« Chanter, jouer la comédie, ce sont deux métiers
différents. Enfin pas complètement. Je pense que les chanteurs en général ont
envie de jouer la comédie, les comédiens de chanter. Cela se voit souvent. Et
j’ai envie aussi. J’espère faire au moins un film, un jour, intéressant »
a dit Michèle Torr sur le plateau de Sacrée Soirée, en novembre 87, avant
d’avouer qu’elle en avait déjà tourné un (Le diable aime les bijoux).
Le cinéma, le théâtre, la comédie… une envie, une tentation,
mais aussi un thème que l’on retrouve dans quelques chansons…
« Autour de moi je vois tourner
Un décor d’ombre et de papier
Pardonne-moi de ne plus croire
A cette illusion
On s’ennuie dans notre histoire
Le film est trop long… »
(Le film est trop long, 1966)
Cela pourrait être une définition du cinéma : décor
d’ombre et de papier, une illusion…
En 1966, 1967, 1968, tentée par le cinéma, Michèle Torr
arbore un look inspiré par Marylin
Monroe, qu’elle admire, cheveux blonds, courts mais pas trop, du volume, raie sur le côté, en particulier
sur la pochette de Pauvre Cœur. En 1971, les Japonais la compareront à Catherine Deneuve. Mais cela, ce n’est
pas du cinéma…
Une série de vols
mystérieux, de bijoux et de pierres précieuses, se produit dans de nombreux
pays européens. Ces joyaux ont tous appartenu à la collection d’une
organisation secrète, l’ancien Ordre de l’Aigle d’Or. Une exposition est
organisée à Tolède. Interpol monte la garde mais, malgré les précautions, un
autre vol se produit. L’enquête mène à un mystérieux personnage, le Duc, qui,
au XX° siècle, veut faire revivre cet ordre ancien.
Le film a été tourné en Espagne, le long de la côte
d’Alicante. C’est une coproduction entre l’Espagne, le Canada et la Tunisie. Il
est sorti au Canada sous le titre Le Diable aime les bijoux, et en
Espagne en 1969, puis à, nouveau en 1982, sous deux titres différents : Las
joyas del Diablo, puis El secreto del Toison de Oro. Il est
signé Jose Maria Elorietta. C’est un film dans lequel se mêlent action,
aventure, enquête policière, espionnage et satanisme.
Mais que fait dans l’histoire le personnage de Dorothea,
interprété par Michèle Torr ? D’abord, en duo avec Donald Lautrec, elle
chante. Si l’on en croit la chanson Si tu
pars, elle serait la maîtresse d’un homme impliqué (à quel titre ?)
dans le vol des bijoux, qui essaie de la préserver, mais, curieuse, Dorothea va
se trouver entrainée dans l’action. Sur les quelques images disponibles sur le
Net, on la voit sortie de sous un lit, ligotée et bâillonnée, puis très
vindicative lorsque le bâillon lui a été retiré ; on la voit aussi qui
assiste, enthousiaste, à un spectacle de
danse dans une boîte de nuit à Tolède, au son du flamenco (c’est que la danseuse
est aussi impliquée dans le vol des bijoux) ; elle apparaît enfin affublée
d’une perruque brune au cheveux lisses : c’est Dorothea qui, sous ce
déguisement, va solliciter auprès du Duc, le responsable présumé du vol des
joyaux, un emploi qui lui permettra de s’infiltrer dans son organisation. On
tremble pour elle, mais comme elle semble avoir la langue bien pendue, on ne se
fait guère de souci.
3 719 889 entrées en Espagne (tout de même!) et 150 000 au Canada.
3 719 889 entrées en Espagne (tout de même!) et 150 000 au Canada.
Peu de gens en France ont vu ce film qui semble être un
nanar culte utilisant les ficelles des films d’espionnage à la James Bond, et
qui a été jugé comme une « petite chose» avec des « comédiens sans
charisme » par la presse espagnole l’une des dernières fois où il a été
diffusé à la télévision ! Cela nous console un peu de ne pas l’avoir
vu…mais un peu seulement.
Par contre, si on ne parvient pas à se procurer la bande
originale du film, on peut écouter la chanson Si tu pars sur Youtube
ainsi que sur un CD compilation de Donald Lautrec sorti au Canada : Donald
Lautrec, Les grands succès, 2006 (Disques Mérite,
« Jupiter »). Si tu pars est la chanson 17. Signée
entre autres Mick Micheyl, aussi actrice dans le film.
« Ce n’est pas sorti et j’espère que ça ne sortira
jamais !
- Pourquoi ?
- Parce que c’était pas terrible, » a déclaré Michèle
Torr à Jean-Pierre Foucauld lors d’une Sacrée Soirée diffusée le 18
novembre 1987. Des images du film ont été diffusées et la chanteuse a estimé sa
carrière d’actrice définitivement compromise. En tout cas, elle aura bien ri,
et les spectateurs avec elle !
Après cet essai qui ne sera jamais vraiment transformé,
Michèle Torr enregistrera quatre titres pour le générique de 3 films et d’une
série télévisée :
-
il y aura d’abord Fleur
de pavot, pour L’homme qui trahit la mafia, produit en 1967. C’est une chanson
sur les bienfaits (tout relatifs) de la drogue que l’on entend dès le générique
de début de ce film de Charles Gérard, avec Robert Hossein, qui raconte une
enquête policière visant à élucider le meurtre d’un trafiquant de drogue
américain et de sa secrétaire, qui a aussi coûté la vie à une hôtesse de l’air.
Fleur de pavot, innocente fleur,
fleur du mal qui s’ignore, dont le
parfum fait rêver ceux qui n’ont plus rien, héroïne d’un roman qui vole en fumée,
illusion de plus que l’on a perdue, jolie fleur du mal, sur un rythme lentement
jazzy.
-
Puis Dis Pierrot,
pour Une
fille nommée Amour, en 1969, un film de Sergio Gobbi qui n’est pas non
plus resté dans les mémoires…Au cours d'une réception, une jeune femme est victime d'un accident qui l'immobilise pour la vie sur un fauteuil roulant. Un jour, elle assiste de sa fenêtre à une fête qui se termine mal : un mystérieux meurtrier déguisé en Pierrot se réfugie chez elle. Mais tout cela n'est peut-être qu'un cauchemar...Chanson signée Romuald et Pascal Sevran, qui s’adresse au meurtrier plus qu’au personnage lunaire (« Dis Pierrot, d’où viens-tu… ? »). Un peu plus tard Pascal Sevran signera pour Michèle Torr On s’aimera un peu, beaucoup, et Est-ce mon cœur ou le printemps ? qui sont toutes deux inédites mais qu’on peut entendre sur Youtube.
-
Ensuite Ceux du
parking, en 1882, pour la série télévisée Joëlle Mazart. Evocation
des jeunes des banlieues difficiles sur un rythme à la fois lent et syncopé,
pour clore chaque épisode de la suite du feuilleton à succès Pause Café dont
l’héroïne, assistante sociale, a les traits de Véronique Jeannot. Signé Didier
Vasseur.
-
Enfin Le voyage
en bateau, en 1984, pour Les parents ne sont pas simples cette année,
de Marcel Jullian. La chanson, sur le bonheur qui inquiète quand parfois il
déborde, avant qu’il ne décroisse, est signée Jean-Jacques Debout. Le film,
dans le prolongement du succès de La Boum et La Boum 2, met en scène la petite
sœur de l’une des héroïnes de ces deux films. Une très jolie mélodie, riche et
mouvante comme l’eau d’une rivière, qui nous emmène loin dans l’émotion,
probablement plus loin que le film n’est parvenu à le faire.
Entre temps, en 1976,
sur son premier album de reprises de chansons anciennes, Michèle Torr reprend Les feuilles mortes, de Jacques Prévert
et Joseph Kosma, qui a été écrite pour le film de Marcel Carné Les
portes de la nuit, dans lequel Diego, incarné par Yves Montand, en
chantonne des bribes.
© G.D. & E.D.
Par ailleurs, la chanson Parlez-moi
d’amour, qui date des années 20,
a été aussi interprétée par Dalida dans le film Parlez-moi
d’amour sorti en 1961.
Michèle Torr y reprend également La complainte de Mackie, inquiétante chanson tirée de L’opéra
de quat’sous, de Berthold Brecht, portrait d’un sinistre meurtrier.
On apercevra aussi la chanteuse dans un épisode de
Commissaire Maigret, chantant à la télévision Petit Papa Noël, en 1977 vraisemblablement.
« Je me souviens…
Le ciné d’Hollywood
James Dean Natalie Wood
C’était bien »,
A propos de La fureur de vivre, La musique de mes idoles, 1980.
« Tu sais la vie n’est…
Pas un film d’Elia Kazan, c’est la vie simplement »,
Mon fils, 1980.
« Dans un décor de Fellini,
Bateau brisé, nuages gris,
On jouait La Strada
pour moi aussi »
(Mélancolie femme,
1981)
Dans Romantique,
féminine, en 1983, c’est une multitude d’héroïnes de romans et de films qui
sont évoquées : La maîtresse du lieutenant français, Les Hauts de Hurlevent, La Princesse de Clèves, Madame Bovary,
Scarlett O’Hara (d’Autant en emporte le vent), Mayerling (cité aussi
dans la chanson De l’amour, en 1981)… sont aussi connus, pour la plupart,
comme films que comme romans.
« Je voudrais t’emmener
Rêver dans mon ciné
Remonter dans le passé »,
1900, 1983.
« Le film de ma vie défile
Sur les pages jaunies de mon livre
Seize ans déjà que tu es né
A Courthézon un jour d’été »
(Le temps, 1984)
« C’est une chanteuse de rock
Qu’on voit dans les revues
Une star de cinéma
Quelqu’un comme vous et moi ».
En 1987, sur l’album Qui,
Cendrillon rock nous parle de la déconnection de la vie réelle ou de celle qu’on
s’est rêvée, et de celle qu’on vit, engendrée par la célébrité.
En 1987, sur l’album I
remember you, le refrain de Toi émoi
est essentiellement composé d’une liste de films qui évoquent la passion
amoureuse sous toutes ses formes : La Dolce Vita, Love story, Jeux interdits, Les
enfants du Paradis…, en mémoire des moments heureux d’un amour qui
meurt, tandis que les couplets retracent
les chaos de la vie de couple dans ses
détails les moins poétiques (retours tardifs, suspicions, réconciliations provisoires
sur l’oreiller). Comme si la vie était moins belle que son reflet dans les
films. Au cinéma, la passion dans ce qu’elle a de plus intense et de plus beau,
dans la vie dans ce qu’elle a de moins reluisant et de plus douloureux.
Marcel Pagnol est aussi évoqué dans Tu ne vaux pas une larme :
« Je me souviens d’un certain film de Pagnol la
dernière fois…
J’ai mal mais je sais
Qu’un soir avec lui
On ira au ciné
Revoir en nostalgie
La femme du boulanger ».
En 1988, la pochette de Je
t’avais rapporté est très cinématographique, avec ces bordures qui imitent
une pellicule de chaque côté…
Michèle Torr a aussi voulu rendre hommage de façon
plus appuyée à Pagnol en 1993, en consacrant une chanson entière à son
personnage de Fanny, présent dans la trilogie Marius – Fanny – César.
Elle s’intitule Fanny sur le port et
évoque l’attente et les inquiétudes de la jeune femme après que celui qu’elle
aime s’est embarqué sur un bateau pour exercer ainsi le métier dont il rêvait,
alors qu’elle est restée, à sa place, auprès du père de son amoureux, afin de l’aider à gérer le café qu’il tient
sur le Vieux port de Marseille.
Michèle Torr joue parfois la comédie dans des sketchs
diffusés dans les émissions de Patrick Sébastien, Sébastien c’est fou, Carnaval ou Farandole. Elle a incarné en
particulier la Vieille, inspirée d’une chanson de Michel Sardou, en 1987 ou
parodié Anne Sinclair.
Dès les premières images de Ma vie en rose d’Alain
Berliner, en 1997, on entend Emmène-moi
danser ce soir, que chantonne l’un des personnages féminins du film se
préparant pour une réception (une crémaillère). Le héros est un jeune garçon de
7 ans prénommé Ludovic, dont la seule ambition est de devenir une fille
lorsqu’il sera grand. La famille Fabre, dont la mère est interprétée par
Michèle Laroque, s’installe dans une banlieue pavillonnaire. Le patron du père
habite en face. La famille comporte une fille et trois garçons. Ludovic est le
petit dernier, qui fera faire à tout son entourage l’expérience de la
différence puisqu’il se montre pour la première fois à ses voisins déguisé en
fille. Un peu plus tard, on entend le refrain et la moitié du deuxième couplet
de la chanson sur laquelle dansent les invités:
« Qu’est-ce que c’est beau ! déclare la voisine
qui est aussi la femme du patron. J’avais toujours dit que le premier qui
m’invite à danser sur ce morceau je l’épouse ; et c’était toi… »
avant que la grand-mère de Ludovic ne lui préfère une
musique plus rythmée. Un film aussi émouvant que drôle, sur la quête d’identité
d’un petit garçon particulier, dans lequel la voisine, certes naïve, n’est pas
dénuée de sensibilité. Mais François Ozon ira plus loin dans l’utilisation de
l’image de la chanteuse…
Dans la série Hommage,
sur le CD consacré à Charles Aznavour par les éditions Atlas paru en 1998, Michèle
Torr reprend Les comédiens. La chanson ne parle pas des acteurs de cinéma
mais de ces artistes itinérants dont les troupes se produisaient par le passé
dans les campagnes, de village en village, menant une vie nomade, une vie de
Bohémiens qui ressemble beaucoup à celle des chanteurs en tournée,
perpétuellement sur les routes. Les camions ont remplacé les roulottes, les
spots ont remplacé les calicots…Une chanson délicieusement délicate interprétée
avec la vivacité, la gaieté dont les saltimbanques doivent ne pas se départir.
Il y a eu aussi, dans ces années 90, de mystérieux essais
avec Georges Lautner, le réalisateur
des Tontons flingueurs, mais le
projet ne semble pas avoir abouti…
Bâillonner Michèle Torr, sacrilège ou fantasme de
cinéaste ?
Au début des années 2000, L’amertume de la chanteuse devant
l’utilité des fils barbelés…est un moyen-métrage d’Armand Lameloise, d’environ
45 minutes, qui raconte l’histoire d’une infirmière, interprétée par Fabienne
Babe, qui se rend au domicile d’un adolescent atteint de mucoscidose pour l’accompagner dans son agonie, puisque
le jeune homme va décéder à la fin du film. Entre temps elle s’offre à lui pour
qu’il découvre l’amour charnel une fois, avant de mourir. Cette jeune infirmière
a une passion pour la chanson, qui lui sert d’échappatoire quand son métier
devient trop difficile, et elle est parfois témoin d’apparitions
miraculeuses : ce sont ses chanteuses préférées qu’elle voit apparaître,
et l’une d’entre elles est Michèle Torr qui, vêtue d’un tailleur mauve à motifs
floraux, l’accueille à sa descente de bus, juste avant qu’elle ne se rende chez
l’adolescent incarné par Stanislas Crévillen. Elle lui chante Tous les oiseaux reviennent, dans une
version créée pour le film, réorchestrée par Jean-Michel Bernard (…arrangeur de
Chante Piaf, C’est l’amour) avant de
disparaître aussi mystérieusement qu’elle est apparue.
Le film, qui date de 2001, a été plusieurs fois diffusé à la
télévision, sur France 2 et sur Arte, tardivement dans la soirée ou dans la
nuit. Le DVD comporte en bonus une interview de Michèle Torr de 16 minutes, dans
laquelle on la voit chez elle, dans son appartement parisien, juste avant
l’Olympia 2005, le 3 mars. Elle déclare à propos de L’amertume…:
« J’ai été interpellée par le titre, mais aussi le
sujet, et puis surtout la rencontre après, avec Armand Lameloise. J’ai été
séduite par le côté lourd, grave, dramatique de cet homme malade, et le
contraste avec l’héroïne qui, elle, est plus rêveuse, plus légère, et qui va
l’aider… »
Elle ajoute qu’étonnée par le choix de la chanson, qui n’a
pas été un tube, par Armand Lameloise, elle a tenu à enregistrer Tous les oiseaux reviennent, pour la
réactualiser.
Elle évoque à nouveau Le
Diable aime les bijoux pour dire que si l’équipe n’était pas vraiment
dirigée, c’est que le réalisateur paraissait avoir quelques problèmes avec
l’alcool.
« Tourner, jouer la comédie, c’est un rêve, j’ai envie, j’aimerais
un jour… » rappelle-t-elle aussi.
En 2003 c’est la pochette de Dans mes bras oublie ta peine qui tient un tout petit rôle dans Ibrahim
ou les fleurs du Coran, de François Dupeyron : Momo est amoureux
de sa rousse voisine Sylvie, alors, comme elle aime beaucoup les chansons à la
mode, il lui achète, entre autres disques, le deuxième EP de Michèle Torr.
Mais, à son retour dans l’immeuble, il la surprend dans la cour en compagnie
d’un autre. Par dépit, il lui jette les disques qu’il comptait lui offrir
depuis le premier étage, par la fenêtre de son appartement, et ils se brisent
sur le sol.
En 2005, il a été fortement question que Michèle Torr joue
au théâtre, comme bon nombre de ses consoeurs telle Sylvie Vartan, ou Isabelle
Aubret, un rôle dans la pièce Les
monologues du vagin, écrite par Eve Ensler, mais cela ne s’est finalement
pas concrétisé car Michèle Torr est partie en tournée : il a dû y avoir
incompatibilité entre les représentations pour lesquelles elle était pressentie
et les premières dates de la tournée Age
tendre et Tête de bois.
On se rappellera aussi avoir entendu pendant quelques mois Je t’aime tant dans un spot télévisé
pour un produit qu’on ne citera pas…
A propos de Potiche, de François Ozon.
Il paraît que François Ozon, le réalisateur de Potiche, a vu
Sylvie Vartan au Palais des Congrès en mars 2008.
Il paraît qu’il était à l’Olympia le 11 avril 2008. Pour y
voir Michèle Torr.
Ce brillant cinéaste préparait son film Potiche.
S’il commence par un anachronisme pour les puristes qui
admirent Michèle Torr (le personnage de Suzanne incarné par Catherine Deneuve
n’a pu s’affairer autour de son lave-vaisselle en écoutant Emmène-moi danser ce soir, sorti en 1978, en 1977 !) le film
n’en constitue pas moins un bel hommage, peut-être en partie involontaire, à la
chanteuse, car il ne comporte pas que sa chanson fétiche dans la bande
originale.
Voyez le personnage de Joëlle, interprété par Judith
Godrèche : ses coiffures, ses tenues, son jeu… rappellent inévitablement
les photos, les passages télé, les reportages où l’on voyait Michèle Torr dans
le parc de sa Maison Blanche, à Seine-Port, ou tenant une rose au moment de la
création de celle qui porte son nom…Pour ceux qui ont dans un coin des coupures
de presse de la fin des années 70 et du début des années 80, la ressemblance
est flagrante.
L’image qui a été véhiculée de Michèle Torr à l’époque est
bien la même : une jeune femme sage en apparence, d’abord un peu effacée,
un peu trop soumise à un mari invisible, très conservatrice…
Et c’est cette même jeune femme qui un jour dans l’adversité
prend sa vie en main avant de s’affirmer et de devenir elle-même. De même
Michèle Torr, après le virage en lacet de l’année 90, qui se met à écrire des
chansons (ce sont les CD Vague à l’homme,
Seule et La Louve qui en
contiennent le plus) et se produit, à partir de 1996, ce qui lui permet d’être
là encore aujourd’hui…
Alors un hommage, inconscient peut-être, ou involontaire,
mais un hommage quand même, autant qu’à la Catherine Deneuve des Parapluies de Cherbourg, avec aussi
Jérémie Rénier qui un peu plus tard a incarné Cloclo dans un autre film, à une
chanteuse (M. Torr), plus qu’à l’autre (S. Vartan), et à toutes les femmes qui
ont lutté pour exister, quelle que soit l’image qu’elles ont pu donner ou que
l’on a donné d’elles.
En 2011, des disques de Michèle Torr sont montrés dans Parlez-moi
de vous, de Pierre Pinaud avec Karin Viard. Celle-ci y interprète le
rôle d’une présentatrice d’émission de radio qui, abandonnée par sa mère dans l’enfance, se met en quête de celle qui,
dans sa dernière lettre, lui avait promis de venir la chercher à l’orphelinat
où elle l’a laissée mais qui n’est jamais venue. Dans un premier temps, sans révéler qui elle
est, elle fait la connaissance d’une dame ordinaire, estimée de son
entourage malgré sa rudesse, bénévole
au Secours Populaire, qui cache dans sa chambre les disques de sa chanteuse
préférée : on entrevoit Un disque d’amour, J’aime, le double album Super Stars Télé en double, Chanson
inédite, Une Petite Française… C’est Je
m’appelle Michèle qu’on entend, et que l’héroïne écoute la nuit, de façon à
essayer de comprendre celle qui l’a abandonnée
et qui ne lui dira pas pourquoi. A la question « Est-ce que tu m’as
aimée ? » elle ne parviendra qu’à lui arracher un Oui que par la
force, en la menaçant de couper l’oxygène dont dépend sa vie alors qu’elle est
couchée sur un lit d’hôpital.
En 2014, le 30 janvier, Michèle Torr est invitée au théâtre
du Rond-Point, à Paris, parmi plus de 450 personnes, aux 60 ans de Dominique
Besnehard, qui semble être son agent pour le cinéma depuis longtemps. C’est
vrai qu’il a affirmé haut et fort son admiration pour la chanteuse et sa foi en
la possibilité de la voir devenir actrice –encore dans Platine dans le numéro
de mai 2014-. Signe que l’espoir d’avoir un vrai rôle n’est pas mort ?
L’avenir nous le dira. Occasion de la voir en photo dans Le Point ou Paris-Match
en tout cas, avant qu’elle ne le retrouve pour l’émission La parenthèse inattendue. Avant aussi sa lecture de lettres de
Calamity Jane, de Mme de Sévigné et de Colette à l’occasion des Flâneries d’art contemporain à
Aix-en-Provence le samedi 14 juin 2014.
On apprend aussi (ou on se rappelle) que Michèle a aussi
participé à une comédie musicale sur Le chat botté pour la télévision
dans les années 60, ou encore qu’elle a aussi parlé du métier d’actrice dans 1900
en 1983 :
« Je voudrais t’emmener
Rêver dans mon ciné
Remonter dans le passé… »
Ou dans Le château des grisailles en 1984,
qu’on retrouve sur Portrait de scène en
1999 ou dans Olympia 2011 :
« Au carnaval de mai
Les soirs de bal j’étais
Une bohémienne comédienne idéale »…
Des chansons dans le
cours ou à la fin d’un film, quelques pochettes aperçues, quelques images, pas
grand-chose… Une chronique faite de brindilles, de broutilles, de petites
choses sans grande importance, peut-être guère convaincante… Alors à la
question « Le cinéma, le théâtre, la télévision sont-ils passés à côté
d’une très grande actrice ? », la réponse s’impose :
Avant d’être actrice, Michèle Torr n’est pas n’importe quoi,
Elle est chanteuse,
« Elle est née chanteuse » (Maurice Chevalier)
Chanteuse.
« A la voix
d’or… »…