mardi 23 décembre 2025

Un soir de Noël en Provence, avec Michèle Torr

 

Du Noël provençal, il en a été question en 1988, avec le livre La cuisine de ma mère, dans lequel la chanteuse donne ses recettes personnelles des plats de Noël et en particulier des treize desserts. Ce livre sera réédité avec des photos inédites en 1996.

De Noël, voici ce qu’elle écrit dans le chapitre Noël en Provence:

"En Provence, la Noël commence le jour de la Sainte Barbe. Les enfants font germer des grains de blé, des lentilles et même des haricots blancs. Toutes les pousses vertes obtenues fourniront chaque jour l’herbe de la crèche entre le 24 et le 31 décembre.

Pour moi, petite fille, c’était la fête de mon grand-père qui ne s’appelait pourtant pas Barbe, mais Emile Balbo. On l’a toujours appelé le père Barbe, donc on lui fêtait sa fête ce jour-là, quand on faisait germer.


Vers le 15 décembre, les enfants vont sur les marchés chercher las santons qui manquent à leur crèche. Ces petites figurines sont en bois sculpté ou le plus souvent en argile. Merveilleusement peintes et très colorées, elles sont vêtues de costumes provençaux du XIXe siècle. Elles représentent les personnages traditionnels de la Nativité. La plupart apportent des offrandes sous forme de nourriture : femme à la poule, femme au fagot, l’homme à l’oie, la poissonnière porte sous chaque bras un panier chargé de poissons, le boulanger apporte la pompe à huile. Chez M. Deymier, le santonnier de Mérindol, j’ai complété la crèche de mon enfance.

Dans certains villages comme à Séguret, il y a une crèche vivante pour la messe de minuit et, autre particularité, les recettes des plats de la veillée sont inscrites sur des tableaux dans le village.

La tradition exige que le réveillon soit un en-cas pour aller jusqu’à l’église et patienter jusqu’à minuit. Le repas débute par une salade de céleri à l’anchoïade et se poursuit souvent par le grand aïoli.

A Marseille, on mange encore traditionnellement le gratin de cardes ou des salsifis en sauce blanche.


Dans la Drôme, c’est la soupe de crouzets (petits carrés de pâtes cuits dans un bon bouillon).


Puis le dîner se poursuit par les treize desserts : symbole du Christ est des douze apôtres. Bien sûr la pompe à huile, car sans elle il n’y aurait pas de Noël, le nougat noir, le nougat blanc, les mendiants: amandes, figues, noisettes, raisins secs, dattes, puis les fruits frais bien mûris depuis l’automne : poires, raisins, grenades, melon d’hiver et bien sûr des confiseries : calissons, fruits confits d’Apt, pâtes de coings.


Dans la Drôme, on sert aussi des tartes aux fruits et à Carpentras, la tarte d’épinards sucrée.


Toutes ces bonnes choses font patienter jusqu’à minuit.


Au retour de la messe, il était, autrefois, traditionnel de manger du boudin, aujourd’hui il est remplacé par la dinde rôtie.


Dans beaucoup de villages, les vieux Provençaux racontent leurs souvenirs des noëls passés. La bûche qui était choisie bien grosse pour durer dans l’âtre trois nuits de suite. L’aïeul de la famille trempait une branche de céleri dans le vin cuit et en arrosait la bûche. Quand le vin crépitait sous les flammes, il appelait les disparus pour qu’ils participent eux aussi à la fête et disait en provençal : « Ah ! Seigneur, faites que si l’on n’est pas plus l’an prochain, on ne soit pas moins ».

Le couvert était dressé sur trois nappes blanches pour rappeler la Trinité et le dîner commençait obligatoirement par le céleri à l’anchoïade, réputé pour donner de la vigueur aux messieurs. Tradition que l’on respecte toujours aujourd’hui. »

Michèle TORR, La cuisine de ma mère, Michel Lafon, 1988, et Les Presses du Midi, 1996.

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