de disques vendus), une chanson ayant pour thème l'amertume au sein d'un couple que les habitudes ont peu à peu dessoudé. Chanson écrite par François Valéry et Jean Albertini, initialement pour Marie Laforêt qui l’a refusée. Gérard Daguerre, avec  Yvon Riolland, a contribué à l’album Emmène-moi danser ce soir sorti en juillet. Suivra un titre à l’audience plus confidentielle, La séparation, traitant du divorce, à l’automne.
Michèle Torr chante aussi des chansons assez nostalgiques du « temps des copains », comme Discomotion en 1979, écrite par son ami C. Jérôme, où elle évoque ses premiers succès en compagnie de Johnny Hallyday et Sylvie Vartan. Un tube de plus, en pleine vague disco alors que la tonalité sixtees est nettement marquée. Avant Quand un homme a du charme à l’automne suivant.
     Pendant toutes ces années, Michèle Torr n’a cessé de chanter partout en province, dans des galas où elle se produit parfois seule, mais aussi, fréquemment, dans ceux où se succèdent sur scène toutes les stars du moment, mais elle ne s’est encore jamais produite à Paris en solo. Après le succès croissant obtenu en province, son équipe craint un échec et décline toutes les propositions. Jean-Louis Boris, directeur artistique de l’Olympia, finit par s’adresser directement à la chanteuse, qui accepte. En février 1980, elle réalise donc  son premier Olympia en vedette. Celui de la consécration, du 19 février au 3 mars, à guichets fermés ; le spectacle, au cours duquel elle reprend Les Roses blanches  de Berthe Silva, alors que la rose qui porte son nom vient d’être créée, est capté dès les premiers jours et sort un 33 tours certifié très rapidement double disque d’or. Ce spectacle vient consacrer celle que certains considèrent comme une « fée » de la chanson. Pendant l’été suivant (alors qu’une chanson intitulée ainsi vient de sortir avec en face B Le pont de Courthézon devenu depuis un des titres-fétiches de la chanteuse)  Michèle Torr, avec le spectacle de l’Olympia 80,  va sillonner triomphalement les routes de France.
     Cette ascension s’est faite sans l’appui des médias qui ont peu relaté son accession au vedettariat. Au point qu’elle va en concevoir une certaine amertume, d’autant que, dans les années 60, elle était très médiatisée. On la voit aussi assez peu à la télévision : seuls Michel Drucker aux Rendez-vous du dimanche et Danièle Gilbert à Midi Première l’invitent régulièrement. Guy Lux et Jacques Martin ne vont pas tarder à faire de même si bien que, pendant les années 1980, on la verra très fréquemment à la télévision, dans les émissions  de variétés de Michel Drucker, comme Stars  où elle crée Lui, nouveau tube, nouveau disque d’or et grand succès dans les hits-parades, puis Champs-Élysées, et dans toutes les autres. Seuls Maritie et Gilbert Carpentier dont l’émission Numéro Un disparaît en 1981 ne l’auront jamais invitée. Une autre émission marquante de cette période, c’est le reportage que lui consacre l’émission 30 millions d’amis  qui réalise un record d’audience.
Un peu plus tard, en 1981, elle interprétera un de ses plus gros succès, une chanson qui sera très appréciée par Sœur Emmanuelle, intitulée  J'en appelle à la tendresse. Une chanson écrite par Jean Albertini et Didier Barbelivien au lendemain de l’attentat antisémite de la rue Copernic, qui a provoqué une ovation longue et appuyée le 11 janvier 2015 à l’Olympia, alors qu’un autre attentat venait d’être perpétré contre Charlie Hebdo le 7 janvier, et que se déroulait simultanément une manifestation de grande envergure dans les rues de Paris, entre République et Nation. Le disque est sorti avec pour visuel une photo de la chanteuse bébé dans les bras de sa mère disparue en 1965 dans un accident de voiture pour le 45 tours, et, pour le 33 tours, la photo d’une chanteuse de blanc vêtue,  prise en Camargue dans la douceur d’une lumière vespérale, en compagnie de chevaux blancs… Comme Edith Piaf a eu son hymne à l’amour, Michèle Torr aura eu son hymne à la tendresse. Un hymne à la tolérance, par une chanteuse qui n’a pas chanté « que des chansons rose bonbon » comme elle le reconnaît dans Lettre ouverte.
Ensuite elle interprète Ceux du parking, en 1982, pour la série télévisée Joëlle Mazart. Evocation des jeunes des banlieues difficiles sur un rythme à la fois lent et syncopé, pour clore chaque épisode de la suite du feuilleton à succès Pause Café dont l’héroïne, assistante sociale, a les traits de Véronique Jeannot. 

     1982 : l’Olympia encore, pour un mois entier, du 30 novembre au 27 décembre, soit quatre semaines dont bon nombre de dates à guichets fermés à nouveau, après les nouveaux tubes Lui, J’en appelle à la tendresse, et le beau succès d’A faire pleurer les femmes sorti en août 82. Au cours du spectacle, Michèle reprend Stormy weather, enregistré en 1976, crée Entrée des artistes,  La Pologne et Chanter; le 33 tours intitulé pour des raisons commerciales Olympia 83 sort dès la première quinzaine de décembre 1982 et sera certifié disque de platine.
C'est en 1983, après sa superbe reprise de Midnight Blue de Louise Tucker,  adaptation de la Sonate au clair de lune de Beethoven, devenue Midnight Blue en Irlande, avec Roland Romanelli aux claviers,  que Michèle Torr, sur son album intitulé Adieu, enregistre la chanson A mon père. Écrite pour les paroles par Jean Albertini et pour la musique par Didier Barbelivien. Elle en donne une magnifique interprétation. Si bien que c’est finalement la face B du 45 tours qui devient un tube. Chanson hommage à son père Charles Tort, décédé en 2002.

     Guy Mattéoni, chef d'orchestre sur la tournée Age tendre et tête de bois, sera pendant de longues années l’arrangeur et le directeur d'orchestre de l’artiste pour qui il a arrangé les albums Lui, J’en appelle à la tendresse, Midnight Blue en Irlande (en partie), ainsi que l’album Adieu…On le retrouvera encore maintes fois cité sur les albums ultérieurs de la chanteuse, dans la suite des années 80, les années 90 et 2010…
Et chaque année, Michèle continuera de faire de longues tournées dont les dates déborderont largement celles de l’été, au point qu’elle atteindra les cent cinquante dates par an.

     C’est donc avec un répertoire constellé de tubes qu’elle aborde l’année 1984, celle de ses vingt ans de carrière, mais elle va un peu tricher et tarder à les fêter puisqu’elle ne reviendra pour cela sur la scène de l’Olympia qu’en janvier 1987 après un 33 tours intitulé 20 ans d’amour…. Sa troisième décennie de carrière sera donc largement entamée…

1984-1995
La quête du renouveau


Après avoir enchainé tube sur tube durant les années 70 et le début  des années 80, Michèle Torr va à présent chercher à renouveler son répertoire, pour  tenter d’échapper à l’étiquette de chanteuse seulement sentimentale à laquelle on la réduit trop souvent. Par ses musiques et ses orchestrations, elle va chercher à s’inscrire dans l’air du temps avec des sons très actuels tandis que son entourage professionnel et sa maison de disques vont tenter de faire d’elle une « Sardou » au féminin, véhiculant l’image d’une femme respectueuse des traditions, conformiste, marquée politiquement à droite, avec parfois des textes nettement engagés dans ce sens. L’image de la bonne mère de famille que les médias lui ont façonnée va aussi contribuer à cela.

    Mais d’abord, au début de l’année 84, elle s’engage auprès de Sœur Emmanuelle et, le 14 janvier a eu lieu, au Cirque Massila, Porte de Champeret, un gala de charité au profit des chiffonniers du Caire à qui la recette est entièrement reversée. Sœur Emmanuelle vient chanter sur scène J’en appelle à la tendresse avec Michèle Torr, qui assure à elle seule le spectacle. C’est le début d’une longue collaboration au profit des plus faibles et d’une belle amitié.
Quelques temps plus tard, en févier, paraît un 45 tours dont le titre-phare, Pas bien dans sa vie, est écrit par un inconnu, Michel Munz. Le texte évoque le traumatisme subi par un enfant dont les parents ne s’entendent plus. Cette chanson restera l’une des favorites du public de la chanteuse et elle la reprendra à l’Olympia en 2011.

     Fin 1984 sort l’album Donne-moi la main, donne-moi l’amour, où on  retrouve Pas bien dans sa vie. Deux chansons chères au cœur du public s’y trouvent aussi : La couleur des larmes, signée Pierre Delanoé, et Le château des grisailles. Le temps, fruit de sa rencontre avec le journaliste de France Soir Rodolphe Hassold, est aussi une chanson remarquable dans laquelle, feignant de s’adresser à son fils, elle se livre comme elle ne l’a jamais fait auparavant. Elle y évoque notamment son désir de retourner vivre en Provence. Sur le plan purement musical, c’est la mélodie du titre-phare, de Mike Oldfield, qui retient l’attention. Ce bel album sera récompensé par un nouveau disque d’or.

     1985, pour fêter vingt ans de carrière, l’album 20 ans d’amour, Je t’aime encore, Aventuriervoit le jour. Aux radios et au public de choisir la chanson qu’ils préfèrent et sortira quelques semaines plus tard en 45 tours. Ce sera Aventurier, musique et orchestration actuelles avec des machines savamment utilisées par Guy Mattéoni, arrangeur mais aussi auteur et compositeur de plusieurs titres de ce nouvel opus, qui comporte des chansons qui conviennent à merveille à une chanteuse « à voix » qui tient à remercier son public pour ses 20 ans de chansons, et un nouveau titre du journaliste Rodolphe Hassold au ton politiquement très conservateur: Une mère d’autrefois, parmi des musiques aux rythmes variés venant d’Italie ou de Provence.
Cette même fin d’année, Michèle enregistre également une très belle chanson d’Alice Dona avec ses collègues chanteuses : La chanson de la vie, dont les bénéfices seront reversés aux femmes du Tiers Monde.

     Au printemps 1986 sort un 45 tours un peu déroutant pour le public avec France ton romantisme fout l’camp qui prône un retour aux valeurs  traditionnelles, ainsi que  Grâce, signée Pierre Delanoé,  en hommage à Grâce de Monaco.  Fin 86, nouvel album pour Michèle. C’est l’album Qui sur lequel on retrouve de très beaux textes : Un mot de toi, Le ciel s’en va

     Mais les 20 ans d’amour de la chanteuse et de son public, il va bien falloir les fêter sur une scène parisienne. « A l’Olympia, ce n’est même plus du trac que j’éprouve mais de la peur.  Il y a quelque chose en plus dans cette salle qui paralyse un peu. J’y ai le grand frisson ». L’Olympia, du 21 janvier au 3 février, fera de Michèle Torr la record-woman de la chanteuse ayant chanté  le plus souvent sur une scène parisienne pendant les années 80. Celle que la presse a surnommée la Piaf blonde reprend, pour le final, Hymne à l’amour, d’Edith Piaf. Il aura fallu attendre ce moment pour entendre à nouveau un texte entièrement signé Michèle Torr, après deux tentatives dans les années 60. En effet, le 21 janvier, elle crée Je n’ai pas les mots, en hommage à sa mère. La musique est signée Guy Mattéoni. On retrouvera cette chanson (Les mots pour te dire) en version studio sur l’album I remember you sorti la même année. Clémente Tort, sa maman, qui n’est plus de ce monde depuis décembre 1964, n’a pu partager avec sa fille cette carrière qu’elle aurait tant admirée. Cette chanson évoque le bonheur de chanter, la grande maison de pierre dont elle rêvait, qui domine la vallée de la Durance, près de Cadenet, le village où elle est née, depuis quelques temps acquise par sa fille … Un portrait en forme de paysage de la terre natale : lumière, mistral, ruisseau…Les mots sont maladroits, « les mots sont inutiles, on ne raconte pas la lumière… » Ce sont les chœurs, les murmures, qui expriment la peine, la culpabilité peut-être, et surtout l’amour d’une enfant pour sa mère.
« Les  spectateurs ne retiennent que le charme de la chanteuse, qui semble ne pas subir le temps et son charme vocal qui semble se renforcer avec le métier » lira-t-on dans la presse.


       Mais ces tentatives de se renouveler ne semblent pas être parvenues à changer l’image de Michèle Torr, alors, après un album de reprises de standards français en septembre, Chansons de Toujours, c’est dans une nouvelle maison de disques que paraît en octobre 1987 I remember You, l’album de la quarantaine radieuse et souriante, avec un portrait en noir et blanc sur lequel les lèvres sont peintes en rouge. Pourquoi ? Car plusieurs titres de l’album, la reprise de C’est dur d’avoir seize ans, Et toute la ville en parle, Toi émoi, Tu ne vaux pas une larme sont visiblement humoristiques tout en fonctionnant très bien au premier degré.

     Mais en 1988 sort le 45 tours Et toute la ville en parle,  qui va transformer les fausses larmes de la chanteuse en vraies car, Michèle Torr l’a dit plus tard, elle voit dans sa chanson le reflet de sa vie et n’a plus le cœur à en rire ni à la chanter. Alors qu’elle aurait dû devenir l’un des plus gros tubes de Michèle, la chanson est reléguée à l’oubli …pour quelques mois, avant qu’elle ne soit reprise par Margaux. Ou pour quelques années, avant que Michèle ne reprenne elle-même « sa » chanson, à l’Olympia, en 1996. Car rien ne va plus entre elle et son mari et impresario, Jean Vidal. Mais pour l’instant, cela reste secret.
Au début de l’été, et alors qu’elle vient de s’installer à Mérindol, en Provence, dans la maison dont sa mère rêvait, elle publie un livre de recettes de cuisine provençale : La cuisine de ma mère.
Et à l’automne 1988, encore un nouvel album : Je t’avais rapporté ; Michèle en smoking crème sur la pochette fait son cinéma : simulation d’une pellicule. Au verso, une photo dans une loge, robe noire séance coiffure: « Je t’avais rapporté des bouquets d’orchidées du plus rouge éclaté », « … des musiques nouvelles ». Je suis love, Sentiments , Passion Puisque c’est un adieu, Je pense à vous (deuxième extrait en 45 tours au printemps 89) sont des chansons qui continuent d’explorer la voie de l’humour tout en fonctionnant très bien au premier degré.

      En apparence, tout va bien lorsque Michèle Torr annonce un nouvel Olympia en janvier 1990 et que sort le 45 tours Argentina, signé Pierre Delanoé et Michèle Agsen. Mais, suite aux problèmes de santé auxquels la chanteuse est confrontée (on suspecte un cancer, la presse diffuse largement l’information, mais quand, quelques semaines plus tard, Michèle dément en annonçant dans Télé 7 jours que la biopsie est négative, les médias s’en font bien moins l’écho et beaucoup croient encore qu’elle a vaincu un cancer) on découvre que le couple se déchire. L’Olympia est annulé car Michèle a subi une lourde intervention. Elle fera une apparition à l’émission Sacrée soirée, en décembre, pour rassurer son public. Puis tout semble rentrer dans l’ordre jusqu’à l’été suivant où, après un titre musicalement très actuel dans lequel elle se livre à son public : Victime de l’amour, dernier 45 tours de Michèle chez Zone music/ Charles Talar,  elle annonce officiellement son divorce. Et toute la ville en a parlé, comme dans la chanson.

     Pendant ces années chaotiques, Michèle Torr n’a cessé de chanter sur scène et c’est aussi dans ces années-là qu’elle a participé plusieurs fois aux émissions de Patrick Sébastien (Sébastien c’est fou, Carnaval, Farandole) et qu’on l’a vue, diversement grimée, chanter Etienne, de Guesh Patti, Eddy sois bon, en rockeuse toute de cuir noir vêtue, Paroles, paroles de Dalida et Alain Delon, mais aussi parodier Anne Sinclair, ou encore déguisée en facteur, en candidate à la présidence de la République, et même en David Bowie…Et pour ceux qui ne le savent pas, Michèle a souvent dessiné ses tenues de scène.  En 1990, elle va plus loin et crée une ligne de vêtements pour le catalogue de vente par correspondance Quelle.
Mais en se séparant de Jean Vidal, Michèle Torr s’est aussi séparée de son impresario et de toute son équipe car une très grande amitié était née entre Vidal et Jean Albertini. Même si elle bénéficie d’une grande notoriété, Michèle doit donc repartir à zéro.

     Début 1991 : nouveau disque d’or avec le 1er Best Of de Michèle intitulé La compil de mes succès.
En parallèle à cette compil, Michèle prépare un nouvel album intitulé  Vague à l’homme  qui sort en décembre 1991. Premier extrait : le 45 tours Ophélia, au printemps 1991.Ce sera le seul disque qui paraîtra chez Vogue. Un album intimiste dans lequel la chanteuse lève le voile sur ses déchirures sentimentales qui figure parmi ceux que ses plus fidèles admirateurs préfèrent. Il contient deux chansons assurément signées Michèle Torr et Guy Mattéoni : ce sont Rentrer sur scène et Vivre dans l’instant. Ce bel album contient également  une très belle chanson en piano-voix, le touchant Ne m'oublie pas.  On y découvre aussi une magnifique chanson taillée pour la scène: Les femmes dansent.
1992 : Michèle poursuit la promotion de son album Vague à l’homme.  Emissions télé, radios, nombreux concerts…  elle est sur tous les fronts.

     1993 : Gérard Daguerre, qui a accompagné Barbara dans plusieurs spectacles et tournées, et Pierre Grosz lui offrent, au terme d’une longue collaboration, un nouvel album, A mi-vie qui sort chez AZ. Sur mesure. On y découvre,  entre autres, Mon sud et une superbe chanson hommage à Pagnol Fanny sur le port  mais surtout le nouveau tube de Michèle La prière sévillane, hommage d’une mère à son fils matador, César Rincon. A propos cette chanson, Michèle Torr déclarera : «C’est une chanson espagnole que je connais depuis très longtemps. C’est Pierre Grosz qui en a signé le texte français mais l’idée est de moi. J’aurais dû la cosigner ». Hubert Giraud et Francis Lai, entre autres, ont aussi contribué à cet album lumineux.
1994 : elle poursuit la promo de son album  A mi vie …Une année riche, une fois encore, pour Michèle qui  retrouve notamment le Canada où elle se rend du 3 au 25 janvier pour assurer la promotion du disque, réaliser quelques émissions télé et surtout offrir 3 concerts au public québécois dans des salles prestigieuses avant de revenir en France pour une longue tournée.  C’est également l’année des 30 ans de chansons !

      En février 1995, juste avant qu’elle ne se marie avec Jean-Pierre Murzilli, sort le dernier album de Michèle Torr chez AZ : A nos beaux jours.
C’est un album de reprises de chansons country conçu par Francis Dordor et Eric Clermontet, qui s’ouvre sur Mes yeux bleus sont gris. On y trouve des reprises de chansons américaines, qui ont été adaptées par Laurent Chalumeau, qui signe tous les textes. Elles ont toutes en commun d’évoquer les états d’âme de la femme de classe moyenne, demeurée au foyer et se préoccupant surtout de ses sentiments. Et donc d’amour. Bovarysme à toutes les pistes. Y compris à la première, qui nous laisse voir couler les larmes de la dame aux yeux bleus, devenus gris suite à la trahison de Monsieur. Ce sera, avec A nos beaux jours, le seul single tiré d’un album qui, pourtant très soigné, n’a pas trouvé son public.
« J’ignorais
Qu’un jour j’aimerais jaune ».
C’est ainsi que se termine le refrain d’Un chant de sirènes, la seule chanson inédite, signée Laurent Chalumeau et Eric Clermontet. Un blues magistralement interprété sur le thème de l’amour qui s’achève,  avec en point d’orgue ce beau jeu de mots qui en fait apparaître toute la tristesse. Cela aurait pu constituer le deuxième single, et surprendre, et -pourquoi pas ?- faire un tube… En France aussi il y a des chanteuses blanches qui chantent le blues à merveille. Mais Michèle Torr a déclaré plus tard qu’elle n’aimait guère cet album…

Ainsi se termine une décennie qui montre la liberté qu’a prise Michèle Torr d’explorer différents univers musicaux avant d’entrer dans un nouvelle période qui lui fera prendre un nouveau virage puisque, en 1996, elle va devenir sa propre productrice.

1996 -2005 : la renaissance

     La quatrième décennie de sa carrière, on pourrait l’appeler « la renaissance » car Michèle Torr, après une période de recherche constante de nouvelles musiques et de nouvelles voies artistiques, décide enfin de reconquérir la liberté, de prendre son envol en devenant sa propre productrice : pour cela, elle fonde MT Production. Elle produira elle-même les 5 spectacles parisiens des dix années suivantes: les Olympia de 1996, 1998, 2002 (et 2003) ainsi que celui de 2005, et le Casino de Paris de 1999. C’est la scène qui lui permettra de continuer à briller dans l’univers de la chanson française. Sortiront aussi 2 albums de chansons inédites : Seule en 1997et  Donner en 2002, un album de reprises d’Edith Piaf C'est l'amour, en 2003, plusieurs CD enregistrés en public : Le meilleur de Michèle Torr en public en 1996,  Portrait de scène, en 1999, Olympia 2002 et 2005 ainsi qu’un album Acoustique, en 2001. Michèle Torr reste ainsi une figure de la chanson, respectée et suivie par un public fidèle. En quarante ans de carrière, cette maturité artistique l’a rendue encore plus forte et chacun de ses retours gagnant sur le devant de la scène le montre. Michèle Torr prouve encore qu’aussi bien physiquement qu’artistiquement, elle n’a pas pris une ride et qu’il faut compter avec elle, même si les cicatrices sont toujours là. Elle brûle les planches, offrant au public des spectacles débordant d’énergie.
     C’est donc en productrice de son nouveau CD, Le meilleur de Michèle Torr en public, et de son spectacle que Michèle revient à l’Olympia du 9 au 14 janvier 1996. Elle y chante essentiellement ses succès, ainsi des chansons plus confidentielles telles que Ne m’oublie pas, La prière sévillane et son nouveau single, Sortir ensemble, signé Hervé Vilard et Didier Barbelivien. Tu ne vaux pas une larme est devenu Dans le blues de l’amour. Un nouveau triomphe après ceux de 1980, 82 et 87, avant de partir pour près de deux ans d’une longue et très belle tournée à la fin de laquelle elle rôde des titres de son prochain album, Seule.
     Michèle Torr y ose reprendre la plume et s’investit plus encore dans l’écriture de ses chansons, dont elle cosigne six titres sur douze. Et c’est le premier album de chansons originales qu’elle autoproduit, seule, comme une grande… Seule est une très belle chanson sur la place des femmes dans le monde, poupées de chiffon blessées, voilées, prisonnières de la folie des hommes, et sur celle de l’une d’entre elles en particulier : la place de la chanteuse, chanteuse d’un soir qui trouve auprès du public un refuge, une forme d’amitié, mais  au prix de son intimité, car il lui vole son histoire, entre mensonge et vérité. Une chanson qui pose des questions plus qu’elle ne donne de réponses. Qui parle aussi de l’amour, de mariages, des deuils qui la déchirent, de la solitude… « Je me suis enfin laissée aller à dire ce que je ressentais, ce que j’avais sur le cœur, mes émotions, mes états d’âme aussi, souvent des choses que je vis, ou que j’ai vécues… » confie-t-elle au journal Platine. Pour Seule, elle retrouve Christian Accardi qui avait cosigné avec Claude Perraudin le très beau Ne m’oublie pas en 1991. Elle chantera aussi quatre autres chansons qu’elle a écrites sur la scène de l’Olympia, où elle revient dès janvier 1998 : Tes silences, Regarde-les, La fille du soleil, Tant je t’aime. En 1997 également, elle est nommée Chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres par le ministre de la Culture, avant d’être élevée au grade d’Officier en 2002.
     Ensuite, deux chansons inédites ont été enregistrées en public en 1999, et sont sorties sur le double CD Portrait de scène. Toutes deux sont signées Michèle Torr et Daniel Mecca. La première c’est Sur les routes. Sur la vie d’artiste. La seconde, c’est Charlotte qui sera aussi présente sur le single Je te dis oui qui sortira en septembre 99. Michèle Torr s’adresse à sa petite-fille Charlotte, la première de ses petits-enfants. Elle est tout à la fois petite, douce, fragile, ange, soleil, île, paradis, chanson, poème et  source, « un peu de moi que je retrouve en toi… », la « petite Charlotte que j’aime » C’est une jeune grand-mère qui s’émeut et s’émerveille d’un « bout de vie qui babille » comme elle le prévoyait dans Je serai ton amie en 1993, et c’est finalement son fils, Romain Vidal, qui lui aura le premier donné cette joie. Charlotte (la chanson) sera présente sur scène au Casino de Paris prévu du 9 au 14 septembre 1999. Chaque soir est annoncé un invité surprise : C’est Carol Fredericks le 9 (pour un duo sur Et toute la ville en parle), la troupe de Roger Louret le 13 (pour un medley)…Mais C. Jérôme, malade, ne viendra pas. Michèle y chante son nouveau single, Je te dis oui, crée Ne lui reparlez plus d’amour et Je ne suis qu’une femme, ainsi que Ma star à moi (signée Jean-Jacques Debout) et L’an 2000 qui restent  à ce jour toutes deux  inédites. Sa fille Emilie Vidal vient la rejoindre sur scène pour danser.  Elle reprend La quête de Jacques Brel, qu’elle chante à cappella. Un spectacle très riche. Mais Michèle a le sentiment d’avoir été moins à son aise dans cette salle qu’elle ne l’est à l’Olympia.
     Après une tournée Acoustique en 2001, Donner sort en avril 2002. C’est l’album « coup de cœur » de la grande majorité des admirateurs de l’artiste. Des chansons imprégnées de tristesse, pour chanter l’amour, avec des auteurs-compositeurs avec lesquels elle n’avait jamais travaillé auparavant. Elle souhaite ainsi renouveler son répertoire. Il comporte trois nouvelles chansons cosignées par Michèle Torr. D’abord Comme ces pianos, avec Santo Barracato, le frère de Frédéric François. Ensuite Tu veux chanter, en duo avec David Lazaro. Au sujet de la transmission de la passion de la chanson, du partage du goût de chanter. Le chant, conçu comme une sorte de thérapie. L’essentiel, lui dit-elle, est de ne pas mentir au public, la sincérité avant tout… La chanson est reprise en duo avec Eric Payan, pianiste et arrangeur, sur la scène de l’Olympia en novembre et janvier 2003, et sort aussi sur le double CD du spectacle en avril 2003. Un moment fort de la deuxième partie de ce spectacle. Un beau duo-duel de voix à l’accent du sud qui a fait vibrer le music-hall du boulevard des Capucines. Michèle Torr signe aussi Emmène-la, sur la dépression après une rupture.
L’Olympia 2002, qui suit la sortie de l’album Donner, est d’abord annoncé du 12 au 17 novembre, puis raccourci à 4 jours, du 14 au 17. Très vite complet, il faudra ajouter deux dates, à guichets fermés aussi : ce sera début 2003, les 11 et 12 janvier. Accompagnée du quatuor à cordes d’Alexandra Cravéro, Michèle crée C’est ma première, cosignée avec Eric Payan. C’est ma première est une variation sur le thème de Rentrer sur scène, avec l’évocation du trac avant l’entrée en piste, mélange de peur et de plaisir, et  un hommage appuyé à ses parents, par la citation de A mon père : « ce facteur du courrier du cœur qui a toujours fait mon bonheur » et  cette petite phrase : « au moment où tapent les trois coups, je caresse une alliance à mon cou », alliance dont on sait bien qu’elle appartenait à sa mère. « C’est le théâtre de ma vie, mes parents me sourient… » tout deux réunis très haut dans le ciel, jusqu’où les notes sont montées. La chanteuse n’est apparue sur scène qu’au milieu de la chanson.  Par ailleurs, sur le piano d’Eric Payan, on verra un peu plus tard l’ours en peluche que lui a offert sa mère à l’occasion de son premier Olympia. Là, elle chante les titres de Donner, elle reprend La Quête de Brel a capella, Aimer est plus fort que d’être aimée (de Balavoine, sorti en bonus sur un Best of fin octobre) et surtout Le mots bleus du chanteur Christophe, pour un moment de très forte émotion…Le spectacle de 2003 sera le même, à ceci près que le final ne sera pas Chanson inédite, mais C’est l’amour, d’Edith Piaf, et Michèle Torr annonce son intention de reprendre Piaf et de revenir très vite à Paris,  à l’Olympia, pour y fêter ses quarante ans de carrière.
     Le spectacle Michèle Torr chante Piaf (C’est l’amour) est annoncé dès le 13 octobre 2003, jour de la sortie du Cd ainsi intitulé,  jour du quarantième  anniversaire des obsèques de Piaf et de la signature de son premier contrat par Michèle Torr, pour les 11, 12  et 13 mars 2005. La sortie de ce nouvel album prouve une fois de plus qu'elle est une véritable interprète, au sens noble du terme et  crée, avec un plaisir évident, un univers fait de nuances et de subtilités. On y entend la voix, magnifique, brute, ample et incandescente, en alternance sur des orchestrations sobres où le piano domine (C’est l’amour – ambiance très « soul music » par moments-, Mon Dieu, La belle histoire d’amour, Les amants d’un jour, Non, je ne regrette rien, Les mots d’amour) et d’autres qui nous emmènent ailleurs: au cœur d’une fête foraine (Mon manège à moi), en Orient (Jezebel), tandis que La vie en rose prend des teintes exotiques,  gitanes pour La foule, et que Padam…Padam…(qui évoque la passion de chanter, jusqu’aux confins de la folie) , L’accordéoniste, Hymne à l’amour prennent des couleurs de rues populaires parisiennes ou de bars de la Nouvelle-Orléans. Michèle Torr chante aussi le blues avec T’es l’homme qu’il me faut, reprend encore –sur un rythme très lent cette fois, avec de lumineuses guitares- Exodus, et ajoute un oppressant Je sais comment,  avant de confier au seul Jean-Michel Bernard l’interprétation uniquement instrumentale de Milord.
Finalement, après une longue tournée au cours de laquelle il a beaucoup évolué,  le spectacle de 2005 n’aura ni le titre, ni le contenu initialement prévus; certes, la chanteuse reprend quatre titres de Piaf mais, outre ses propres tubes, elle chante son nouveau single, C’est un message, ainsi que On a toujours besoin (offerte par Henri Salvador), Un prince en Avignon (hommage à Gérard Philipe, créée par Esther Ofarim en 1969) et un inédit, Côté soleil (La couleur des mots),  un titre pour faire la fête et couronner 40 ans largement révolus d’une carrière diversement rythmée, mais lumineuse et colorée. Signée Michèle Torr et Daniel Mecca. On la retrouvera, autrement orchestrée, sur un rythme hispanisant sur l’album La louve en 2006…
     Ces 40 ans de chansons sont complétés par un livre autobiographique en 2005 aux éditions Jacques-Marie Laffont, La Couleur des mots,  coécrit par Laurent Fialaix, où elle raconte sa vie, son parcours d'artiste, ses succès et ses échecs. « J'avais commencé à l'écrire en imaginant que je parlais à mon père, qui est mort il y a deux ans en janvier 2002, et puis je suis allée jusqu'au bout. Quand les parents sont partis, je pense qu'on a plus de liberté pour dire des choses. Pour moi, c'est un premier regard en arrière ». Elle confie que petite elle donnait des couleurs aux mots, d’où le titre de son livre. Elle nous parle dans ce livre de ses envies d’élargir son champ artistique, de faire du théâtre, de jouer la comédie, de participer à une série télé. Elle se confie avec pudeur sur ses relations professionnelles et personnelles avec Jean Vidal, son mari, son producteur, son mentor, décédé le 23 juillet 2001, sur son deuxième mariage avec Jean Pierre Murzilli en 1995, sur leur séparation deux ans plus tard lorsqu’ils divorcent d'un commun accord mais continuent de vivre ensemble, sur la disparition de ses amis comme C. Jérôme décédé le 14 mars 2000, ou de Jean Albertini, décédé le 06 novembre 1996...
     La sortie  du double CD et du DVD Olympia 2005 sera le prétexte à deux dates exceptionnelles au Petit Journal Montparnasse, les 11 et 12 novembre 2005, occasion de reprendre aussi deux chansons de Pierre Bachelet : Ecris-moi et  Sans amour, ainsi que Pour ne pas vivre seul de Dalida et Stormy weather.

     Michèle Torr est une artiste qui a su évoluer avec son temps. Elle reste encore incon­tour­nable dans les années 2000, après quarante ans de carrière. Elle est certes apparue moins souvent à la télévision, conséquence de la baisse progressive d’émissions vouées à la chanson française, hormis des émissions de variété nostalgiques, telles que Succès fous ou encore Les années tubes.  Elle est restée cependant très fidèle à Pascal Sevran et à son émission La chance aux chansons où elle a fait régulièrement des apparitions. Elle a enchaîné une quinzaine de compilations de ses anciens succès, qui sont sorties, parfois à son insu, dans différentes maisons de disques. Aidée par son mari Jean-Pierre Murzilli et son fils Romain Vidal qui l’a produite sur scène, elle est devenue une femme d’affaires, ce qui lui permet de continuer à exercer à sa guise son métier d’« artisan de la chanson française ». Et elle a continué d’habiter toutes les scènes, de France et parfois d’ailleurs, avec bonheur.
2006-2014
La mue




     Pendant la période 2006-2015, Michèle Torr a pu sembler immuable. Cependant, entre stabilité et prise de risque, entre conformisme et indépendance artistique, on redécouvre une Michèle qui timidement serait restée la même mais une Torr qui serait parfois plus visiblement différente.

     La désormais célèbre tournée Age Tendre et tête de bois, animée au début par François Deguelt et Hubert Wayaffe, débute en mars 2006. Les artistes de cette première saison sont Richard Anthony en invité d’honneur, Jean-Jacques Debout, Michel Orso, Demis Roussos et quelques autres dont, bien entendu, Michèle Torr qui a dit oui la première au producteur Michel Algay. Elle restera fidèle durant 10 années à ce spectacle bien rôdé, alternant spectacles et tournées en solo avec participation à certaines saisons d’Age Tendre. Elle sera des saisons 1, 2, 5, de la « Dernière tournée » et de « Age tendre, rendez-vous avec les stars ». Là, elle apparaît telle qu’on se la rappelle et elle vient essentiellement rechanter ses tubes mais aussi, y compris dans les plus grandes salles, interpréter une chanson « a capella » qui lui vaut immanquablement une ovation. Sa « spécialité ». Elle y interprètera aussi, chaque fois ou presque, une nouvelle chanson.

     En mai 2006, elle sort une compilation plus personnelle, disponible uniquement chez les marchands de journaux, intitulée La louve. On y trouve la chanson La Louve de 1974 enregistrée pour la deuxième fois en studio, mais aussi Monsieur Cézanne chanté avec les Petits Chanteurs d'Aix-en-Provence, dirigés par Gérard Mouton, créé à l’occasion du centième anniversaire de la mort du peintre, ainsi que de la plupart des chansons dont elle a signé les paroles. Certains titres ont été réenregistrés pour l’occasion.

      Le 25 février 2007, Michèle est la marraine de l’élection de Super Mamie France 2007, et ce à quelques mois à peine de la naissance de la petite Nina. Après Charlotte et Samuel Vidal, celle-ci fait de Michèle une grand-mère pour la troisième fois. Raphaëlle sera sa quatrième petite-fille.

     En 2007, Michèle Torr est redevenue Michelle Torr avec deux « l »: et c'est avec son prénom écrit tel qu’à l’état civil qu’elle prépare son nouvel album. Après avoir songé à un disque de reprises de chansons réalistes, c’est finalement dans le prolongement du succès croissant de la tournée Age tendre et tête de bois que la chanteuse, surfant sur la vague de la nostalgie, choisit comme titre de l’album Ces années-là. 7 reprises (Claude François, Dalida, Gibert Bécaud, Pétula Clark, Elvis Presley…) et 7 inédits. Le spectacle du même nom affichera « Complet » du 10 au 13 avril 2008 à l’Olympia : quelques jours après le trentième anniversaire de la mort de Claude François, elle reprend Hier est près de toi et Cette année-là, lui dédie On aurait pu s’aimer d’amour ; elle chante ses deux premiers succès : C’est dur d’avoir seize ans et Dans mes bras oublie ta peine ; dans une deuxième partie plus grave, elle reprend à nouveau Pour ne pas vivre seul, crée C’était toi, On se reverra et Toutes ces nuits ainsi que Son paradis c’est les autres, en hommage à Sœur Emmanuelle … Ce sont les prémices d’un changement.
     Pendant l’été 2008, Michelle, élue artiste de l'année 2008 par La Poste qui a créé un timbre à son effigie, a participé au dixième anniversaire de la tournée d’été d’Ici Paris organisée et présentée par le regretté Dominique Dalbret. Ce sont des spectacles gratuits par lesquels elle revendique son statut de chanteuse populaire.
Le double CD et le DVD du spectacle Ces années-là sortent en novembre, sur Internet seulement et, en décembre, Mme le Maire Maryse Joissains Masini, remet à Michelle la médaille d’honneur de la ville d’Aix-en-Provence.

     Victime d'un accident cardio-vasculaire en février 2009,  sa première réapparition après son malaise se fait chez Patrick Sébastien dans Les années bonheur le 30 mai 2009. Elle semble à nouveau en pleine forme.
Toujours égale à elle-même, elle sort le 21 mars 2011 une triple compilation de ses titres, Michelle Torr Best Of 3 Cd, avec 60 chansons dont 3 inédits (Avant d'être Chanteuse, Vous m'avez tout donné, Notre père avec la participation de Claude Barzotti). Ce Best Of s'est classé neuvième des ventes en France dès la première semaine et s’est écoulé à plus de 50 000 exemplaires.
Et du 6 au 8 mai, encore et toujours à l’Olympia,  Avant d’être chanteuse marque donc ses retrouvailles avec Didier Barbelivien, qui a signé nombre de ses tubes entre 1977 et 1988 et signe la chanson du même nom, ainsi que la musique du Notre Père et les paroles de Vous m’avez tout donné, sur l’air traditionnel des Marches du palais. Un spectacle très riche musicalement avec une version reggae de Non à tous les garçons en clin d’œil à Gainsbourg qui l’a écrite pour elle en 1965, une très belle version orientale d’A faire pleurer les femmes, une version country de Je m’appelle Michèle (Rhinestone cow-boy, à l’origine!), avec aussi le blues de T’es l’homme qu’il me faut, de Piaf, la promenade sur le Boulevard du rock et la visite du Château des grisailles, les  reprises de Je te portais dans mon cœur d’Elvis Presley (sur A nos beaux jours en 1995, puis sur Ces années-là en 2008 avec pour titre Toujours dans mon cœur), des Roses blanches (comme en 1980) et du Petit bonheur de Félix Leclerc, à l’heure où le spectacle Le Retour de nos idoles se produit au Québec. Très beaux arrangements signés Eric Payan, qui signe aussi Naïs, transition entre les deux parties. Petit clin d’œil à Samuel Vidal qui la rejoindra sur scène pour l’accompagner à la batterie sur la dernière chanson, Toutes ces nuits.
Le CD et le DVD sont finalement sortis en février 2013 dans le commerce.

   C’est au cours de ce spectacle à l’Olympia, en préambule à son interprétation du Notre père, que Michèle (elle perd à nouveau un « l » mais retrouve l’accent !)Torr déclare :
« Pour moi chanter c’est donner, bien sûr  c’est aimer, mais c’est aussi prier ».
C’est qu’a dû commencer à germer l’idée qu’elle va exprimer à la fin de l’année 2011, celle d’enregistrer, non pas comme le lui demande sa maison de disques Sony un disque de chant de Noël – elle prétendra de façon expéditive l’avoir déjà fait -, mais un disque de chansons spirituelles, en rapport avec la religion. Alors qu’elle a chanté Son paradis c’est les autres pour Sœur Emmanuelle décédée entre temps, puis le Notre Père, dans les six mois qui vont suivre, dans le sillage du succès des Prêtres, elle va concevoir un album qu’elle enregistrera au cours du mois d’août 2012 dans un studio du Gard, et qui sortira le 12 novembre 2012, alors qu’aura déjà débuté une longue tournée de près de cinquante dates avec un spectacle intitulé En concert avec vousChanter c’est prier est l’un des plus attachants albums que Michèle Torr ait enregistré mais il a suscité quelques réserves, y compris dans son plus fidèle public, malgré la « vraie spiritualité » qui  s’en dégage. Elle y reprend des chansons de variété, signées par les plus grands auteurs qui n’ont pas eu l’idée d’écrire pour elle : l’Ave Maria d’Aznavour, L’envie d’aimer d’Obispo, Il faudra leur dire de Cabrel, La mémoire d’Abraham de Goldman, tandis que le journaliste et écrivain David Lelait adapte pour elle Amazing Grace, Didn’t it rain et Gracias a la vida. On y trouve aussi Je crois en toi de Didier Barbelivien, Il suffira d’un signe de Gérard Palaprat et l’hymne provençal, Coupo Santo.
Puis, dans la foulée de sa tournée de plus de quarante villes en France et en Belgique, elle s’est produite au Québec, avec Herbert Léonard, pour une autre longue tournée, en avril et octobre 2013, après avoir participé à la première édition du Retour de nos idoles quelques mois plus tôt, en 2010.

          Artiste au grand cœur, Michèle Torr a, depuis quelques années, manifesté son soutien à diverses causes, telle la lutte contre le cancer avec l’association Ressource dont elle est présidente d’honneur et pour laquelle elle fait un gala en novembre 2008 à Aix-en-Provence ou sa participation à Tous ensemble contre le cancer à Villefranche-de-Rouergue en 2013. Auparavant, elle s’est aussi investie dans divers projets comme l’Opération Orange et les Tirelires de l’espoir ou encore les Mardis de Michèle : chaque année, un mardi, elle a donné un concert dont les bénéfices ont été reversés à l’association de Sœur Emmanuelle.
Mais le fils de Michèle Torr, Romain Vidal, est atteint d’une sclérose en plaques (SEP) qui a été diagnostiquée six ans plus tôt. La chanteuse décide de fonder avec lui une association pour récolter des fonds pour aider les malades dans leur quotidien et faire connaître la sclérose en plaques. SEP Pays d’Aix. Le Dimanche 21 juillet 2013 à 21 heures dans l'Enclos de la Charité à Pertuis (84), a eu lieu le premier concert exceptionnel donné par la chanteuse et son ami Hervé Vilard au profit de l’association et chaque année dans la même ville elle continuera à proposer un concert pour cette noble cause…Avec François Valéry et Claude Barzotti en 2014, Dave en 2015…L’argent récolté sera remis au Professeur Pelletier, qui exerce au CHU La Timone à Marseille.

Parmi les concerts exceptionnels de la chanteuse, on notera sa participation, en tête d'affiche, au festival Georges Brassens, dix-huitième du nom, le dimanche 4 mai 2014 à Vaison La Romaine : c’est elle qui a clôturé ce festival où se sont produits la même année Thomas Fersen, Georges Chelon, Romain Didier.
On l’a retrouvée ensuite à l’Olympia, en invitée d’honneur de Jean-François Gérold, « Le Condor », le jeudi 8 mai, pour interpréter avec un grand orchestre la Coupo Santo et ainsi participer à un tableau visuel et sonore aussi magnifique que typiquement provençal. Une aventure peut-être à suivre ?
Elle a participé aux Flâneries d’Art Contemporain d’Aix-en-Provence, organisées par Andréa Ferréol, le samedi 14 juin 2014, avec une séance de dédicaces au profit de l’association SEP Pays d’Aix et la lecture d’échanges épistolaires entre mères et filles (Mme de Sévigné, Colette, Calamity Jane), occasion aussi de montrer encore l’envie, la tentation de toucher au métier d’actrice en se faisant conteuse. Et aussi de se trouver là où on ne l’attend pas forcément, ce qui est de bon aloi pour une artiste.

Rendez-vous demain samedi 21 novembre de 10 heures à 12 heures sur
pour une émission spéciale Michèle Torr avec une interview de la chanteuse, qui se produira à Bergerac le dimanche 13 décembre et dans de nombreuses autres villes dans le cadre de sa tournée des églises : Chanter c’est prier.


Après l’émission du 21/11/2015 sur Bergerac 95, merci à
- Alain Boucherès, admirateur d’un village voisin,
- Patrick Brugalières, bergeracois, chef d’orchestre de Michèle Torr de 1986 à 1988,
- L’Abbé Martial, homme d’église et organisateur de spectacles sur Bergerac,
- Matthieu Chocat, chef d’orchestre de la tournée Chanter c’est prier.
Merci à Philippe Bastide, directeur de Bergerac 95 et animateur de l’émission.
Et merci à Madame Michèle Torr d’avoir répondu à l’invitation.

Dans quelques jours, nous reviendrons sur cette émission, et en particulier sur les confidences que Michèle a faites, alors qu’elle évoque rarement de tels sujets, comme ses états d’âme après le triomphe de l’Olympia 80. Ou bien la robe que, comme Cendrillon, elle a dû rendre au couturier qui la lui avait prêtée, après qu’elle eût rencontré son idole Johnny Hallyday lors d’un gala de l’Union. 
Nous reviendrons bien sûr sur la tournée des églises, sur le disque qu’elle n’a pas fini d’enregistrer à cette occasion, les DVD qui devraient sortir bientôt, incluant l’Olympia et le Trianon 2015 ainsi que le spectacle Chanter c’est prier, avec des chansons de Noël et des titres qu’elle n’a jamais chantés et ne rechantera peut-être jamais sur scène, parmi d’autres, issus de son répertoire, comme Mon ange, de Bruno Coquatrix qu’elle avait enregistré en 1968.
Rendez-vous donc à partir du 5 décembre pour la première date de la tournée des églises.



     ©ED & GD.