Michèle Torr chante sa famille (suite).
«As-tu quelquefois pensé
Que j’ai dix-huit ans
Que j’ai dix-huit ans
Et que tu me traites encore
Comme une enfant
Comme une enfant
Je sais vous êtes très gentils
Vous ne me souhaitez pas de mal
Mais si je veux choisir ma vie
Il n’y a rien de plus normal
Dis-moi ma mère
As-tu quelquefois pensé
A tes dix-huit ans
A tes dix-huit ans
Et ne t’es-tu pas trompée
De temps en temps
De temps en temps
Pourtant au bout de ton chemin
Tu vois tu arrives au bonheur
Et si je veux trouver le mien
Laisse-moi écouter mon cœur
Allons ma mère je sais que l’on ne voit pas
Passer le temps
Passer le temps
Mais bientôt tu t’occuperas
De mes enfants
De mes enfants
Et ma fille me dira
Avant longtemps
Avant longtemps
As-tu quelquefois pensé
Que j’ai dix-huit ans
Que j’ai dix-huit ans
As-tu quelquefois pensé
Que j’ai dix-huit ans
Que j’ai dix-huit ans… »,
As-tu quelquefois pensé, 1965.
C’est ce que dit une toute jeune fille à sa mère, et c’est
ce que n’importe quelle adolescente ou jeune adulte pourrait dire à la sienne
quand leurs violons ne s’accordent pas. Rien de très personnel ici.
En 1981 Michèle Torr reprend Maman la plus belle du monde, sur l’album J’en appelle à la tendresse ainsi qu’un tube des années 70 There's no more corn on the brasos du
groupe The Walkers qui devient :
« Quand je suis née
De bonheur et
de joie
Serrant sur
son cœur tout son rêve
Ma mère a
pleuré
Quand dans un
sourire
J’ai dit Maman
Et le jour où
toute seule vers mon père j’ai marché
Ma mère a
pleuré
Quand elle m’a
vue dans ma robe de mariée
Devant le
bonheur de sa fille
Ma mère a
pleuré
Mais c’est la
vie qui nous a séparées
Et le jour où
est né mon enfant mon amour
Moi j’en ai
pleuré »,
Ma
mère a pleuré.
Ce n’est pas
non plus de sa mère qu’elle parle là, la sienne n’a pu assister ni à son
mariage avec Jean Vidal, ni à la naissance de l’un de ses enfants, puisqu’elle
est décédée en 1965 dans un accident de voiture, au volant de la 4L que sa
fille lui avait achetée avec ses premiers cachets. C’est à Marseille où elle
chantait après quelques heures passées avec sa famille brièvement réunie avant
que Clémente Tort n’accompagne son mari à la gare pour qu’il se rende à son
travail que la jeune chanteuse a appris le drame. C’était fin décembre.
« Tu as
été le témoin
De mon plus
grand chagrin
J’ai pleuré
dans tes bras
Des choses
qu’on n’oublie pas »,
On
aurait pu s’aimer d’amour, 2008. C’est dans les bras de Claude François
à qui elle rendait hommage dans cette chanson qu’elle a versé ces larmes.
C’est une
photo d’elle-même bébé dans les bras de sa mère qui a été choisie pour le 45
tours
J’en appelle à la tendresse.
« Une
médaille d’anniversaire
Le dernier
cadeau de ma mère »,
Se trouve dans
Le
sac, en 1997.
Michèle Torr a chanté d’autres mères que la
sienne, celle du toréador César Rincon qu’elle a imaginée dévorée par
l’inquiétude chaque fois que son fils a affronté un taureau dans l’arène :
« Laissez
laissez Maria
Tout pour elle
s’arrêtera
Quand son fils
son seul Credo
Marchera vers
le taureau
Olé olé…
Et quand il
sera tout près de toi
Quand sa corne
enroulera ta muleta
Mon amour si
ta vie s’en allait
Je n’aurais
plus qu’à te rejoindre au Ciel…
Si tu
mourais »,
La
prière sévillane, 1993, adaptée de la chanson espagnole Salve
Rociera.
Les paroles
ont été écrites par Rafael de León et la
musique est de Manuel Pareja Obregón qui s'est inspiré d'un air médiéval de
galoubet et tambourin. Elle a été composée à l'origine pour le pèlerinage d'El
Rocío, en Andalousie. L’adaptation française est signée Pierre Grosz.
« Sur une idée de Michèle Torr ». Toutes les mères sont inquiètes
pour leurs enfants.
Alice Dona lui
fait chanter, parmi une pléiade d’autres chanteuses:
« Tu chantes
Seule avec tes
petits
Sans haine tu
chantes… »
La
chanson de la vie, en 1985. Au sujet des femmes du Tiers-Monde.
Au sujet de la Vierge, elle a repris deux Ave Maria, ceux de Charles Gounod et de
Charles Aznavour :
« Ave Maria
Toi qui fus mère
Sur cette Terre…
Implore ton fils pour nous »,
Ave Maria, 1978.
« Ave Maria
Ceux qui pleurent sont tes enfants
Toi qui donnas le tien
Pour laver les humains
De leurs souillures
Marie la pure »,
Ave Maria, 2012.
Et le
journaliste Rodolphe Hassold lui a écrit :
« Elle a
élevé tous ses enfants
Loin de la
ville et des tourments
Elle leur a
appris le soleil
La prière
avant le sommeil
Quand le matin
elle leur ouvrait
Délicatement
les volets
Elle leur
avait déjà préparé
Le café les
tartines beurrées…
Les événements
de 68
Les cris de
foule les Cohn-Bendit
Les barricades
de Saint-Germain
N’ont rien
changé à leur destin
Comme un vieux
bateau égaré
La France
venait de chavirer
Mais ils se
tenaient à l’écart
De se chemin
plutôt bizarre…
Elle a vécu de
sa passion
En se battant
à sa façon
En apprenant à
ses enfants
A ne pas vivre
au gré du vent…
C’est une mère
d’autrefois
Une dame de
principes et de loi
D’une humble
condition
Qui ne veut
pas de révolution… »,
Une
mère d’autrefois, en 1985. Portrait d’une femme au foyer, d’une mère
respectueuse des traditions porteuse de valeurs des plus conservatrices.
Il faudra attendre l’Olympia de janvier 1987
pour entendre une chanson signée Michèle Torr dans laquelle elle évoque celle
qui lui a donné le jour avant de l’accompagner en faisant maints sacrifices
dans son projet de devenir chanteuse, vivant à travers sa fille son rêve de faire une carrière. Une
version plus longue que celle de l’Olympia est sorti la même année sur I Remember You.
« Je n’ai
pas les mots ma mère
Je n’ai pas
les mots pour te raconter
Parler de ta
voix
De ta joie de
tes colères
Tu es lumière
tu es mistral
Mais aussi
caresse tendresse
Je n’ai pas
les mots ma mère
Je n’ai pas
les mots ma mère
Je n’ai pas
les mots pour te raconter
Parler de tes
yeux
Appel que je
n’ai pas compris
Regard
changeant ruisseau juste au bord de tes cils
Ma mère
Je n’ai pas
les mots ma mère
Je n’ai pas
les mots pour te raconter
Ma vie
aujourd’hui
La maison dont
tu as toujours rêvé
Le bonheur de
chanter
C’est avec toi
que je voudrais les partager
Je n’ai pas
les mots ma mère
Je n’ai pas
les mots pour te raconter
Mais je n’ai
pas envie
Les mots sont
inutiles
On ne raconte
pas la lumière… »,
Je
n’ai pas les mots, ou Les mots pour te dire, 1987.
C’est fin
décembre 1965 que Clémente Tort a perdu la vie. Et à la lumière de cette
information, on comprend mieux ceci :
« A la
Noël
Maman était
très belle
Comme la
poupée au pied du sapin vert
Dis-moi
pourquoi je n’aime plus les Noëls
Ni les fêtes
ni les anniversaires …
De temps en
temps
Tous mes chagrins
d’enfant
Sont comme des
pages arrachées dans un livre…
La vie passe
et rien n’est plus pareil »,
Fleur
de mai, 1987.
©ED&GD.