mardi 27 octobre 2015

Michèle Torr, Intimiste, au Trianon : le rouge et le noir.



C’est au Trianon, Boulevard de Rochechouart, dans le 18ème arrondissement, que s’est prolongé… et terminé –à moins que, finalement, la tournée des églises Chanter c’est prier ne passe par Paris et l’église de la Madeleine en 2016- le dimanche 18 Octobre, à 16 heures, le Paris de Michèle Torr.
Ce ne fut pas un spectacle intimiste tel que le laissait préfigurer son titre, avec un piano-voix-violon du début à la fin, mais certainement le spectacle le plus personnel et le plus riche de la chanteuse sur une scène parisienne. Et un vrai "cœur à cœur" a bien eu lieu.
Elle s’est montrée, vêtue de mousseline rouge et de dentelle noire puis de satin noir tout brodé de strass, telle qu’elle avait envie de le faire depuis longtemps.
Enfin, serait-on tenté de dire.


C’est Michèle Torr, bien sûr, qui est entrée en scène et a choisi d’égrainer, de trop prévisible façon peut-être, un certain nombre de ses tubes : Midnight Blue en Irlande, Discomotion, J’en appelle à la tendresse, J’aime (extrait), Emmène-moi danser ce soir et Je m’appelle Michèle, alors que ses musiciens et choristes ont entonné, entre les deux parties du spectacle, un « medley » au cours duquel on a pu entendre, presque dans l’ordre chronologique, C’est dur d’avoir seize ans, Dans mes bras oublie ta peine, Ce soir je t’attendais, Cette fille c’était moi, Une vague bleue, Lui et Une petite Française. Et en entendant les choristes fredonner ces airs-là, on comprend aussi pourquoi on a aimé cette voix unique, profonde, à la diction parfaite. Peut-être y manquait-il Un enfant c’est comme ça, mais entendre ces extraits aura été bien agréable.


Pour la partie intimiste telle qu’on l’attendait, on a pu écouter A mon père ainsi que, pour débuter la seconde partie,  Chanson inédite (intimiste sur le plan des paroles, mais pas des arrangements !),  le très théâtral Et toute la ville en parle et surtout, avant Qu’est-ce qu’ils disent ?Diva...
Mais là où elle a le plus étonné, c’est en recréant, dans ce beau théâtre du Trianon, au pied de la butte Montmartre, l’ambiance des cafés-concerts d’antan, en donnant à son spectacle des couleurs de récital de chanteuse réaliste, auxquelles ont contribué la reprise de Je suis seule ce soir de Léo Marjane, mais aussi T’es l’homme qu’il me faut d’Edith Piaf, Il se peut que je t’aime encore, de Charles Dumont (et Sophie Makhno), Si je n’avais plus, d’Aznavour, ou encore Quand on n’a que l’amour, de Brel, interprété a cappella et sans micro…
Mais Michèle Torr aime le rire et le music-hall, c’est pourquoi elle a aussi choisi de proposer, affublée d’un grand « truc en plumes », un « medley » de chansons de Mistinguett tout empreint de gouaille bien parisienne, avant  le primesautier Ils s’aiment et alors ? (sur les amours homosexuelles, qui rappelle par son thème le Comme ils disent d’Aznavour). Et puis elle a chanté Diva, qui a pris ici toute sa dimension, à la fois intimiste, avec le ton de la confidence et des accents de Barbara pour s’adresser au public, mais aussi humoristique, avec l’insertion par Georges Chelon dans la mélodie d’Alice Dona, de l’extrait de L’Air des Bijoux de Charles Gounod, cher à La Castafiore, tout en restant  dans l’ambiance café-concert qui teintait l’ensemble du spectacle. Et c’est avec humour aussi qu’elle s’est tournée vers nous pour dire, en réponse à la question habituellement posée par les journalistes pour savoir si cela ne la gêne pas d’être une chanteuse populaire, avec un zeste d’Arletty dans le ton et dans le geste : « Pas du tout ! », annonçant ainsi sa dernière chanson, le festif  Qu’est-ce qu’ils disent ? .


Elle a tenu la scène sans filet avec vingt et une chansons devant un public de fidèles admirateurs venus moins nombreux qu'au premier rendez-vous à l’Olympia, mais plus large que celui d’ « Amour toujours ». En effet, le choix de cette salle, au pied de la butte Montmartre, a attiré un public sensiblement différent, composé de personnes de toutes tranches d'âge qui venaient découvrir pour certaines pour la première fois, sur scène, la chanteuse populaire. Et elle a confié qu’elle renouvellerait, dans de futurs spectacles, ce type d’initiative, alors, pourquoi pas, un jour, en province, du côté de chez Joséphine Baker?


Alors que de Chanter c’est prier il n’est resté que Coupo Santo, de son dernier album Diva, Michèle Torr aura donc chanté cinq chansons, Je ne veux chanter que l’amour, Tout l’amour du monde, Il se peut que je t’aime encore, Diva et Qu’est-ce qu’ils disent ? dans un spectacle où elle se sera essayée à la formation  intimiste du piano-violon-voix, au répertoire de la chanson réaliste et à la « revue » tout en restant Michèle Torr, une chanteuse dont le public n’aime guère la voir s’éloigner beaucoup de son registre habituel (sa tentative de monter un spectacle entièrement consacré à Piaf le lui a montré. Espérons qu’il n’en sera pas de même pour Chanter c’est prier et la tournée des églises). Certains auront été touchés par certaines de ses interprétations car elle était très « en voix » et s’est montrée très émouvante, d’autres étonnés qu’elle ait ainsi osé s’amuser en imitant Mistinguett ou en se moquant d’elle-même, et tous ravis de voir que, malgré tout, elle était restée… la même. Et tant pis s’il en est qui pensent qu’elle aurait pu aller plus loin dans l’une ou l’autre des voies qu’elle avait choisi d’explorer, tant pis si l’orchestre de Richard Gardet, bien qu’épaulé par M. Guy Mattéoni, dont la fille Stella avait assuré la première partie, se soit révélé un peu terne, la dame a tenu à faire plaisir à un public dont elle sait quels sont les goûts tout en étant fidèle aux siens.

©ED & GD.


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